S’inspirant
des travaux d’Angela Davis, lauréate du prix International Blue Planet
Award décerné par ethecon, citoyenne US-américaine et défenseure des
droits de l’homme, la Fondation ethecon (Éthique et économie) s’oppose à
l’exploitation croissante des détenus. Ce sont surtout les grandes
firmes qui profitent aussi bien du travail des détenus que de la
privatisation des prisons. Pour le moment, ce phénomène reste
essentiellement US-américain. Mais cette soumission des prisons aux lois
de l’exploitation et du profit est de plus en plus fréquemment imitée
de par le monde. En Allemagne aussi on débat d’ores et déjà d’une
« réforme » de l’institution carcérale qui irait dans ce sens.
Aux USA de grandes firmes (Microsoft, IBM, Boeing) ont découvert
depuis longtemps déjà un moyen bien particulier de maximiser leurs
profits. Elles font fabriquer leurs produits à prix de revient minimum
dans les établissements pénitentiaires. Les détenus ne perçoivent en
général qu’un tout petit salaire, et parfois aucun. En plus, aucun frais
annexe (protection sociale, installations de sécurité au travail). Mais
en revanche les firmes bénéficient d’avantages fiscaux parce qu’elles
donnent du travail aux détenus. Ces activités n’ont en général rien à
voir avec une intégration des détenus au marché du travail à leur
sortie ; bien au contraire, cette exploitation à l’abri de murs de la
prison pousse à la baisse les salaires de tous les travailleurs et
détruit massivement des emplois « normaux ».
« Cette exploitation sans scrupules de détenus n’est rien d’autre
qu’un esclavagisme moderne », a déclaré Axel Köhler-Schnura, le
Président d’ethecon. « Les condamnés sont dépouillés de leurs droits
fondamentaux et de leur dignité. En prison, le contrôle et la répression
s’exercent de manière absolue.» Par exemple, les détenus n’ont pas le
droit de se syndiquer en vue d’obtenir des salaires corrects ou de
meilleures conditions de travail. De même ils n’ont pas le droit de
grève. S’ils refusent de travailler, ils sont soumis aux sanctions
prévues par l’établissement où ils se trouvent.
Parallèlement les prisons et les prisonniers se transforment
eux-mêmes en source de bénéfices et de profits, grâce à la privatisation
des établissements pénitentiaires. Des « fournisseurs de prisons »,
comme la Corrections Corporation of America (CCA) aux USA,
perçoivent de l’État une somme d’argent pour chaque détenu. Non contente
de maximiser ses profits en surpeuplant les prisons, la CCA s’y emploie
en ne fournissant pas de soins de santé aux prisonniers, ce qui a déjà
induit des décès. Des cas documentés de défaut de surveillance par les
gardiens - qui ne sont pas intervenus lors de disputes entre détenus -
ont également fait scandale. Tout cela montre clairement que la
privatisation érode le contrôle exercé par les instances publiques.
Les détenus sont le groupe de population le plus fortement
marginalisé. Loin des yeux du public, leurs conditions de vie et de
travail restent très majoritairement ignorées, tant qu’un scandale ne
prend pas des proportions telles qu’il devient impossible de le tenir
caché. Or la valeur d’une société se mesure à sa capacité de garantir
les droits humains même des groupes marginalisés.
Selon Bettina Schneider, directrice d’ethecon, « le plus
scandaleux, c’est le lobbying auquel se livre la CCA. » Pour obtenir des
lois plus répressives et des peines d’incarcération plus longues, la
firme a dépensé, rien qu’entre 2006 et 2008, plus de 2,7 millions de
dollars US. En l’occurrence elle ne se soucie nullement de réinsérer les
condamnés ni de protéger la société, mais uniquement de garantir et
d’accroître ses profits. L’an dernier, le chiffre d’affaires de la CCA
s’est élevé à 1,7 milliards de dollars US. Et la tendance est à la
hausse. Parallèlement les USA remportent de loin la palme du taux de
détenus par habitant.
ethecon vous informe sur cette campagne par un tract et fait circuler des pétitions et des protestations en ligne. Ces dernières sont téléchargeables sur le site www.ethecon.org .
La fondation ethecon est surtout connue par son « Internationales
ethecon Blue » et son « Black Planet Award » qu’elle décerne chaque
année à Berlin. Ces dernières années, les récompenses d’ethecon sont
allées à Diane Wilson (USA, 2006), Vandana Shiva (Inde, 2007), José Abreu et Hugo Chávez (Venezuela, 2008), Uri Avnery (Israël, 2009), Elias Bierdel (Autriche, 2010) et Angela Davis (USA, 2011). Les « black awards » d’ethecon ont stigmatisé les managers et actionnaires des firmes MONSANTO (USA, 2006), NESTLÉ (Suisse, 2007), Blackwater (Xe) (USA, 2008), Formosa Plastics Group (Taiwan, 2009), BP (Grande-Bretagne, 2010) et Tepco (Japon 2011).
Cette année, le Blue Planet distingue l’antimondialiste et auteur
suisse Jean Ziegler. Le Black Award va à Ivan Glasenberg, PDG, et à
d’autres responsables du groupe de matières premières Glencore. Les deux
prix ethecon seront remis au cours d’une cérémonie publique dans le
cadre de la réunion annuelle d’ethecon, le samedi 17 novembre sur le
Pefferberg à Berlin. Cette festivité débute à 14 heures dans la Grande
salle (« blue room »), 176, Schönberger Allee. L’entrée est gratuite,
mais en raison de l’affluence il est recommandé de s’inscrire.
Le Professeur Ziegler viendra recevoir son prix personnellement.
Celui des managers et actionnaires principaux de Glencore leur sera
remis plus tard dans le cadre de journées d’action publiques en
collaboration avec des mouvements sociaux internationaux.
À l’inverse de nombreuses fondations créées par des Églises, des
familles, des partis ou des États, ethecon est l’une des rares
fondations « issues de la base »; ses 31 membres fondateurs et
fondatrices actuels se sentent responsables à l’égard des générations
futures; elle a pour devise « Un monde sans exploitation ni
oppression ». Cette fondation récente est financée par les membres
fondateurs, des dons, et les membres de soutien.
Seule l’élaboration et la mise en place de modèles économiques et
sociaux respectueux de l’environnement et de la dignité humaine peuvent
éviter les catastrophes écologiques et sociales qui nous menacent. ethecon - Stiftung Ethik & Ökonomie travaille dans une perspective à long terme bien au-delà de la relève des générations.
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