mercredi 30 décembre 2015

Minqi Li, économiste chinois : “Dans les 10 ans qui viennent, un grand soulèvement de la classe ouvrière est très probable en Chine”

par Pablo Ampuero Ruiz 巴梓诺, China Files, 23/8/2012; Traduit par  Fausto Giudice, Tlaxcala

Original: “Dentro de diez años es muy probable que haya un levantamiento a gran escala de la clase trabajadora en China”: economista chino Minqi Li


Le professeur et militant Minqi  Li (李 民 骐) est actuellement  la figure intellectuelle  la plus importante de la Nouvelle Gauche chinoise. Licencié en économie de l'Université de Beijing et docteur en économie de l'Université de Masachussetts à Amherst, Minqi Li est maintenant largement reconnu pour son travail sur l'économie politique et son livre The Rise of China and the Demise of the Capitalist System ( L'essor de la Chine et l'effondrement du système capitaliste). Chine Files a conversé avec lui sur sa vie, sa pensée économique et sa vision de la Chine d'aujourd'hui.
En 1989, il a participé aux protestations de la place Tiananmen menées par les étudiants et les intellectuels libéraux exigeant davantage de droits politiques et économiques. Pour son opposition à la politique du Parti communiste, un an plus tard il a été arrêté et détenu pendant deux ans, accusé de "propagande contre-révolutionnaire". Il a profité de son séjour en prison pour réfléchir sur la situation de la Chine et les possibilités de changement; c'est ainsi qu'il a découvert les textes de Marx, Engels et Lénine.

Minqi Li est connu pour son engagement militant en faveur de la lutte des travailleurs et de la cause du socialisme. Il est l'un des principaux dirigeants de la Nouvelle Gauche chinoise, qui a une vision critique plutôt positive sur la période maoïste et ne voit pas d'un bon œil le tournant néolibéral pris par le pays avec la politique de "réforme et ouverture». Parler avec Minqi Li, c'est entrer en contact avec une Chine qui n'apparaît pas dans la presse, et cela permet, grâce à une argumentation solide, de dévoiler le paradoxe entre la réussite économique actuelle du géant asiatique et le moment historique que vit le monde.

Vous avez étudié la gestion économique à l'Université de Beijing, où vous êtes devenu un adepte convaincu de l' "École de Chicago" (le néolibéralisme). Mais aujourd'hui, vous êtes un leader de la Nouvelle Gauche chinoise. Comment un tel changement a-t-il été possible?
J'étais étudiant de premier cycle en économie à l'Université de Beijing entre 1987 et 1990. Dans les années quatre-vingt, l'économie néolibérale s'était déjà emparée des principales universités en Chine. Nous avons été formés à croire que la propriété publique des moyens de production et la planification économique étaient intrinsèquement inefficaces et étaient responsables de l'arriération économique de la Chine. En particulier, les économistes faisaient valoir que le socialisme encourageait la paresse des travailleurs, qui vivaient de l'aide sociale et de la protection de l'État. Les entreprises publiques devaient être privatisées et les travailleurs feignants licenciés. Beaucoup d'étudiants, à cette époque en Chine, ont été attirés par le modèle capitaliste occidental, croyant que dans une économie capitaliste de marché libre, la liberté politique et la démocratie allaient fleurir.
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Un gréviste de la faim sur la place Tiananmen en mai 1989. Photo : Stuart Franklin / Magnum
Ironiquement, ce sont les travailleurs qui ont soutenu les étudiants pendant le mouvement pour la démocratie de 1989. Les travailleurs n'avaient pas réalisé que si les étudiants et les intellectuels libéraux avaient gagné, ils auraient mis en œuvre des programmes de privatisation style "thérapie de choc" et détruit des dizaines de millions d'emplois. D'autre part, les étudiants et les intellectuels libéraux avaient des doutes sur la mobilisation des travailleurs au moment critique du mouvement démocratique, en raison de leur méfiance instinctive vis-à-vis de la classe ouvrière. J'ai participé au mouvement démocratique de 1989.

En réfléchissant sur l'échec du mouvement, je suis parvenu à la conclusion que le mouvement démocratique ne pourrait pas réussir sans une mobilisation totale de la classe ouvrière. Mais une mobilisation des travailleurs aurait à tenir compte de leurs propres intérêts économiques et sociaux. Il semblait y avoir là une contradiction évidente entre les exigences de la démocratie et celles de l'économie capitaliste néolibérale. Je commençais à penser qu'il pourrait y avoir quelque chose d'utile dans la théorie marxiste et j'ai commencé à lire certains livres. Au début, j'ai lu principalement des écrits marxistes occidentaux modernes (GA Cohen, Paul Sweezy, Ernest Mandel). Pendant que j étais en prison (1990-1992), j'ai lu de nombreux textes de Marx, Engels, Lénine et Mao. À cette poque, je suis devenu un socialiste, marxiste et marxiste-léniniste. Aujourd'hui, je me considère comme un marxiste-léniniste-maoïste.

mardi 29 décembre 2015

Une crise économique mondiale Made in China?

par Minqi Li 李民骐, 20/10/2015. Traduit par  Fausto Giudice, Tlaxcala

China and the 21st Century Crisis (La Chine et la crise 21e siècle) de Minqi Li est publié aujourd'hui (20 octobre 2015). Ici, il se penche sur les fondements de ce qui pourrait être le locus de la chute du capitalisme, et pourquoi cela pourrait arriver plus tôt que nous le pensons.

