Deutsch 5. Aufruf Mousavis an das iranische Volk
English 5th Declaration to the Iranian nation
Alliance zapatiste de libération sociale, fondée à Paris le 12 mars 1995 Liberté, justice, démocratie, partout et pour tous! التحالف الزباتي من أجل التحرر الاجتماعي تأسس بباريس في 12 مـــارس 1995. حرية، عدالة، ديمقراطية في كل مكان وللجميــــــع yekfibasta[at]gmail.com :للاتصال
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LA ACTUAL CRISIS FINANCIERA Y ECÓNOMICA MUNDIAL
A LA LUZ DEL BIEN COMÚN DE LA TIERRA Y DE LA HUMANIDAD
Palabras de Miguel d’Escoto Brockmann, Presidente de la Asamblea General
de las Naciones Unidas, al iniciarse la Conferencia de Alto Nivel sobre la Crisis
Financiera y Económica Mundial y Su Impacto Sobre el Desarrollo.
New York 24-26 junio 2009
Webcast: Español
Nube de palabras realizada con http://www.wordle.net
United Nations Conference on the World Financial and Economic Crisis and its Impact on Development
New York 24-26 june 2009
H.E. Miguel D’Escoto Brockmann, President of The United Nations General Assembly
Webcast: English
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Conférence des Nations Unies sur la crise financiére
et économique mondiale et son incidence sur le développement
Déclaration de S. E. Miguel D’Escoto Brockmann, Président de l’Assemblée générale des Nations Unies, à l’ouverture de la Conférence de haut niveau sur la crise financière et économique mondiale et son incidence sur le développement
New York, le 24-26 juin 2009
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Просьба сверять с фактическим поступлениемЗаявление Председателя Генеральной Ассамблеи
Организации Объединенных Наций Его
Превосходительства Мигеля д’Эското Брокмана
на открытии Конференции высокого уровня по вопросу
о мировом финансово-экономическом кризисе и его
последствиях для развития
Нью-Йорк, 24 июня 2009 года
联合国大会主席米格尔·德斯科托·布罗克曼阁下在世界金融和经济危
2009 年6 月24 日,纽约
URL: http://www.tlaxcala.es/detail_artistes.asp?lg=es&reference=336
Les bureaux de vote ont été fermés plus tôt que prévu. Dans beaucoup d’entre eux, il n’y avait pas assez de bulletins de vote, ce qui a provoqué de longues queues et la fermeture anticipée. Beaucoup d’électeurs n’ont donc pu voter.
Avant même la fin du décompte des voix, le président sortant Ahmadinejad s’est déclaré vainqueur, alors que selon divers calculs, il était en troisième position.
Lors de la précédente élection, Ahmadinejad avait aussi distancé soudainement et de manière surprenante son concurrent Karroubi.
Ce qui a marché une fois peut marcher de nouveau, c’était là la tactique d’Ahmadinejad. À l’époque, Karroubi, qui menait loin devant Ahmadinejad, avait soudain remarqué après une demi-heure qu’il était passé en troisième position.
Ahmadinejad a aussi bien les Gardiens de la Révolution que les miliciens Bassidji bien en main. Et en Iran, c’est la violence pure qui décide de tout. Pas de lois, pas de règles, pas d’accords qui vaillent. Qui tient le manche, gagne. Et dans une telle situation, où le Guide suprême de la Révolution fait lire à la radio une déclaration où il dit que tous doivent accepter le résultat annoncé de l’élection, lui-même doit bien sûr l’accepter. Et là, les résultats réels ne jouent aucun rôle.
Tandis que les résultats proclamés du côté d’Ahmadinejad le donnent gagnant avec 39.165.191 voix devant son concurrent Moussavi avec 24.527.516 voix et Karroubi avec 333.635 voix http://tabnak.ir/fa/pages/?cid=51716,
Il en va autrement du côté de Moussavi, sur la base de données communiquées par le ministère de l‘Intérieur. Là, Ahmadinejad figure en troisième position derrière Moussavi et Karroubi.
"Quand ceux d’en bas ne veulent plus et ceux d’en haut ne peuvent plus, alors naît une situation révolutionnaire." Cette description par Lénine d’une situation révolutionnaire, s’applique en ce moment (lundi 15 juin, 22 heures) à la République islamique d'Iran.
Le soulèvement en cours, jusqu'à présent, heureusement non-violent, ne peut plus être arrêté. Les opposants à la dictature n'ont pas peur des équipes de cogneurs des milices basidji, les défenseurs paramilitaires du système. Au contraire, ces derniers sont mis en fuite. Ceux qui ont vu leurs voix volées et ont été humiliés se libèrent de leur léthargie.
Descendus par centaines de milliers dans les rues de Téhéran, ils se sentent comme une force concentrée, qui est assez forte pour se défendre des insultes d’un dirigeant populiste qui sentait sûr de lui grâce à un pouvoir acheté à coups de cadeaux et légitimé par un chef spirituel de l’État peu perspicace. Le putsch à froid par l’évidente falsification des résultats des élections semble avoir échoué, et c’est un coup d’État à chaud que l’Ayatollah Khamenei devrait craindre.
L'alliance entre le chef spirituel de l’État et le président Ahmadinejad, obsédé par le pouvoir et se considérant investi d’une mission, s’est profondément fissurée. Aujourd'hui, l'Iran est dans la même situation qu'il y a 30 ans, en février 1979. À cette époque, il s'agissait de mettre fin à la monarchie et de renverser le système, aujourd'hui il s’agit de réformer le système de l’État théocratique, par une révolution pacifique et de lever les obstacles à une véritable démocratisation.
Mir-Hossein Moussavi a été le premier dans l'histoire de la République islamique à oser s’opposer au vote du chef spirituel de l’État. Il a tout simplement ignoré sa décision d'accepter le résultat des élections et de soutenir le président élu. L’argument classique - "il ne faut pas faire le jeu de l’ennemi et rester unis" – n’a cette fois-ci pas marché.
Apparemment, l'ayatollah Khamenei n’avait pas compté avec le courage de Moussavi et n’avait pas imaginé que celui-ci serait prêt à prendre des risques. Par sa détermination à ne pas accepter la fraude électorale et à lutter pour imposer la volonté du peuple, Moussavi a encouragé ses électeurs à se soulever.
De même, les électeurs, en s'opposant fermement et sans craindre le pouvoir à l'interdiction de manifester, ont encouragé Moussavi à ne pas céder. Cette énergie sociale se renforçant mutuellement a débouché en deux jours sur une sorte de situation révolutionnaire.
Ahmadinejad peut désormais essayer de rallier le Chef de l'État pour la prochaine et peut-être ultime étape, à savoir le coup d'État à chaud. Mais l'ayatollah Khamenei, selon toute probabilité, ne prendrait pas ce risque. Ahmadinejad a été jusqu’à présent soucieux de garder sn pouvoir et celui de ses clients, achetés avec les milliards du pétrole volés au peuple. Mis le dos au mur, il serait prêt à jouer sa dernière carte.
