sous-commandant insurgé Marcos,EZLN, mai 2014. Traduit par Sun with Moon
Mai 2014.
Le petit jour… Il doit être vers les deux ou trois heures, allez
savoir. Le silence résonne, ici, dans la réalité. Ai-je dit « le silence
résonne » ? Mais oui, parce que par ici le silence possède un son bien
à lui, semblable au bruit de scie des grillons, qui se répondent, en
face, plus fort et à contretemps, tandis que d’autres encore restent
constants, en contrebas. Pas une lumière en vue. Maintenant, la pluie
vient rajouter son propre silence. Ici, c’est la saison des pluies, mais
pas encore suffisamment pour meurtrir la terre. Tout juste si la pluie
l’écorche, comme frappant doucement. Un coup d’ongle par là, une
petite flaque par là-bas, comme si de rien n’était. Comme pour avertir
que ça vient. Le soleil cependant, le chaleur, rapidement la
repousse du sol. L’heure de la boue n’est pas venue. Pas encore. Le
temps des ombres, si. Enfin, de fait c’est toujours le temps des
ombres. Où que ce soit, elle va toujours partout, peu importe l’heure.
Même au plus féroce du soleil, l’ombre se balade encore, s’agrippant
aux murs, aux arbres, aux pierres, aux personnes. Comme si la lumière
lui donnait plus de force. Ah, mais la nuit… au petit matin, là, c’est
son pur moment d’ombre. De même que pendant la journée elle nous
soulage, au petit matin elle nous réveille, comme si elle nous disait :
« Et alors, toi, tu vas où, tu fais quoi ? » À quoi on répond avec la
voix pâteuse de la veille ensommeillée. Jusqu’à ce que, enfin, on
puisse répondre, se répondre : « dans la réalité ». Lire la suite
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