Plusieurs institutions économiques dominantes mettent en garde contre le risque de la crise économique mondiale à venir. Le 8 septembre, le Citi Group a publié un rapport de recherche, Is China Leading the World into Recession? (La  Chine est-elle en train de conduire le monde dans la récession?) écrit par Willem Buiter, économiste en chef de Citi. Le rapport avertit qu' "une récession mondiale à partir de 2016, menée par la Chine, est maintenant le scénario principal de notre équipe de Global Economics. L'incertitude demeure, mais la probabilité d'une réponse politique rapide et efficace semble diminuer".
Le 11 septembre, Daiwa Securities Group, la deuxième plus grande maison de courtage du Japon, a publié un rapport intitulé What Will Happen If China’s Economic Bubble Bursts (Ce qui arrivera si la bulle économique chinoise éclate). Le rapport de Daiwa fait valoir que le taux de croissance économique de la Chine va tomber à zéro, même dans le "scénario optimal". Toutefois, un «effondrement» de l'économie chinoise serait le «résultat le plus probable.» Dans ce cas, «si l'économie de la Chine, la deuxième plus grande dans le monde, deux fois la taille du Japon, devait tomber dans une telle situation de crise, l'effet serait plus que probablement de mettre l'économie mondiale en chute libre. Son impact pourrait être le pire que le monde ait jamais vu ».
Puis le 3 octobre, Lawrence Summers, l'ancien Secrétaire du Trésor US et conseiller économique du président Obama, a écrit un article intitulé "The Global Economy Is in Serious Danger" («L'économie mondiale est en grave péril»). L'article paraît à la fois sur le Financial Times et le Washington Post.
Il semble qu'un consensus se dessine de plus en plus sur le fait que l'économie capitaliste mondiale se rapproche rapidement de la prochaine crise. Du point de vue de la lutte de classe mondiale, la vraie question est de savoir quel rôle la prochaine crise économique joue dans la crise structurelle actuelle du capitalisme mondial (la troisième du genre «crise structurelle» après celles de 1914-1945 et de 1968-1989 ) et si oui ou non la crise structurelle actuelle peut être résolue dans le cadre historique du capitalisme.

Ni marche en avant, ni marche arrière
La Chine à l'ère des émeutes

par Chuǎng 闯, 21/12/2015. Traduit par  Fausto Giudice, Tlaxcala
Rififi dans le  denim
L'histoire est désormais familière : un matin, au printemps de 2011, un marchand ambulant est harcelé et tabassé par la police. Ce soir-là, des rumeurs circulent sur Internet : le marchand serait mort. Des centaines de personnes se rassemblent dans les rues, rendus furieux par l'apparent assassinat. Ils brûlent des voitures, pillent les distributeurs automatiques et attaquent la police antiémeutes envoyées pour les disperser. Mais ils ne se dispersent pas. L'émeute se poursuit sur plusieurs jours, avec des milliers  de participants. Les journalistes qui viennent faire des reportages sur les événements sont bloqués par les forces de sécurité. La rumeur de l'insurrection se propage sur Internet même si le gouvernement utilise toutes ses ressources pour couper l'accès à l'information.

Malgré sa ressemblance frappante, ceci n'est pas l'histoire de Mohamed Bouazizi, le marchand ambulant tunisien, harcelé par la police, dont l'auto-immolation a déclenché le printemps arabe. Le héros de cette histoire était l Tang Xuecai ( ), un migrant du Sichuan dans la ville de Guangzhou. L'émeute [1] a eu lieu à Xintang, une des nombreuses zones industrielles du Delta de la Rivière des Perles, spécialisée, elle, dans le denim [2], la majorité des émeutiers étant eux-mêmes des travailleurs migrants dans les usines fabriquant des jeans pour l'exportation. Et, à la différence des émeutes et des grèves qui ont suivi la mort de Bouazizi en Tunisie, l'émeute de Xintang a finalement été écrasée quand la police a repris le contrôle du district, procédé à des arrestations en masse et a forcé la majorité des migrants à reprendre le travail.

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Xintang, 12 juin 2011
Mis à part cette comparaison, l'émeute de Xintang n'avait rien de particulièrement spécial. D'un point de vue purement quantitatif, des villes comme Guangzhou, Shenzhen et Dongguan dans le  Delta de la Rivière des Perles (DRP) vivent plus d'émeutes et  plus régulièrement que même Athènes. Si l'on ajoute les grèves, les blocus de routes et autres «incidents de masse» à la liste, les protestations chinoises surpassent régulièrement les tendances mondiales en ampleur et en gravité, surtout depuis que l'absence (ou l'épuisement) de recours juridiques tend à transformer ce qui pourrait être n'importe où ailleurs un piquet ou une protestation bénins en un soulèvement multi-usines risquant de détruire des millions de dollars de matériel. Pourtant, nous ne voyons pas souvent les avenues et les rues de Xintang comme nous voyons celles d'Athènes, jonchées de voitures brûlées tandis que la police  antiémeutes avance et que des essaims d'émeutiers se dispersent à la faible lueur dorée d'une enseigne McDonalds. Au lieu de cela, les images d'Athènes brûlant sont opposées à celles des paysages étincelants de gratte-ciels des villes côtières chinoises, entrecoupées de graphiques de productivité,  de rentabilité et de progrès tous à la hausse.