Khamenei en revanche est soucieux de préserver le système et se trouve face à une alternative : ou bien suivre Ahmadinejad et mettre ainsi en jeu son propre pouvoir et la légitimité de l'ensemble du système ou bien sacrifier Ahmadinejad pour sauver le système. En effet, à la différence du président, qui est aveuglé, le chef spirituel de l’État doit prendre en compte qu’une partie des forces armées n’acceptera pas de coup d’État à chaud contre la population et que la facture sera lourde pour Ahmadinejad.
Un nouvel échec après la fraude électorale, cette fois-ci après un feu vert donné à l’utilisation de la violence d’État contre l’opposition, sonnerait le glas pour la République islamique.
C'est pourquoi, avec l'écrasante majorité des Iraniens, nous allons être témoins - espérons-le - dans les heures et les jours qui viennent, d'une réforme révolutionnaire, qui en fin de compte, abolira les traits dictatoriaux du système d'État théocratique par une révolution pacifique, et ouvrira la voie à un nouveau chapitre, bien meilleur, dans l'histoire de l'Iran. L’Ayatollah Khamenei est le seul à pouvoir faire le choix de suggérer au Conseil des Gardiens, de décider non pas dans dix jours, mais immédiatement de nouvelles élections. Ces messieurs du Conseil des Gardiens ne devraient avoir aucune difficulté à trouver des justifications théologiques et politiques pour sauver la face de Khamenei.
Quoi qu'il en soit, la République islamique d'Iran ne sera plus jamais ce qu’elle a été avant la fraude électorale. Mais la fin de l'État théocratique serait loin d’impliquer la fin de la République islamique. En effet, le mouvement réformateur, dans ses composantes majeures (Moussavi lui-même, Khatami, Karroubi et de nombreuses autres personnalités dirigeantes disposant d’une base sociale) continue de s'identifier avec une République d'Iran à visage islamique.
La République islamique a divisé dès le début la société en deux parties, ceux qui soutiennent le système et ceux qui le critiquent. Grâce à l’engagement actif de la partie critique le réformateur Mohammad Khatami a gagné, en 1997 et 2001, l'élection présidentielle à une écrasante majorité. Mais devant le manque de courage de Khatami, qui n’a pas osé prendre de risques, pour utiliser la force morale du peuple pour d’authentiques réformes politiques et sociales, l’aile critique de la société s’est retirée résignée. C’est cela qui a permis au populiste Ahmadinejad de gagner l’élection en 2005.
En juin 2009, l’aile critique a découvert vers la fin de la campagne électorale qu’elle avait de nouveau une chance et a décidé de ne pas répéter l'erreur de 2005. Tous les groupes d'opposition qui avaient appelé au boycott des élections, avec l'argument de "ne pas vouloir légitimer le système de l'État théocratique", ont reçu une leçon de la volonté populaire spontanée. Les partisans du boycott avaient négligé l’aspect duel de la société iranienne et donc la possibilité que l’État théocratique puisse être délégitimé aussi par les élections.
Les bases d'une abrogation de l’État théocratique mise en branle par des réformes révolutionnaires se trouvent dans la Constitution même de cet État, qui divise la société en deux parties, l’une favorable au système et l’autre exclue - tout comme autrefois l’État de l'apartheid sud-africain, qui a connu une fin abrupte.
Kléber remporta des victoires contre les Turcs, écrasa dans le sang une deuxième révolte au Caire le 7 mars 1800, et sembla enfin contrôler la situation, mais Sulaïmân al-Halabi en avait décidé autrement.
Sulaïmân Muhammad Amîn Ous Qopar était un musulman kurde originaire de la ville d’Alep du nord de la Syrie (d’où son surnom d’al-Halabi, l’Alépin). Né en 1777, son père l’envoya en Égypte faire des études à la célèbre université d’al-Azhar au Caire.
Sulaïmân fut donc témoin de l’invasion par les Français, de leur répression et de la première révolte du Caire. Il fut témoin de l’écrasement de la population, des martyrs cairotes tombés et des savants d’al-Azhar exécutés. Il fut aussi au courant du massacre à Jaffa, de la deuxième révolte du Caire et de toutes les batailles des armées françaises pour dominer l’Égypte et la Syrie.
Après un retour à Alep début 1800, il fut chargé par des chefs Mamelouks qui organisèrent la résistance de tuer le Général Kléber. Il revint alors au Caire après un court séjour à Gaza, bastion de la résistance, où il acheta le poignard qu’il allait utiliser contre Kléber. Arrivé au Caire début mai, Sulaïmân s’installa à al-Azhar dans l’aile réservée aux gens d’« ash-Shâm » (la région englobant la Syrie, le Liban, la Palestine et la Jordanie) avec quelques étudiants d’al-Azhar dont quatre lecteurs du Coran de Gaza. Il les informa de son intention de tuer Kléber et se mit à surveiller les mouvements du Général.
Le 14 juin, Sulaïmân al-Halabi passa à l’acte. Il parvint à pénétrer dans les jardins du quartier général de l’armée française au Caire alors que Kléber s’y promena avec son architecte Protain. Il s’approcha de Kléber qui le prit pour un mendiant. Sulaïmân lui asséna alors plusieurs coups de poignard, ainsi qu’à son architecte. Kléber mourut sur le coup alors que Protain s’en sortit. Sulaïmân s’enfuit et se cacha dans un jardin à proximité, mais les gardes le recherchèrent et le trouvèrent rapidement. Il fut torturé et passa aux aveux.
Un tribunal militaire tenu le 15 et 16 juin prononça un châtiment exemplaire. Sulaïmân fut condamné à être amputé de la main droite et puis à être empalé vif. Les quatre Azharites, collègues de Sulaïmân, furent condamnés à la mort par décapitation.
Le lendemain, soit le 17 juin 1800, trois Azharites furent décapités devant Sulaïmân, le quatrième réussit à fuir. Ensuite le bourreau brûla la main droite de Sulaïmân jusqu’au coude et procéda à son empalement. Malgré l’horreur, Sulaïmân se comporta courageusement en récitant « al-Shahâdah » (la profession de foi musulmane) et des versets du Coran. Le supplice de Sulaïmân dura pendant quatre heures, où il resta vivant jusqu’à ce qu’un soldat français compatissant lui donne à boire, ce qui entraina sa mort immédiate.[8]
L’esprit scientifique n’étant jamais absent, Larrey, le médecin militaire en chef récupéra la dépouille de Sulaïmân al-Halabi pour sa collection. Le crâne de Sulaïmân, comme indiqué plus haut, fut montré pendant des années aux étudiants de médecine à Paris « pour leur faire voir la bosse du crime et du fanatisme avant de finir au Musée de l’Homme »1 en tant que « criminel », en attendant enfin qu’il ait la place qu’il mérite en tant que héros, résistant et martyr.
Notes
1. Dans « L’Expédition d’Égypte » de Henry Laurens.
2. Propos de Talleyrand, Ministre des Relations extérieures du Directoire, cité par H. Laurens dans « L’Expédition d’Égypte».
3. Dans « L'orientalisme aux XVIIe et XVIII e siècles » de H. Laurens, in « L'Orient : Concept et Images », XVe colloque de l'Institut de Recherches sur les civilisations de l'Occident moderne, sur www.books.google.fr.
4. La déclaration de Bonaparte sur http://fr.wikisource.org.
5. Dans « La révolte du Caire et dans le delta » de SPILLMANN Georges sur www.napoleon.org.
6. Dans « La campagne d’Égypte » de HOURTOULLE François-Guy sur www.napoleon.org.
7. Dans « L'Égypte française, du départ de Bonaparte à l'assassinat de Kléber (23 août 1799 - 14 juin 1800) » de BATTESTI Michèle sur www.napoleon.org.
8. Dans « L’Expédition d’Égypte » de Henry Laurens.
Le 5 juin, la Police Nationale du Pérou a ouvert le feu depuis des hélicoptères sur un barrage routier que tenaient 5.000 Indiens dans la région Amazonas à Bagua, au nord du pays. Un premier bilan qui s’alourdit d’heure en heure fait état de la mort d'au moins 50 manifestants et 22 policiers et plus de deux cents blessés. Le couvre-feu a été décrété depuis et les arrestations de militants se multiplient. Les blessés sont arrêtés dans les hôpitaux, il y aussi des disparus.Depuis deux mois, les Indiens de la région mènent une grève pacifique illimitée pour obtenir l'annulation de onze décrets pris pour livrer l'Amazonie péruvienne aux multinationales dans le cadre des traités de libre échange, en particulier aux compagnies pétrolières, forestières et minières.
Alan García : "Je prie Saint Progrès Bénit et le Sacré Traité de Libre Échange que les USA et la presse officielle intercèdent pour mes horribles péchés"
N'aie crainte, fils chéri, l'histoire officielle t'absoudra
Alan García :"Nous n'avons assassiné aucun indigène. Ils sont cachés au fond du fleuve!"
"Si le chien du jardinier fait chier, alors Alan García ordonne de tuer le chien du jardinier ".
Manifeste des écrivains du Pérou
“La première ressource, c'est l'Amazonie. Elle a 63 millions d'hectares et des pluies abondantes. Là, on peut planter des forêts pour la production de bois, particulièrement sur les 8 millions d'hectares détruits, mais pour cela il faut établir la propriété, c'est-à-dire un terrain sûr sur 5, 10 ou 20 000 hectares, puisque sur moins de terrain il n'y a pas d'investissements formels sur le long terme et de haute technologie.
Aujourd'hui, il n'ya que des concessions dépendant de la volonté du gouvernement et du fonctionnaire qui peut les modifier. C'est pourquoi personne n'investit ni ne crée un emploi tous les deux hectares comme cela devrait être le cas; et il n'y a pas non plus de production de bois et d'exportation de meubles. Dans leur majorité, ces concessions de rapine n'ont servi qu'à extraire les bois les plus fins, à déboiser puis à abandonner le terrain.
En revanche, la propriété formelle par des grandes entreprises collectives comme les fonds de pension permettrait de faire des investissements à long terme depuis la plantation jusqu'à la récolte des années plus tard.Ceux qui s'y opposent disent qu'on ne peut attribuer de propriété dans l'Amazonie (et pourquoi alors sur la côté et dans la montagne ?). Ils disent aussi qu'attribuer la propriété de grandes parcelles profiterait à des grandes entreprises, certes, mais cela créerait des centaines de milliers d'emplois formels pour des Préuviens qui vivent dans les régions les plus pauvres. C'est le chien du jardinier*."
Alan García, Président du Pérou, El Comercio, novembre 2007
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala
* Allusion au proverbe "Ser como el perro del hortelano, que ni come ni deja comer al amo", qui a donné son titre à une pièce de Lope de Vega. Équivalents français : "Le chien n'aime pas la banane et il ne veut pas que la poule en mange"(Martinique), "il est comme le chien du jardinier, il ne mange point de choux et ne veut pas que les autres en mangent "(Le Roux, 1752). (NdT)
Signez en ligne la Pétition pour la défense des droits des peuples indigènes et de la biodiversité de l'Amazonie au Pérou, patrimoine de l'humanité
Carlos Latuff
Une vieille blague israélienne :
Colon de droite : L'été prochain, on va expulser tous les Palos qui traînent encore dans notre pays.
Israélien de gauche : D'accord, mais assurez-vous bien que vous utiliserez des bus à air conditionné.
Le discours de Netanyahou aujourd'hui nous a montré une fois de plus que la polarité politique juive est un mythe, il n'existe rien de tel .
Discours de Netanyhaou, par Emad Hajjaj
Ils croient tous en l'isolement et en la ségrégation des juifs. Tout ce qu'ils veulent, c'est un ghetto juif blindé planté dans la Palestine historique. Ils veulent être entourés par de hauts murs de séparation. Ils se fichent éperdument de savoir s'il y a un État palestinien de l'autre côté de ces murs, pourvu qu'ils n'aient pas à le voir, à le sentir ou à l'entendre. Peu leur chaut d'un État palestinien pourvu qu'il nait pas la propriété de son ciel et qu'ils puissent continuer à lui pomper toute son eau.
Fait intéressant, dans cette histoire ils oublient tout simplementq u'ils ne sont pas seuls, qu'il y a aussi les Palestiniens.
Quelque part ils oublient que c'est en fait aux Palestiniens de dire s'ils accep^ent l'existence d'un État juif sur leur terre, sur leurs villes, villages, champs et vergers, le long de leurs rivières et de leurs côtes.
Franchement, je ne crois pas que cela arrivera jamais.
Il ya déjà un bon moment que l'État juif a atteint la zone de non-retour, sa désintégration est imminente. Et même Barack Obama ne sera pas en mesure de le sauver.
1. L'homme et ses idées
Durant les deux semaines que j'ai passées approximativement dans le campement de l'armée de la Liberté, je n'ai pas cessé de converser quotidiennement avec le général Sandino. Celui-ci m'a accueilli dès le premier jour avec une amabilité très familière.
Quelquefois le chef m'appelait et d'autres fois c’était moi qui allais le voir dans sa maison, sur laquelle veillait sa garde personnelle armée de mitrailleuse. Le général avait l’habitude de se promener dans une chambre sombre proche de celle de la garde et entrait tout souriant, en m’embrassant, selon sa coutume.
C'était une simple chambre décorée avec un calendrier et un chromo représentant des chasseurs de phoques dans une mer de glace déchaînée, tirant contre ces amphibiens qui s'approchaient dangereusement de l’embarcation. Il y avait un banc et quelques chaises ; d’ordinaire certains chefs qui assistaient silencieux à l’interview, ou bien des soldats de la garde, s’asseyaient sur le banc. Dans un coin il y avait un tas de fusils.