Mais sous ces graphiques, ces "incidents de masse" ont augmenté au cours de la dernière décennie. [3] Ce malaise en hausse est, en fait, reconnu par de nombreuses sources officielles, comme le Rapport annuel sur l'état de droit de la Chine (n ° 12). Recensant et classifiant les «incidents», ce rapport a également noté que près de 30% d'entre eux ont eu lieu dans la province de Guangdong, dans laquelle se trouve le DRP. [4] Mais beaucoup de ces rapports, dont celui-ci, ne prennent en compte qu'un petit nombre d'incidents de masse rapportés dans les grands médias et généralisent à partir de ce sous-ensemble. D'autres, comme la carte des grèves du China Labor Bulletin, collectent les rapports sur la toile chinoise d'une manière beaucoup plus systématique, mais les données remontent à quelques années seulement. [5] Leur carte est également volontairement focalisée sur les grèves, plutôt que sur tous les " incidents de masse ", et exclut donc souvent des formes de désordres qui sont initiés à l'extérieur du lieu de travail et ne prennent pas la forme de conflits du travail.

Les discussions sur les troubles chinois reposent trop souvent sur des sources partielles ou des tendances intuitivement «évidentes», allant souvent de pair avec des définitions restrictives. Mais pour discuter de ces phénomènes, il est essentiel d'élargir l'échelle de nos données. Au cours des dernières années une base de données d'agrégateur d'informations sans précédent, Global Data on Events, Language and Tone (GDELT), est devenue disponible, donnant accès à une énorme partie des bulletins d'information du monde, dans plus de 100 langues (avec l'agence de presse de l'État chinois Xinhua comme l'une de ses sources primaires de nouvelles) et codés pour différents types d' «événements», surtout de nature diplomatique, mais comprenant également une série de documents sur les remous politiques internes. [6] Ceci fournit une alternative aux données recueillies dans les rapports officiels ou extraites de médias sociaux chinois, pas tant pour remplacer ces sources mais comme un supplément comparatif. Bien que n'étant pas nécessairement plus digne de foi et plus précise dans les détails, elle peut fournir un contexte longitudinal, ce que les autres ne peuvent pas. [7] Une interrogation des données sur les émeutes en utilisant GDELT a montré une légère augmentation dans les émeutes à travers le monde depuis 1979, rendue plus significative par une diminution parallèle, et beaucoup plus importante, des grèves à l'échelle mondiale. [8] En utilisant les données GDELT, nous sommes maintenant en mesure de voir certains modèles de comparaison invisibles dans d'autres rapports. Néanmoins, les données GDELT sont également basées sur les bulletins d'informations, et donc sous-estiment presque certainement le nombre d'incidents de masse dans un pays comme la Chine, avec sa régulière censure des médias.
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jeudi 24 décembre 2015

Noël vu par les caricaturistes arabes


La Pietà revisitée par l'artiste libanais Jad (George Khoury)
Elle, c'est la femme la plus célèbre de l'histoire. Elle contemple son fils, mort sous la torture. Sur son visage impassible, pas une larme. Rien Lui, Abou Samir, un père dont personne n'a entendu parler. Il pleure son fils, mort sous la torture. La douleur de la perte marque son visage Du monde entier, des gens viennent la visiter. De sa douleur à lui personne ne se préoccupe. Peut-être parce que les gens adorent les dieux et les pierres. Et qu'il ne leur reste pas de temps pour s'occuper du destin des humain.

Mwafaq Katt
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Hic

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Khaled Yacoub
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Ce truc n'était pas indiqué sur la carte
Ya pas un autre moyen d'entrer à Bethléem ?

Yaser Ahmad
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mercredi 23 décembre 2015

Aux États-Désunis d'Amérikkke, les pauvres sont plombés, au sens propre

Yanan Wang
USA : À Flint, dans le Michigan, il y a tellement de plomb dans le sang des enfants qu’un état d’urgence a été déclaré
Pendant des mois, des parents inquiets, à Flint, dans le Michigan, se sont rendus en grand nombre aux cabinets de leurs pédiatres. Leur enfant tenu par la main ou dans les bras, ils avaient tous la même question : leurs enfants ...
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Terrence McCoy
 La vie de Freddie Gray : un exemple des effets de la peinture au plomb sur les Noirs pauvres aux USA
BALTIMORE - La maison où la vie de Freddie Gray a changé pour toujours se trouve au bout d'une longue ligne de maisons en rangée abandonnées dans l'un des quartiers les plus pauvres de cette ville. L'intérieur de cette ...
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Baltimore, USA : Comment se faire des millions sur le dos des Noirs pauvres atteints de saturnisme 
BALTIMORE - La lettre est arrivée en avril, un méli-mélo de chiffres et de mots étranges. Cela ne l'a pas alarmée tout de suite. La plupart des lettres sont pour elle des énigmes frustrantes qu' elle ne peut ...
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jeudi 17 décembre 2015

Tout ça pour ça ?
“Révolution” tunisienne, 5 ans déjà
كل هذا من أجل هذا؟ "الثورة" التونسيّة، بالكاد خمس سنوات

par FG, 17/12/2015

Italiano Tutto questo per questo?
Ormai al quinto anno dalla “rivoluzione” tunisina  

English All that for this?
The Tunisian "Revolution", 5 years later 

Español  ¿Todo esto para eso?
“Revolución” tunecina, 5 años ya
 

 
Les guillemets s'imposent pour qualifier les événements qui, déclenchés par l'auto-immolation de Mohamed Bouazizi le 17 décembre 2010 à Sidi Bouzid, seront accélérés par sa mort le 4 janvier 2011 et conduiront à la fuite précipitée du dictateur Ben Ali, sur les bons conseils des habituels amis qui vous veulent du bien, le vendredi 14 janvier 2011. Un soulèvement qui ne fait aucun mort chez l'ennemi, mais 300 chez les insurgés, est tout sauf une révolution. Une révolution qui ne coupe aucune tête n'en est pas une. C'est pourquoi on a inventé, entre Paris et Bruxelles, le joli qualificatif de "révolution de jasmin", variante tour operator des révolutions de velours, orange et autres couleurs de l'arc-en-ciel vu des centres de commandement du monde.

Cinq ans après la phase 1.0, les Tunisiens attendent toujours la phase 2.0.
Que constatent-ils ?

1- Ils ont une nouvelle Constitution. Très bien, mais ça ne donne pas à manger. L'homme veut avoir du pain, oui, il veut avoir du pain tous les jours/L'homme veut avoir du pain, du pain et pas de discours, pour le dire à la manière de Brecht.
"Merci, M. Le Président", photo (2011) de Fakhri El Ghezal, qui purge actuellement une condamnation à un an de prison pour détention de cannabis
2-Ils sont gouvernés par des fossiles dirigés par un dinosaure qui vient de fêter son 89ème anniversaire. Conscient qu'il n'est pas immortel, l'occupant du Palais de Carthage est donc affairé à préparer sa succession dynastique : son fiston étant un jeunot (il n'a que 54 ans) est promis à un bel avenir. Évidemment toutes ces manigances présentent quelques inconvénients, entre autres elles ont déclenché une bronca au sein du parti au pouvoir, qu'un paquet de députés ont quitté en claquant la porte, mais, plus grave encore, elles laissent peu de temps pour s'occuper des vraies affaires du pays, à commencer par les kamikazes en roue libre qui font ce qu'ils veulent, vu que la police n'a ni formation, ni directives claires ni feuille de route pour étouffer ce qu'on appelle le terrorisme.

3- La police, justement, parlons-en. Elle fait à peu près n'importe quoi. Agit-elle de son propre chef ou obéit-elle aux ordres ? Les deux, mon capitaine. Dans un cas comme dans l'autre, le résultat est le même : le sentiment d'insécurité général est parfaitement justifié. Tout jeune Tunisien, indépendamment de son look et de son sexe, est aujourd'hui, un gibier en sursis. Il suffit de suivre la chronique des événements courants. Un tiers des 30 000 prisonniers du pays aujourd'hui sont des jeunes condamnés ou en attente de jugement pour détention ou consommation de cannabis. En un peu plus de 3 ans, l'appareil policier a renouvelé le stock  qui avait été vidé par des libérations de masse après la "révolution". Le citoyen de base se pince en se demandant s'il rêve ou est bien éveillé : "Avec Daech à nos portes et parmi nous, ils font la chasse aux fumeurs de zetla ? Ils sont tombés sur la tête ou quoi ? " Et voilà que la marchandise humaine livrée dans les taules est maintenant complétée par les pédés. Les condamnations à 3 ans de prison pour "sodomie" pleuvent. Pour compléter le tableau, ajoutons le harcèlement de tout ce qui bouge du côté des porteuses de seins; on ne sait jamais, elles pourraient s'aviser de les montrer pour protester contre la merde dominante et ambiante. Bref, pour parler comme au moins 75¨% des Tunisiens et Tunisiennes, on peut poser la question : "Alors, cette révolution ça vient ?"
"Il a neigé" (2012), d'Atef Maâtallah, qui purge actuellement une condamnation à un an de prison pour détention de cannabis
4-Mais tout cela n'est que détail au vu de la situation réelle de la masse du peuple : le prix de l'huile d'olive a pratiquement triplé en 4 ans, les autres prix ont tous augmenté vertigineusement. Les salaires ont à peine suivi, pour ceux qui en ont, ce qui n'est pas le cas de la moitié de la jeunesse. Le tourisme s'est effondré, Frontex a dressé un mur électronique pratiquement infranchissable en Méditerranée, et le maigre budget de l'État suffit à peine à payer les intérêts de la dette héritée de la dictature – une proposition de loi déposée à l'Assemblée constituante pour réaliser un audit de cette dette a fini aux oubliettes -, à laquelle s'est ajoutée la nouvelle dette contractée par le régime "démocratique" (1,7 milliard de $). Bref, il faut avoir une sacrée dose d'optimisme pour imaginer un futur quelconque.

Tunisie, "No future" ?
Le peuple répondra à cette question. Restez connecté-es, vous n'êtes pas au bout de vos surprises.



علامات الاقتباس ضروريّة لوصف الأحداث الناجمة عن حرق محمد البوعزيزي لنفسه يوم 17 ديسمبر 2010 في سيدي بوزيد، والتي تسارعت بوفاته يوم 4 جانفي 2011 وأدّت لاحقا إلى هروب سريع للدكتاتور بن علي المتبع لنصائح أصدقاءه المعتادين الذين ينصحونه بالأفضل دائما، الجمعة 14 جانفي 2011 انتفاضة لم تسفر عن موت أي من الأعداء، لكن إلى وفاة ثلاثمئة منتفض لا يمكن أن نسمي ما حدث ثورة. ثورة لا يتم قطع خلالها أي رأس لا يمكن في أي حال من الأحوال أن تسمى ثورة.

لهذا تم نعتها بهذا الوصف الجميل في باريس وبروكسيل-ثورة الياسمين-التسمية الترويجية للنسخة التونسية مثل الثورة المخمليّة والبرتقاليّة وألوان أخرى كألوان الطيف كما يراها أصحاب القرار في العالم.
خمس سنوات مرّت بعد المرحلة 1.0 ولازال التونسيّون ينتظرون المرحلة 2.0
ما هو رأيهم؟
لديهم دستور هذا شيء جيّد لكن لا يطعم خبزا
   الانسان يحتاج الى الخبز، نعم، يحتاج الى الخبز كل يوم
   لنقلها على طريقة بريشت" ان الإنسان يحتاج الى الخبز، يحتاج خبزا ليس خطابات."
    