Le général s'asseyait dans un simple fauteuil à bascule, sur lequel il ne cessait de se balancer. Son visage ovale, mais anguleux, offre une sorte d'asymétrie des deux côtés, ce qui, avec les commissures de ses lèvres, contribue à lui donner quelques étranges variations. Une sympathie affectueuse se reflète fréquemment dans ses yeux sombres, mais d'ordinaire en émanent une profonde gravité, une réflexion intense. Ses traits au repos, ses mâchoires fortes, en angle bien ouvert, confirment l'impression d’une volonté sereine et affirmative que donne sa conversation. Sa voix est douce, convaincante ; il ne doute pas de ses concepts, et les mots sont précis, bien guidés par un intellect qui a eu une réflexion propre sur les thèmes qu'il aborde. Son geste habituel est de se frotter les mains avec un mouchoir. C’est très rare qu’il modifie ou qu’il change le ton calme de sa voix. Que se soit par son aspect ou par sa conversation, l'impression que donne le général Sandino, est celle d’une grande élévation spirituelle. Il pratique, sans doute le « yoga », et est un disciple de l’Orient.
Les thèmes de notre conversation ont été variés et en général sans ordre particulier. J'ai essayé de les rassembler en différentes matières, mais en respectant évidemment les concepts et des phrases à la lettre, afin que le lecteur puisse pénétrer la psychologie de cet extraordinaire paladin de la Liberté, que beaucoup ont décrit comme un homme vulgaire et sans instruction, peut-être comme le Pancho Villa de la rébellion nicaraguayenne. Mais ceci est absolument faux. Le général Sandino est d’un esprit sensible et fin, un homme d'action et un visionnaire, comme nous l’avons déjà dit, malgré son instruction assez limitée et, au-delà de son rôle de libérateur, il est une personnalité extraordinaire.
Augusto César Sandino, Général des Hommes Libres, 1895-1934
- Je vois qu’on vous a déjà pris pour un Américain, m'a-t-il dit, en riant joyeusement, la première fois qu’il m'a vu.
- Oui, général –lui ai-je répondu ; mais très vite, ils se sont aperçus de leur erreur, et il ne s'est rien passé. C’était une plaisanterie.
Après nous être assis, et pendant que le général commençait à se balancer, je lui dis :
- Dans ce mouvement, c’est surtout son aspect spirituel qui m’intéresse plus que l’épisodique et le militaire. Je vois qu’il y a en vous une grande foi, et je ne sais pas si elle a un sens religieux. Je comprends que tous les mouvements qui ont laissé leur trace dans l'histoire ont eu une grande foi religieuse ou civile. Le libéralisme des peuples anglo-saxons, allant de pair avec leurs principes religieux, me semble plus profond et définitif que celui de la Révolution française. Avez-vous une religion ?
Sandino - Non ; les religions sont des choses du passé. Nous, nous sommes guidés par la raison. Ce dont nos indiens ont besoin, c’est d’instruction et de culture pour se connaître, se respecter et s’aimer.
Moi, ne m’avouant pas vaincu, j’insiste :
- Ne croyez-vous pas en la survie de la conscience ?
Sandino - De la conscience?
Moi. - Oui, de la personnalité.
Sandino -De l'esprit, oui, c’est clair ; l'esprit survit, la vie ne meurt jamais. On peut supposer depuis le début, l'existence d'une grande volonté.
Moi - Tout est question de mots ; pour moi, c’est la religion, l’importance de la vie.
Sandino - Comme je vous dis, la grande force première, cette volonté, c’est l'amour. Vous pouvez l’appeler Jéhovah, Dieu, Allah, Créateur…
Après avoir expliqué, selon sa foi théosophique, la valeur des esprits qui ont guidé l'humanité parmi lesquels il range Adam, Moises, Jésus, Bolivar…, tandis que sa parole exprime une conviction profonde et que ses yeux, opaques, s’égayent, il poursuit :
- Oui ; chacun accomplit son destin ; j'ai la conviction que mes soldats et moi, nous accomplissons celui qui nous a été assigné. C’est ici que cette volonté suprême nous a réunis pour parvenir à la liberté du Nicaragua.
Moi - Croyez-vous au destin, à la fatalité ?
Sandino –Ne dois-je donc pas y croire ? Chacun de nous fait ce qu'il doit faire dans ce monde.
Moi - Et comment voyez-vous, général, cette force première, qui fait bouger les choses ? Comme une force consciente ou inconsciente ?
Sandino - Comme une force consciente. Son principe est l'amour. Cet amour crée, évolue. Mais tout est éternel. Et nous, nous essayons de faire en sorte que la vie soit non pas un moment passager, mais une éternité à travers les multiples facettes de ce qui est transitoire.
Moi - J'insiste sur ce point, parce que je crois que toute grand œuvre n’a pu être réalisée que sur la base d'une grande foi, que moi j'appelle religieuse et vous nommez autrement ; mais qui n'est que la poussée d'un monde spirituel. J'ai pu percevoir cette imprégnation, cette spiritualité dans votre armée.
Sandino - Si c’est cela, nous sommes imprégnés de notre rôle ; nous sommes tous des frères.
Moi. –Je me rappelle avoir fait référence au sens historique de Napoléon et de Bolivar.
Sandino - Ah, Napoléon ! Il était une immense force, mais il n'y avait que de l'égoïsme en lui. J'ai plusieurs fois commencé à lire sa vie et j'ai jeté le livre. Par contre, la vie de Bolivar m'a toujours ému et m'a fait pleurer.
Puis, comme le général faisait référence aux forces spirituelles qui agissent sur la conduite des hommes, je lui demande :
- Croyez-vous, général, que des forces de cette nature puissent agir chez les hommes sans l'action de la parole ?
Sandino – Tout à fait ; moi-même je l’ai expérimenté et pas qu’une fois, mais bien souvent. En diverses occasions j'ai ressenti une espèce de trépidation mentale, des palpitations, quelque chose d’étrange qui m’habitait. Une fois j’ai rêvé que les troupes ennemies s'approchaient et qu’avec elles arrivait un certain Pompilio, qui auparavant avait été avec moi. Je me suis levé immédiatement et j’ai donné l'alarme, en mettant tout le monde en position de défense. Deux heures après, et avant le lever du jour, les Américains étaient là, ils engageaient le combat.
- Quelque part dans notre organisme il y a un organe du pressentiment.
- Je dirais que c’est là, ajoute le général, prenant ma tête, et me montrant la nuque. Vous ne croyez pas ?
Moi - Je ne rejette aucun type de possibilités de cette nature. Et je pense évidemment que vous pouvez avoir un système nerveux spécial : une grande puissance spirituelle. Je le vois dans votre armée.
Je me rappelle avoir lu dans une lettre écrite par votre frère Sócrates que don Gregorio [le père de Sandino, NdT] m'avait montré, que « Augusto avait une très grande capacité télépathique». Et dans une autre lettre, « qu’il avait vu en rêve son père et sa mère qui étaient très inquiets ».