    الزطلة.  صورة تعود الى 2011 لفتحي غزال ، الذي لا يزال مسجونا في قضيّة حيازة مادّة
  يحكم التونسيون كائنات متحجرة ويقودهم ديناصور احتفل مؤخرا بعيد ميلاده التاسع والثمانين يعلم جيدا كونه ليس خالدا، محتل قصر قرطاج منشغل بتحضير ولي العهد. ابنه كونه شابا ليس له من العمر إلا 54 سنة له" مستقبل واعد".
   بالطبع لكل هذه المخططات والخدائع مساوئها بطريقة او بأخرى من بينها خلق انشقاق داخل الحزب الحاكم واستقالة غاضبة لمجموعة من نواب كتلة النداء في المجلس والأخطر من ذلك عدم الإبقاء على وقت للاهتمام بالمشاغل الحقيقية للدولة، بدءا من الانتحاريين الطلقاء والفاعلين ما يحلو لهم، نظرا لغياب في التأهيل والتعليمات في جهاز الامن وعدم توفر خارطة طريق واضحة للتعامل مع ملف الإرهاب.
  -لنتحدث عن قوات الامن. هي تقوم فعلا بفعل أي شيء-تلبز-. لكن هل تنفذ الأوامر أم تتصرف كما يحلو لها الجواب هو الاثنان معا. في جميع الأحوال، النتيجة واحدة ... الشعور بانعدام الأمن وهو امر لم يأتي من فراغ انه نتاج لسلوك قوات الامن تجاه المواطن.
    كل شاب تونسي، بغض النظر عن مظهره وجنسه هو اليوم مشروع سجين.
  يكفي فقط تتبع تواتر الأحداث ثلث ال 30.000 ألف مسجون هم شبان متهمون بحيازة أو استهلاك مادّة الزطلة " القنّب" وينتظرون المحاكمة.
  في ثلاث سنوات ونيف تمكن جهاز الشرطة من تجديد مخزون السجون الذي أفرغ إثر الإعفاءات المتكررة التي تلت الثورة. يتساءل المواطن العادي إن كان مستيقظا يحلم " داعش على الأبواب و بيننا، وهم يركضون وراء مدخني الزطلة ؟ هل فقدوا عقولهم؟ " مع كل هذه البضاعة البشرية التي ترمى في السجون هناك مكان أيضا للمثليين. الحكم بثلاث سنوات لكل متهم باللواط خبر نسمعه كثيرا هذه الأيام وليكتمل المشهد مضايقات لكل من يقترب أو يمسك يد صديقته، من يعلم، فقد تقرر الفتيات تعرية صدورهنّ احتجاجا على القرف المحيط بهن.
  باختصار لنفعل كما يفعل 75 بالمائة من التونسيين والتونسيات يمكن أن نتساءل " إذن، ماذا حققت الثورة؟ هل ستعطي أكلها قريبا؟

   "سقط الثلج"،2012
عاطف معطالله، محكوم عليه الآن بالسجن بتهمة حيازة القنّب الزطلة
لكن كل هذا ليس إلا تفصيلا صغيرا نظرا للوضع الحقيقي للشعب ... تضاعف سعر زيت الزيتون بثلاث مرات في أربع سنوات، ارتفعت أسعار المواد الأخرى بحدّة. الرواتب بالكاد ارتفعت بالنسبة للذين لديهم دخل ولكن هذا ليس حال نصف الشباب التونسي.
 اما السياحة فقد انهارت تماما.
وقد قامت الوكالة الأوروبية لمراقبة الحدود الخارجية" فرونتاكس" بوضع حاجز إلكتروني في البحر الأبيض المتوسّط لا يمكن التغلب عليه عمليا.
ميزانيّة الدولة الهزيلة لا تكاد تكفي تسديد الديون الموروثة من النظام الدكتاتوري ولنضف الى كل هذا الديون التي اقترضتها وتقترضها «الحكومة الديمقراطيّة" (1.7 مليار دولار).
 في الواقع تم تقديم مشروع قانون إلى المجلس التأسيسي لإجراء مراجعة لهذا الدين لكن لم يؤخذ بمحمل الجد.
باختصار ، يجب التحلي بقدر كبير من التفاؤل لتصوّر أي مستقبل .
تونس " لا مستقبل؟ "
سوف يجيب الشعب على هذا التساؤل. ابقوا على اطلاع على اخر الاخبار فالمفاجئات لم تنتهي.
  

Sidi Bouzid, 17 décembre 2010 : ce n'était qu'un début, le combat continue
سيدي بوزيد 17 ديسمبر 2010: كان هذا مجرد بداية ويستمر الكفاح

Dernière minute:

Afraa Amaïri, une jeune femme tunsienne très engagée, a été arrêtée par la police en raison de de la campagne qu'elle mène contre les abus de la police. Elle est actuellement en garde à vue au commissariat du Kef et passera demain devant le juge. Elle n'a que 17 ans. Elle passe son bac cette année. Faites quelque chose pour elle. Elle réside au Kef. On n'en peut plus de gouvernement par la peur. Afraa, c'est notre jeunesse qu'on assassine!!! Réclamez la libération de cette jeune fille et mettez fin à la dictature policière qui s'annonce et à la "Force de l'obéissence" (B. Hiibou). Avec ceux qui nous gouvernent, vous avez l'autocratie et la ploutocratie mais pas du tout la sécurité, alors osez dire non! Libérez Afraa!