Et j'ajoute :
- J'ai vu vos soldats animés d’un sens spirituel admirable. En parlant avec pas mal d’entre eux, je les ai entendus dire que la justice était de leur côté et c’était pour cette raison qu’ils remportaient des victoires tout en étant inférieurs en nombre. Comment êtes-vous parvenu à leur inculquer ces principes?
Sandino - En leur parlant souvent des idéaux de justice et de notre destin, en leur inculquant l'idée que nous sommes tous des frères. C’est surtout, au moment où le corps a faibli que j'ai essayé d'élever leur esprit. Parfois, même les plus courageux se découragent. Il est nécessaire de les connaître, les choisir. Et écarter la crainte, en leur faisant voir que la mort n’est qu’une douleur légère, un passage.
Moi. --Par imprégnation ?
Sandino - Oui ; nous sommes imprégnés de notre mission, et, c'est pourquoi mes idées et même ma voix peuvent les atteindre plus directement. Le magnétisme d'une pensée se transmet. Les ondes circulent et sont récupérées par ceux qui sont disposés à les entendre. Dans les combats, avec le système nerveux tendu, une voix magnétique a une énorme résonance… Les esprits aussi combattent, qu’ils soient incarnés ou non.
Moi - Croyez-vous en l’importance de ce mouvement ?
Le général n'a certainement pas compris le sens réaliste de ma question. Déjà lancé dans l’exposé de ses impressions pour ainsi dire suprasensibles, il poursuit en dénouant sa pensée en concepts plus lointains et plus difficiles.
Mais il ne nous serait pas possible de suivre toute sa pensée, et nous indiquerons uniquement le schéma de ses idées, qui s’orientent déjà sur des termes irréels :
- Je vous dirais ; les esprits combattent aussi, qu’ils soient incarnés ou non… Depuis l'origine du monde, la terre est en évolution continue. Mais ici, en Amérique Centrale, c’est le lieu où je vois une formidable transformation… Je vois quelque chose que je n’ai jamais dit…Il me semble que rien n’a été écrit à ce sujet…Dans toute cette Amérique Centrale, dans la partie inférieure, comme si l'eau pénétrait d'un océan dans un autre…Je vois le Nicaragua entouré d’eau. Une immense dépression qui vient du Pacifique… Uniquement les volcans qui dépassent…c’est comme si une mer se vidait dans une autre.
C'est une description fantastique, que je n'ai pas pu appréhender complètement, mais qui se traduit par une sorte de vision d'une grande catastrophe maritime dans cette zone d'Amérique Centrale. Et Sandino porte les mains à ses yeux, comme s’il voulait en extraire quelque vision. De nouveau le ton opaque de son regard s’égaye davantage.
C’est Sandino, le héros, le génial Sandino, le visionnaire.
- La foi, d’après moi, est éternellement enfantine et créative ; enfantine, parce qu'elle unit le monde réel, ce qu’il y a d’admirable, en écartant le doute, qui est scepticisme et vieillesse, elle nous transporte dans le monde du rêve de ces premières années, au cours desquelles peut-être, comme dit le poète Wordsworth, les hommes conservent encore le reflet d'une non-mentalité ou d'une incarnation, comme diraient les théosophes, qui n'a pas encore été effacée de l'esprit, avec les années et la basse réalité des sensations.
Et elle est créative, parce que l'homme ne se sent pas comme un compagnon d’infortune d'une vie transitoire, qui se dissipe comme la fumée, mais comme le propriétaire, mieux encore, comme l'acteur d'un drame éternel et toujours renouvelé.
Au moment où je sors, Sandino parle avec un vieux soldat, chargé de porter du sel aux colonnes qui s'approchent, et tandis que celui-ci s’éloigne avec son mulet chargé, le général le salue par un « Que Dieu vous garde ».
2. Thèmes sociaux
Nous avions vu le général Sandino lorsqu’il chevauchait aux côtés de quelques officiers, en faisant une inspection de ses troupes et il me dit :
- Vous voyez bien, nous ne sommes pas des militaires. Nous sommes du peuple, nous sommes des citoyens armés.
En rappelant ces impressions sur l'aspect social du mouvement sandiniste, un après-midi, tandis que nous conversions, je questionnais le général qui, lui, se balançait dans son fauteuil à bascule.
- On a dit parfois que votre rébellion avait un caractère social fortement marqué. On vous a même traité de communistes. J’entends que ce dernier qualificatif a obéi à une propagande tendancieuse et de discrédit. Mais vous n’avez pas de programme social ?
Sandino – En plusieurs occasions on a tenté de déformer ce mouvement de défense nationale, en le faisant passer pour une lutte à caractère plutôt social. Je m’y suis opposé de toutes mes forces. Ce mouvement est national et anti-impérialiste. Nous gardons le drapeau de la liberté pour le Nicaragua et pour toute l’Amérique hispanique. Pour le reste, sur le terrain social, ce mouvement est populaire et nous préconisons une avancée dans les aspirations sociales. Sur ce point, les représentants de la Fédération Internationale du Travail, de la Ligue Anti-impérialiste, des Quakers ont tenté de nous approcher pour nous influencer… Nous avons toujours opposé notre critère décisif que notre lutte était essentiellement une lutte nationale. [Farabundo] Martí, le propagandiste du communisme, a vu qu'il ne pouvait pas vaincre avec son programme et il s’est retiré.
Le général, pensif, se tait.
Dans certains pays, comme le Mexique, on a souvent cru que le mouvement sandiniste était fondamentalement agrarien. J'ai eu l’occasion de vérifier, pendant mon séjour au Nicaragua, que la propriété y est très morcelée et que c’est un pays de petites propriétés. Il n’y a presque pas de latifundios ( grandes propriétés), et encore ils ne sont pas très grands. L’agrarisme n'a donc pas un grand champ d'action. Le peu de gens qui n'ont pas de terre ne meurent pas de faim, comme on me l’avait dit. Et, effectivement, j'ai eu l’occasion de vérifier ces impressions de terre promise de façon peu flatteuse. Il y a près de Granada une merveilleuse plantation de manguiers qui descend jusqu'au Lac. Tandis qu'une espèce de Cerbère qui a le contrat pour ramasser les fruits les récupère comme il le peut, deux ou trois déshérités attendent la chute accidentelle de quelque fruit en guise de repas quotidien. Ils ne tenaient pas à aller travailler dans les plantations de café où on ne payait que quinze centimes, et préféraient cette modeste paresse. Le pays est détruit ; selon eux, il n'y a de travail nulle part.
J'insiste encore sur la question des terres avec le général, et je lui demande s'il est partisan de renforcer le sens de petite propriété qui existe dans le pays, en donnant des terrains à ceux qui n’en ont pas.
Sandino - Oui, évidemment, c’est une chose qui ne nous pose pas de problèmes. Nous avons des terres incultes, peut-être les meilleures du pays. Nous les occupions nous-mêmes.
Et le général explique son projet de coloniser la zone du fleuve Coco, qui est d'une grande fertilité
- Le Nicaragua importe une quantité de produits qu’il ne devrait pas : céréales, matières grasses, même la viande, par la côte Atlantique. Tout ça peut être produit ici. Bientôt nous rendrons le fleuve navigable ; ensuite nous commencerons à défricher des terrains cultivables. Mais il y a une exubérance végétale incroyable. Seul le cacao sauvage peut être immédiatement exploité.
Moi - Croyez-vous au développement du capital ?
Sandino – Il n’y a pas de doute que le capital peut faire son travail et se développer ; mais que le travailleur ne soit pas humilié et exploité
Moi - Croyez-vous que l'immigration serait opportune ?
Sandino. - Ici il y a beaucoup de terres à répartir. Ils (les étrangers NdT) peuvent beaucoup nous apprendre. Mais à condition qu'ils respectent nos droits et traitent nos gens comme leurs égaux.
Le général ajoute ensuite, en plaisantant, que s'il y avait des étrangers qui venaient ici avec d'autres idées, guidés par un esprit d'exploitation inacceptable ou de domination politique, ils leur mettraient des bâtons dans les roues. Mais sinon, tous les étrangers seraient reçus comme des frères, à bras ouverts.
Nous nous sommes rappelés à ce moment le désitéressement admirable que le général Sandino a tout le temps démontré, et la clause spéciale de l’accord qui vient d'être signé que ses délégués expriment en son nom « son total désintérêt personnel et sa résolution irrévocable à ne rien accepter qui pourrait amoindrir les raisons et les motifs de sa conduite publique ». Alors je lui demande :
- N'avez-vous pas l'ambition de posséder un terrain à vous ?
Sandino. - Ah, en disant cela vous pensez que je vais me convertir en latifundista [grand propriétaire] ! Non, pas du tout ; je n'aurai jamais de propriété. Je n'ai rien. Cette maison dans laquelle je vis est celle de mon épouse. Certains disent que c’est de l’idiotie de ma part, mais je ne peux pas faire autrement.
Me rappelant que le général Sandino est sur le point d’avoir un héritier, je lui demande :
- Et vos enfants, si vous en avez ?
Sandino - Non, cela n'est pas un inconvénient ! Qu’il y ait du travail et de l’activité pour tous. Je suis plutôt partisan de ce que la terre soit à l'État. Dans ce cas particulier de notre colonisation dans le Coco, je penche pour un régime de coopératives. Mais cela nous devrons l’étudier plus à fond
À propos de ces choses - ajoute le général, en souriant : j'ai eu aujourd'hui un cas de ces nombreuses personnes qui viennent me raconter leurs soucis, qui dépeint l'esprit anxieux des gens qui manipulent l'argent. C'est un pauvre père de famille nombreuse à qui l’on avait prêté trois cent pesos il y a pas mal de temps. Aujourd’hui le prêteur exige le remboursement, et comme il ne les a pas, il veut lui prendre sa maison, le bétail, tout, même ses enfants comme esclaves. Alors j’ai dit au prêteur : « Croyez-vous que votre argent vaut autant que les larmes de cette famille pauvre ? ». Ensuite J'ai dit à l'autre qu’il aille chercher un de ces avocats qui font justice et qu’il revienne un autre jour. J'espère les convaincre. Vous voyez, ajoute le général, comment les choses se passent par ici, et un franc sourire se dessine sur son visage, démontrant son excellente humeur
Je souris également devant le rappel de cette justice bienveillante, qui démontre son esprit persuasif et non son épée de guérilléro.
Moi - Général, vous aimez beaucoup la Nature !?
Sandino - Oui.
Moi - Plus que la ville ?
Sandino - Oui ; la Nature inspire et donne des forces. Nous apprenons tout d’elle. La ville nous use et nous diminue. Mais les champs sont là non pas pour s’y enfermer égoïstement, mais pour se tourner vers la ville et l'améliorer.
L’observation des plantes, des arbres ; les oiseaux, avec leurs coutumes, leur vie… sont un apprentissage continu.
La diction claire et précise du général, le sens didactique qu’il donne à ses explications, même la tranche de sa main, qui se déplace sans cesse et qui découvre des doigts courts et fermes, nous démontrent que le général, n’est pas homme de fantaisie, mais d'une pensée inquiète et profonde dans laquelle bouillonne l'éternel désir de savoir. Donc je lui demande :
- Est-ce vrai que vous souhaitez faire des études ?
Sandino - Oui ; je suis intéressé par l'étude de la Nature et des relations plus profondes des choses. C'est pourquoi j'aime la philosophie. Naturellement que je ne me vais pas maintenant aller à l’école. Mais vouloir, apprendre, ça oui toujours !
Nous abordons ensuite le domaine militaire, l'aspect d’extermination qu’a eu la campagne, et je lui demande :
- Les Américains ont-ils été cruels ?
Sandino - Ah, cela je ne vais pas vous le dire ! Demandez-le, par là, dehors, et vous verrez.
Moi – Général, on dit que parmi vos ennemis il y a eu des morts inutiles, des crimes qui sont attribués à une partie de vos troupes.
Sandino. – Eh bien, si on doit imputer quelque mal que soit, c’est moi qui suis le seul responsable. On dit qu'il y a eu des assassinats ? Eh bien, c’est moi l'assassin. Qu’il y a eu des injustices ? Eh bien, c’est moi l’injuste. Il a fallu punir non seulement l'envahisseur, mais aussi celui qui a des concomitances avec lui.
Le général se dresse et parle avec énergie, et ses yeux brillent d’indignation.
Moi - À moi, lorsqu’on m'a parlé de ces choses, j'ai répondu que la liberté ne se conquiert pas en faisant des sourires aux envahisseurs. Que c’est le prix de la liberté. Mais, naturellement, je pense que pour quelqu’un d’extérieur, c’est très difficile de dire cela.
Sandino - Oh, oui ; le prix de la liberté !
Le général Sandino est passé, par association d'idées, à la rigueur imposée à ses propres troupes afin de maintenir la discipline. Comme certaines choses ont été dites sur ce point, je lui demande :
- Combien de d’ordres de fusiller dans vos troupes avez-vous donné?
Sandino - Cinq. Deux généraux, un capitaine, un sergent et un soldat. Un des généraux pour avoir commis des abus. Il était accusé d’avoir violé plusieurs femmes. J'ai vérifié les faits et je l’ai fait fusiller. Et l'autre, pour trahison.
Et le général raconte comment dès l’arrivée du général Sequeira il avait senti en lui un homme d’une loyauté suspecte. Un jour les avions l'ayant surpris ont déclenché un violent bombardement. Le général Sandino était resté sans bouger dans un coin quand, au milieu de l’explosion des bombes, il sent quelqu'un s'approcher en douce. C’était Sequeira, pistolet à la main. « Il veut me tuer ! », a pensé Sandino ; et il a immédiatement sorti son arme, et se jetant sur lui il l'a obligé à rengainer son automatique. Sequeira est resté sans commandement, mais il prenait encore part aux opérations. Une nouvelle fois le général l'avait surpris dans un cas semblable au précédent. Au moment où il a su qu’on allait le capturer, il s'est enfui en direction du camp américain. Sandino a détaché des forces pour le ramener tout de suite, mort ou vif. Ils l'ont alors ramené, mort.