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lundi 14 décembre 2015

Tunisie : six étudiants condamnés pour homosexualité

Mathieu Galtier, Libération, 14/12/2015
Les juges de Kairouan ont infligé trois ans de prison aux six accusés. Ils sont, en outre, bannis de la ville pour cinq ans. L’homosexualité est toujours interdite en Tunisie, où on compte cinquante condamnations par an.
Six étudiants ont été condamnés pour homosexualité à trois ans de prison et cinq ans de bannissement de la ville de Kairouan (Tunisie), où ils ont été arrêtés le 4 décembre. Il s’agit de la peine maximale prévue par l’article 230 du code pénal, qui criminalise la sodomie. Les trois juges, qui ont rendu leur décision le 10 décembre, sont allés encore plus loin en décidant du bannissement (article 5 du code pénal). «La punition de bannissement est une première pour des cas de ce genre, assure l’avocate Fadoua Braham, spécialiste des procès d’homosexuels. La loi date de 1913. Elle a été très rarement appliquée et concernait surtout des femmes prostituées dans les années 60 et 70.»

Test anal
L’un des condamnés a écopé de six mois de prison en plus pour «atteinte à la pudeur», car les policiers ont retrouvé des vidéos pornographiques sur son ordinateur. Les six inculpés ont également dû subir un test anal pendant leur interrogatoire. Une pratique dénoncée comme «avilissante» par différentes associations des droits humains.
Les défenseurs et proches des six étudiants craignent des conditions déplorables d’emprisonnement. Leur principale peur est qu’ils soient détenus dans des cellules avec des prisonniers homophobes qui pourraient s’en prendre à eux physiquement.
Les étudiants vivaient dans le foyer universitaire de Rakada à Kairouan, une ville très conservatrice au centre du pays. Les circonstances de l’interpellation ne sont pas encore très claires. Selon l’association de défense des minorités Shams, ils auraient été arrêtés à l’intérieur du foyer pendant que deux d’entre eux avaient des relations sexuelles. Pour Fadoua Braham, l’arrestation aurait eu lieu en dehors du foyer et les jeunes gens auraient été dénoncés par des voisins.


Une bonne cinquantaine de personnalités est actuellement mobilisée pour dénoncer l’'article 230 du code pénal criminalisant l'’homosexualité. La campagne a démarré le 10 décembre à l’'occasion de l’'anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’'homme, et va se poursuivre jusqu'’à la fin du mois. Photo DR
Sensibilisation
Ce jugement relance le débat de la criminalisation de l’homosexualité en Tunisie. Le 10 décembre, pour la Journée internationale des droits humains, l’association Shams voulait organiser une manifestation pour les droits des homosexuels. «Les autorités ont interdit la manifestation car, nous ont-ils dit : "Nous nous occupons de la lutte contre le terrorisme, pas des pédés"», s’indigne Ahmed Ben Amor, vice-président de Shams.
L’association a décidé de lancer cette semaine une campagne virtuelle de sensibilisation. «Nous allons intensifier notre campagne "On existe, on est criminalisé" contre l’article 230, assure de son côté Ali Bousselmi, cofondateur de l’association Mawjoudin pour le droit des personnes LGBT. Il y a une véritable chasse aux homosexuels.»
En septembre, un étudiant de la région de Sousse avait été condamné à un an de prison pour homosexualité après avoir subi un examen anal. Grâce à son avocate, Fadoua Braham, et à la mobilisation de la société civile, il avait été remis en liberté en attendant son jugement en appel qui doit avoir lieu jeudi. Le ministre de la Justice de l’époque, Mohamed Salah Ben Aissa, avait demandé l’abrogation de l’article 230 mais avait été aussitôt recadré par le président Béji Caïd Essebsi.
« Il y a plus de cinquante cas de condamnations pour homosexualité par an et une cinquantaine d’homosexuels se sont suicidés en 2015 à cause du rejet de la société ou de leur famille», estime Ahmed Ben Amor.

Tunisie : 1 an de prison ferme pour les trois artistes Fakhri El Ghezal, Ala Eddine Slim & Atef Maatallah
"Chef, c'est pas des terroristes, késkonfai ?
– Collez-leur "détention de zetla (cannabis)"


Le comité de soutien aux trois artistes Fakhri El Ghezal, Ala Eddine Slim & Atef Maatallah a publié un communiqué dans lequel il explique comment les trois artistes ont été emprisonnés et condamnés sur la base d’accusations infondées de détention de stupéfiants.
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Jeudi 19 novembre 2015. Ala Eddine Slim et Yosra Nafti, sa femme enceinte de 8 mois, reçoivent Fakhri El Ghezal et Atef Maâtallah à leur domicile. Deux heures plus tard, une quinzaine de policiers armés font une descente dans le domicile et embarquent les quatre amis. Le mardi 8 décembre, Atef, Ala et Fakhri ont été condamnés à un an de prison pour détention de stupéfiants. 

Trois amis artistes, ayant consacré leur vie à leurs pratiques et leurs travaux, grâce à qui le pays s’est retrouvé présenté, distingué et honoré dans les musées, les festivals et les médias les plus prestigieux au monde, aux casiers judiciaires vierges, instaurant et installant, à travers leurs œuvres, des valeurs de liberté, de solidarité et d’humilité, sont soupçonnés de mener des activités terroristes.