Moi – Est-ce vrai que toutes vos armes, fusils ou mitrailleuses, ont été prises à l'ennemi ? Dans quel pourcentage, d’après vous?
Sandino. - Oui, vous pouvez le dire, toutes le sont, à part quelques fusils venant du Honduras, et des vieux « Con Con », qui ne servent plus. Ceux qui n'avaient pas de fusil attendaient qu’il soit pris à l'ennemi ou entraient en action avec des grenades et des revolvers, ou faisaient simplement partie des gens en réserve.
Moi – Général, pendant le combat, avez-vous eu l'intuition de la victoire morale définitive ?
Sandino. - Non ; j'ai cru, en me mettant dans cette entreprise, que je n’en sortirais que mort. J'ai considéré que cela était nécessaire pour la liberté du Nicaragua et pour brandir le drapeau de la dignité dans nos pays indo-hispaniques.
Je me rappelle avoir entendu s’exprimer des sentiments semblables au sein de votre troupe, j’ai entendu : « Plutôt mourir qu’être humilié » et « nous ne nous serions pas retirés sans que les ‘mecs’ s’en aillent ».
Moi –Votre épouse a-t-elle été un obstacle ou un stimulant pour la lutte ?
Sandino. – Elle a été un stimulant. En arrivant ici, je l'ai connue après avoir commencé la lutte. J’avais lié amitié avec elle. Ses idées et les miennes étaient les mêmes ; nous étions identiques. J'ai été séparé pendant cinq ans. Ensuite, elle a pu venir dans la montagne. Mon épouse n'a jamais renoncé dans son esprit.
Mais, vous ne la connaissez pas ? ajoute le général, et il appelle : Blanca ! Blanca ! Je vais te présenter un Monsieur avec un nom très long, qu’il n'y a pas moyen de prononcer.
L’épouse du chef apparaît. C’est une femme très jeune, aux traits corrects, l'air doux et le teint très blanc. Je la salue, et après quelques mots très brefs elle repart.
Sandino – Mon épouse est d'ici, à 95% espagnole. Ici Les Espagnols se sont peu mélangés avec les Indiens.
Moi – En général l'Espagnol s’est uni avec les Indiens en dehors des lieux où celui-ci a été très guerrier. Au Mexique, par exemple, dans le Sonora et le Sinaloa il y a eu peu de mélange. Dans le reste il s’est fait presque totalement.
Sandino – Eh bien ici, très peu. L'Indien s'est enfui vers la montagne. Mais il a quelque chose. Si bien, qu’il existe un proverbe qui dit : « Dieu parlera pour l'Indien de Las Ségovias ». Et comment qu’il a parlé ! Ce sont ceux qui ont fait en grande partie tout ça. C’est un indien timide, mais cordial, sentimental, intelligent. Vous le verrez vous-même de vos propres yeux.
Le général ordonne alors d’appeler un soldat et l'invite à parler avec son chef, qui montel a garde et qui est de la même race d’indiens zambos [métis d’Indien et de Noir, NdT) de la côte Atlantique.
Les deux parlent, et l’on note dans leur dialecte un mélange de mots de plusieurs langues, anglais, français et espagnol.
- Maintenant parlez-leur en anglais ! me dit-il.
Je leur parle un instant et je vois qu’ils le parlent parfaitement tous deux.
- Et maintenant, en espagnol, ajoute-t-il.
Effectivement, ils le parlent parfaitement.
Sandino - Alors vous voyez, ils sont intelligents. Mais ils ont été complètement abandonnés. Ils sont environ cent mille sans communications, sans école, sans rien du gouvernement. C’est là où je veux arriver avec la colonisation pour les faire se lever et devenir de véritables hommes.
Moi - Croyez-vous en la transformation des sociétés par la pression de l'État ou par la réforme de l'individu ?
Sandino. - Par la réforme intérieure. La pression de l'État change ce qui est extérieur, l’apparent. Nous, nous pensons que chacun donne ce qu'il a. Que chaque homme soit un frère et pas un loup. Le reste est une pression mécanique extérieure et superficielle. Naturellement que l'État doit avoir son pouvoir d’intervention.
Moi - Que signifient les couleurs de votre drapeau ?
Sandino. - Le rouge, la liberté ; le noir, le deuil, et la tête de mort, que jusqu'à la mort nous ne renoncerons pas.
3. Amérique Hispanique, Amérique Centrale et Espagne
C’était un de ces après-midi pluvieux habituels; Sandino promenait dans la chambre sombre, à côté de la garde, et en me voyant il s'exclame :
Sandino - Oui ; venez, nous sommes très heureux qu’il y ait un Espagnol dans le camp, pour qu'il voie ce que nous sommes et ce que nous avons été ! Oui ; nous avons reçu un grand soutien moral d'Espagne.
Moi - Il aurait été préférable que se soit une aide positive, des volontaires…
Sandino - Non ; ils nous ont donné quelque chose de meilleur : les ondes qui arrivent avec le soutien moral. Mieux vaut cela que s'ils nous avaient envoyé une canonnière avec des soldats et de l’armement.
Et il raconte, qu’il y a quelque temps, un Espagnol était arrivé au camp, c’était un routard qui parcourait le monde. Il était resté plusieurs jours et avait raconté des anecdotes intéressantes sur son voyage et sur l'Espagne.
J'ai su plus tard que ce routard avait été écrasé par les roues d’un train en marche. Il devait sans doute voyager gratuitement. En vérité je ne me rappelle pas son nom, on me l'a pourtant dit.
À cet instant on lui apporte une lettre, et je lui demande qu’il la lise, et d’interrompre notre conversation, le général ajoute alors:
- Non ; vous, nous vous considérons comme un membre de notre grande famille indo-hispanique, et n'avons aucune réserve. Regardez cette lettre : elle est d'un ami curé, qui est resté longtemps ici. Il avait des idées libres ; il a sa famille, ses enfants, sa propriété, et il est de ceux qui pourraient dire : « Fais comme je te dis ; mais ne fais pas ce que je fais ».
Et Sandino sourit avec son bienveillant sourire franc. Il lit ensuite la lettre, dans laquelle le curé félicite le général pour la paix, qu’il dit ne pas devoir s’arrêter à moitié.
Je demande au général :
- Ce mouvement peut-il avoir quelque connexion avec les idéaux d'une Amérique Hispanique unie ?
Sandino - Oui ; le grand rêve de Bolivar est toujours en perspective. Les grands idéaux, toutes les idées, ont leurs étapes de conception et de perfectionnement jusqu'à leur réalisation.
Moi - Croyez-vous que ce rêve pourra se réaliser en une seule génération ? La préparation manque encore pour cela. Les communications, l’intime conviction, une sensibilité harmonisée pour sentir les problèmes communs.
Sandino - Je ne sais pas quand cela pourra se réaliser. Mais nous avancerons en posant les pierres. J'ai la conviction que ce siècle verra des choses extraordinaires.
Je me souviens alors de la situation d'Amérique Centrale. Et que ce n’est même pas la diplomatie yankee mais les compagnies américaines, surtout les compagnies fruitières qui jouent avec ces petites républiques comme avec marionnettes.
Elles font et défont les élections et mettent sans grand effort en place leurs hommes de confiance. Aujourd’hui, dans la récente révolution du Honduras, elles ont donné beaucoup de choses avec prodigalité ; naturellement, pour les récupérer ensuite par d’autres manières. Tandis que ces pays mettent comme ils peuvent des restrictions à l'immigration des blancs, ces compagnies vident les côtes Atlantique de l'île de la Jamaïque, pour baisser le coût de la main d'œuvre en faisant affluer énormément de noirs. Ainsi, les petites républiques voient leur souveraineté mise sous influence…
Moi - Général, ne pensez-vous pas que l'Union de l'Amérique Centrale est nécessaire ?
Sandino - Oui, absolument nécessaire.
Moi - Quand croyez-vous que le projet sera réalisable ?
Sandino - Cela viendra, ça viendra…
Et le général reste pensif ; moi, ne voulant pas être indiscret, je n'insiste pas sur un point aussi sensible.
Je me souviens que le Président Sacasa [général, président libéral du Nicaragua de 1933 à 1936, NdT] me disait qu'il considérait l'Union comme nécessaire; mais avec le temps, lorsque les idées communes et les communications seraient suffisamment développées et seulement sur la base d'un accord mutuel ; mais je pense qu'il y a des élites dirigeantes d'Amérique centrale qui pensent que la séparation représente un état morbide, une faiblesse commune, encouragée par l'impérialisme, et ils voudraient aller vers l'Union par la force. Évidemment, il y a une espèce de patriotisme d'Amérique centrale très marqué.
Sandino - De toute façon, nous ne professons pas un nationalisme excessif. Nous ne voulons pas nous enfermer seuls ici. Que les étrangers viennent, les Américains aussi, évidemment !
Nous ne pensons pas non plus que dans le nationalisme politique il y a toute la solution. Au-dessus de la nation, la fédération ; continentale, d'abord ; puis plus élargie jusqu'à arriver à la mondiale.
Moi – Comment voyez-vous l'Espagne ?
Sandino – Comme une nation prédestinée. L'Espagne sera celle chargée d'effectuer la communisation universelle dans le futur.
Moi - Communisation ?
Sandino - Oui, fraternisation. L'Espagne a un passé glorieux. C’est là que, selon la légende, Marie et Saint-Jacques, le frère de Jésus sont enterrés. En plus, elle donne au monde des exemples admirables. L'avènement de la République a été quelque chose de remarquable. L'attitude du roi comme celle du peuple….
Moi -Et croyez-vous que 'Espagne aura une influence morale dans la future Amérique ?
Sandino - Indubitablement ! Son œuvre n'est pas terminée. Elle perdurera.
Comme une certaine allusion au problème régionaliste de l'Espagne est apparue, Sandino a indiqué que ce point de la diversité des tempéraments l’intéressait et il sexclame :
- Dites-moi, Quelle différence y a-t-il entre un Andalou et un Basque ?
Moi. – Eh bien, moi je crois que l'Andalou a une disposition prédominante à l'imagination, à la compréhension facile d'autres idées, à l’ingéniosité, à la clarté des concepts, à la tendance aux termes opposés, à l’optimisme brillant, parfois découragé, parfois sceptique. Beaucoup de races sont passées par là-bas. En revanche, le Basque est primitif, avec des idées simples, un « mono-idéiste » ; mais celles-ci sont enracinées au plus profond que son être, et il ne se contente pas de vivre, mais tend à passer à l'action. Il y a là une grande spiritualité cachée. Il est optimiste par nature.
Sandino - Ces différences me paraissent intéressantes. Y en a-t-il quelques autres ?
Moi - Oui ; par exemple, le Catalan et le Galicien représentent aussi de profondes différences régionales et ethniques, dans l'unité historique et spirituelle. Quant à l'harmonie commune de l'ensemble, tout dépend des grands idéaux communs.
Ensuite, Sandino fait référence à la basquitude.
- J'ai travaillé avec des Basques , dit-il, et je les connais bien. Le Basque est lié au sanscrit. Il y a dans l'esprit des Basques quelque chose de d'international. Ils sont unis au monde. C'est pourquoi, ils se sentent partout chez eux.
Ensuite, abordant la politique espagnole, il demande :
- Les choses prennent-elles une bonne direction ?
Moi.- J'ai la conviction que oui. Il y a la tête de l'Espagne un caractère magnifique : c’est Azaña. Son travail est de renforcer l'âme traditionnelle, le squelette de l'Espagne, et de l’intégrer dans l'évolution moderne. C'est le véritable leader. Il ne va pas mendier derrière les masses; il les oriente et les guide. Il sait faire face à un avis injuste ou idiot, même s’il est majoritaire. J'espère qu’il amène derrière lui, dans un parti propre, une bonne partie de la meilleure énergie espagnole : les intellectuels, les professionnels, les petits propriétaires indépendants et les capitalistes conscients et évolutionnistes. Azaña est un homme d'action, c’est un homme providentiel.
Sandino - Et la République ?
Moi - À mon avis, la République doit résoudre la grande antinomie des temps modernes, le maximum d’étatisme avec le maximum de liberté, les avancées de l'idéal du travail avec la défense et la stimulation du bien-être commun. L’avenir est encore pour la classe moyenne. Celle-ci et le capitalisme conscient peuvent encore hisser un grand drapeau, pas un drapeau honteux, mais altier et indépendant. Si un jour le capitalisme doit livrer son héritage ou se transformer définitivement, il doit le faire avec dignité, comme ayant accompli une mission historique, et non pas comme le voleur surpris la main dans le sac. Entre-temps, il doit orienter, il doit prendre part au gouvernement, comme toute force vitale. En outre, de nos jours la liberté est de nouveau en danger, et je ne me réfère pas à des éclipses partielles, qui peuvent être nécessaires. Le libéralisme n’est pas mort, et ne mourra jamais, tant qu'il y aura un homme au cœur libre. Je crois que le programme d'une République espagnole doit tourner autour de tout ceci.
Sandino – M’avez-vous demandé un autographe ?
Moi. - Oui, mon général.
Sandino - Je vous le donnerai, en envoyant un salut à l'Espagne.
AU PEUPLE ESPAGNOL, UN SALUT PAR LE TRUCHEMENT DE L’ILLUSTRE ÉCRIVAIN MONSIEUR BELAUSTEGUIGOITIA, QUI A RECUEILLI LES IMPRESSIONS DE NOS DERNIERS EFFORTS LIBERTAIRES.
San Rafael del Norte, le 13 février 1933.