Le mandat de perquisition émis par le procureur de la république de Nabeul stipule explicitement les soupçons de la police quant à des activités terroristes au domicile d’Ala Eddine Slim. Les éléments à charge : des individus barbus qui viennent souvent rendre visite au couple. Ce jeudi-là, la police croit avoir les preuves suffisantes. Deux individus arrivent chez Ala et Yosra, l’un d’eux est barbu (Atef) et l’autre transporte un sac « étrange » (Fakhri). C’est à cause de ce sac que le mandat est émis et la descente effectuée. Ce sac contient une caméra Panasonic que Fakhri utilise pour entamer un nouveau projet de film.

La police oriente alors l’affaire non plus vers la mission officielle qui s’est avérée bâties sur des informations erronées, mais vers une affaire de stupéfiants. 

Ala, Fakhri et Atef passent devant le procureur de la république le mercredi 25. Ce dernier les fait passer devant le tribunal de première instance de Nabeul le mardi 1 décembre. Devant le juge, Fakhri, Atef et Ala nient tous trois avoir consommé du cannabis et défendent leur droit constitutionnel de disposer de leur corps et de ne pas s’assujettir au test urinaire. 

Le PV de la police avance des éléments contradictoires et comporte plusieurs éléments de vice de forme. Le juge déclare un non-lieu pour consommation de stupéfiants mais condamne malgré tout Ala Eddine Slim, Fakhri El Ghezal et Atef Maâtallah à un an de prison ferme et une amende de 1000 dinars [=500 €] chacun pour détention de stupéfiants. Ce qu’ils nient fermement.
Ils rejoignent ainsi la dizaine de millier de détenus incarcérés dans les prisons tunisiennes à cause de la Loi 52 du 18 mai 1992. Une loi unique dans le code pénal tunisien : aucune circonstance atténuante envisageable ni possibilité de sursis. Une loi qui utilise des données personnelles et la violation de l’intégrité physique pour l’obtention de soi-disant preuves matérielles. Une loi qui criminalise une substance et fait de son consommateur un délinquant alors que la substance elle-même est moins nocive que la cigarette et l’alcool et qu’elle peut en plus être bénéfique puisqu’elle est transformée en médicaments et prodiguée comme complément de soins pour une dizaine de maladies (dans plus d’une vingtaine de pays de par le monde). 

La cigarette et l’alcool font des dizaines de milliers de morts chaque année dans ce pays alors qu’elles se vendent légalement et que l’Etat encaisse des taxes astronomiques grâce à elles. Le cannabis, qui ne fait absolument aucun mort ni en Tunisie ni de par le monde, remplit les prisons à hauteur du tiers de la population carcérale environ. Les substances qui tuent remplissent les comptes de l’Etat et une substance qui soigne envoie son consommateur au moins un an en prison (la peine étant de un à trois ans). Des institutions carcérales communément considérées par les autorités elles-mêmes comme surpeuplées et globalement considérées par les ONG internationales et les observateurs tunisiens comme extrêmement difficiles à vivre et comme des usines à créer des frustrations sociales et des tentations extrémistes. 

L’application souvent zélée et liberticide de cette loi rétrograde (Adnène Meddeb et Amine Mabrouk ont été condamné à un an de prison pour simple possession d’un paquet de feuilles à rouler) par un Etat se disant « en guerre contre le terrorisme » qui ne sait pas ou ne veut pas savoir que le djihadisme contemporain (type Daech) est né et prolifère en prison est au mieux de l’inconscience d’Etat, au pire de la complicité avec la diffusion de la pensée djihadiste.

Nous ne soutenons pas Atef Maâtallah, Fakhri El Ghezal et Ala Eddine Slim parce qu’ils sont parmi les artistes tunisiens les plus intéressants, talentueux, prometteurs et distingués de leur génération, ni parce qu’ils ont offert à ce pays infiniment plus qu’il ne leur a offert en retour, nous les soutenons car ils sont victimes d’un fiasco policier les prenant pour des terroristes puis justifiant ce fiasco par l’accusation fallacieuse de consommation de cannabis. Nous les soutenons parce que le rapport de police est rempli d’inexactitudes, de contradictions et de pièces ajoutées au dossier par miracle une heure avant l’audience alors que les prévenus étaient incarcérés depuis 19 jours. 

Nous les soutenons car ils sont victimes d’une loi vieille de 23 ans qui remplit les prisons d’innocents pour les transformer en criminels ou en terroristes puis les relâcher pour qu’ils remplissent les rues de violence. Nous les soutenons et soutenons sans exception tous les consommateurs détenus à cause de la Loi 52 car les statistiques officielles fournies par les Etats et les études sérieuses et de longue haleine menées par des scientifiques éminents, prouvent sans l’ombre d’un doute possible aujourd’hui que le cannabis est une substance infiniment moins nocive sur le plan de la santé publique mais aussi de l’équilibre personnel que des dizaines de produits et de médicaments vendus en toute légalité dans les commerces et les pharmacies.

Nous soutenons les milliers et les milliers de victimes de cette loi inique et absurde et demandons que les promesses électorales du parti au pouvoir et du président en exercice soient respectées immédiatement en ce qui concerne la refonte totale par la révision à la baisse de la Loi 52 en bannissant l’incarcération des consommateurs et en concentrant les efforts de l’Etat contre les réseaux, les trafiquants et les barons de la corruption et de la drogue plutôt que contre les simples citoyens qui consomment ce qui se vend à tous les coins de rues.

Tunis, le 12 décembre 2015
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Ala Eddine Slim et une de ses œuvres
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Atef Maatallah et une de ses œuvres
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Fakhri El Ghezal et une de ses œuvres, Otages  (2009)

samedi 12 décembre 2015

Effondrement du système : point zéro

par Chris Hedges
Nous sommes à l'orée d'un des moments les plus dangereux de l'humanité

Aleksandr Herzen, s'adressant, il y a un siècle, à un groupe d'anarchistes qui voulaient renverser le Tsar, leur rappela qu'il n'était pas de leur devoir de sauver un système mourant, mais de le remplacer: "Nous pensons être les médecins. Nous sommes la maladie." Toute résistance doit admettre que le corps politique et le capitalisme mondialisé sont morts. Nous devrions arrêter de perdre notre énergie à tenter de les réformer ou de les supplier de changer. Cela ne signifie pas la fin de la résistance, mais cela implique de toutes autres formes de résistance. Cela implique d'utiliser notre énergie pour construire des communautés soutenables qui pourront affronter la crise qui se profile, étant donné que nous serons incapables de survivre et de résister sans un effort coopératif.
Ces communautés, si elles se retirent de façon purement survivaliste sans tisser de liens entre elles, à travers des cercles concentriques formant une communauté étendue, seront aussi ruinées spirituellement et moralement que les forces corporatistes déployées contre nous. Toutes les infrastructures que nous édifions, tels les monastères du Moyen-âge, devraient chercher à maintenir en vie les traditions artistiques et intellectuelles qui rendent possible la société civile, l'humanisme et la préservation du bien commun. L'accès à des parcelles de terres cultivables deviendra essentiel. Nous devrons comprendre, comme les moines médiévaux, que nous ne pouvons pas altérer la culture plus large, qui nous englobe, au moins à court terme, mais que nous devrions être en mesure de conserver les codes moraux et la culture pour les générations qui viendront après nous. La résistance sera réduite à de petits et souvent imperceptibles actes de désobéissance, comme l'ont découvert ceux qui ont conservé leur intégrité durant les longues nuits du fascisme et du communisme du 20ème siècle.
Nous sommes à la veille d'une des périodes les plus sombres de l'histoire de l'humanité, à la veille de l'extinction des lumières d'une civilisation, et nous allons commencer une longue descente, qui durera des décennies, sinon des siècles, vers la barbarie. Les élites nous ont effectivement convaincu du fait que nous ne sommes plus aptes à comprendre les vérités révélées qui nous sont présentées, ou à combattre le chaos entrainé par la catastrophe économique et environnementale. Tant que la masse de gens effrayés et désorientés, gavée d'images permettant son hallucination perpétuelle, demeure dans cet état de barbarie, elle peut périodiquement se soulever avec une furie aveugle contre la répression étatique croissante, la pauvreté étendue et les pénuries alimentaires. Mais la capacité et la confiance nécessaires pour remettre en question et défier à petite et grande échelle les structures de contrôle lui feront défaut. Le fantasme des révoltes populaires étendues et des mouvements de masse renversant l'hégémonie de l'État capitaliste n'est que ça : un fantasme.
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jeudi 10 décembre 2015

Joe Hill, in memoriam
Ne perdez pas de temps dans le deuil, organisez-vous !

par FG, 10/12/2015
Nous sommes  impardonnables : nous avons raté le centenaire de l'exécution de Joe Hill, le 19 novembre 1915, à Salt Lake City. Comme Malcolm X, Patrice Lumumba, Che Guevara ou Thomas Sankara, il est mort, assassiné par l'ennemi de classe, à moins de 40 ans, exactement à 36 ans, fusillé par un peloton d'exécution.  Mais il n'est jamais trop tard pour bien faire et je m'en vais donc raconter cette page épique, tragique et sanglante de l'histoire de la classe ouvrière des Amériques, ces hommes et ces femmes qui avaient fui la vieille Europe à la recherche du paradis sur terre et tombèrent dans l'enfer du capitalisme le plus meurtrier de l'histoire.
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Un enfant du fer
Joel Emmanuel Hägglund est né le 7 octobre 1879 à Gävle, dans le centre de la Suède, une région appelée le Gästrikland, terre du fer et de la chaux, qui ont été exploités depuis le XIVème siècle. Son père Olof, fils de paysan, est conducteur de locomotive sur la ligne Gävle-Falun. La famille est religieuse –waldenströmienne, c'est-à-dire appartenant à l'Église missionnaire suédoise, une scission de l'Église luthérienne officielle créée par un pasteur excommunié, PP Waldenström, fort active dans les milieux ouvriers, attirés par son accent mis sur la liberté individuelle - et musicale. Joel apprend très tôt à jouer du  violon, du banjo, de la guitare, du piano, de l'harmonica et sur l'orgue construite par son père; il commence à composer des chansons, inspirées des psaumes chantés par les adolescentes de l'Armée du Salut, dans les jupes desquelles il est tout le temps fourré.  
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La veuve Hägglund et ses six enfants  vers 1890
La situation de la famille change dramatiquement avec la mort du père en 1887, à 41 ans, lors d'une opération suite à un accident du travail lors d'une fausse manœuvre. Entraîné par une locomotive, Olof souffrit d'hémorragies internes pendant un an avant d'être opéré et de ne pas se réveiller de l'anesthésie. La mère, dont la pension de veuve des chemins de fer est bien maigre -225 couronnes par an, soit le quart d'un revenu ouvrier de l'époque -, et les six enfants en vie (sur les neuf qu'elle a eus) doivent se retrousser les manches et la machine à tisser fabriquée par Olof tourne à plein régime.  Certains soirs, il n'y a rien à manger et les enfants se couchent dans le froid glacial de l'hiver, ventre vide et mitaines aux mains, faute de chauffage.