jeudi 4 juin 2015

Le journaliste Vitali Didenko, emprisonné à Odessa, a besoin de soutien !

par Альтернативы Alternative, 1/6/2015. Traduit par Marianne Dunlop 
La vague d’épurations qui a déferlé sur Odessa en avril-mai de cette année a emporté avec elle un grand nombre de citoyens qui exprimaient à voix haute leurs opinions. La liste complète des personnes arrêtées n’est pas accessible au commun des mortels, la police ne communique pas sur ce sujet. C’est pourquoi plusieurs semaines après les faits continuent de remonter à la surface des détails choquants des sévices infligés par la junte de Kiev aux dissidents. Une de ces victimes, dont le nom n’apparaissait pas au départ, est un journaliste du site d’opposition « Infocenter », Vitali Didenko.
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En automne 2014, le rédacteur en chef du site « Infocenter » Yevguéni Anokhine a été arrêté soi-disant pour avoir des liens avec des terroristes, c’est-à-dire avec les Républiques de Donetsk et Lougansk. Le SBU (services secrets ukrainiens) a découvert dans son ordinateur une liste de gens pouvant faire l’objet d’un échange entre les républiques populaires et l’Ukraine. Dans la mesure où les organes de police n’avaient rien réussi à trouver de mieux comme motif de son arrestation, ils ont été obligés de jouer les imbéciles et prétendre ignorer qu’un journaliste a le droit de collecter ce genre d’information dans un but professionnel. Au bout du compte, Anokhine a été échangé contre des prisonniers des Forces Armées Ukrainiennes, et, ses papiers d’identité confisqués, livré à la république de Lougansk, où il se trouve à ce jour.
Виталий ДиденкоAprès l’arrestation d’Anokhine, le journaliste Vitali Didenko qui travaillait déjà à « Infocenter » l’a remplacé au poste de rédacteur en chef. Depuis ses années à la fac, Didenko sympathisait avec les idées communistes et avait une bonne connaissance du marxisme. Il s’est opposé au Maïdan, le considérant comme un mouvement réactionnaire et une arme aux mains des puissances impérialistes qui se battent pour le partage des sphères d’influence en Ukraine. Pour la même raison il n’a pas soutenu les nationalistes russes et s’est opposé au régime post-Maïdan à partir d’une plate-forme démocratique ouvrant sur une perspective socialiste. Cependant, son activité en qualité de journaliste d’Infocenter se bornait à une critique du régime instauré en Ukraine d’un point de vue de défense des valeurs démocratiques en général.
Mais comme on sait, le régime instauré en Ukraine considère toute critique à son encontre comme du séparatisme, dès lors qu’elle ne s’appuie pas sur l’idéologie communément admise. Dans la mesure où  « Infocenter » et Vitali Didenko en personne ont toujours rejeté le bandérisme [idéologie fasciste ukrainienne, revendiquant l'héritage du criminel de guerre Stepan Bandera], ils étaient des cibles idéales. Sentant la menace, Didenko avait déjà changé d’adresse à la fin de l’année dernière, et peu avant son arrestation, il avait encore déménagé. Mais le SBU a retrouvé sa trace et, faisant pression sur le propriétaire, a mis son appartement sur écoute (illégale), et à l’aube du 29 avril a débarqué avec un mandat d’arrêt. Didenko a tenté de s’enfuir et s’est jeté du troisième étage. Mal lui en a pris : il s’est cassé un bras et deux côtes, devenant une proie facile pour ses persécuteurs.
Comme on pouvait s’y attendre, Didenko a été accusé de séparatisme, malgré le fait que sur le site « Infocenter » n’aient jamais été publiés d’appels à la séparation de quoi que ce soit appartenant à l’Ukraine. En plus de son activité journalistique, on lui reprochait un soutien informatif et organisationnel à la « Rada populaire de Bessarabie ». Cette « rada » est une association qui regroupe des représentants des minorités nationales dans le sud de la province d’Odessa. Elle a été créée en avril 2015 et a dès le départ fait l’objet d'actes répressifs –  le régime de Kiev a vu en elle un organe séparatiste. Sans doute parce que la « Rada » rassemble des personnalités qui ne soutiennent pas la dictature post-Maïdan. Enfin, comprenant que les accusations portant sur les activités journalistiques et associatives ne suffiraient pas pour mettre Didenko à l’ombre, au cours d’une perquisition on a « trouvé » chez lui de la cocaïne. Tous ses amis ont été profondément surpris de cette « trouvaille » : il menait un mode de vie sain, ne fume pas, ne boit de l’alcool que les jours de fête, et avant la crise politique, il  jouait au football.
Les services secrets avaient calculé juste. Les accusations de séparatisme étaient tellement bancales que le 15 mai la Cour d’appel a rejeté la décision d’arrêter Didenko. Mais le SBU l’a accusé de détention illégale de stupéfiants et l'a arrêté de nouveau le 19 mai. L’avocat de Didenko a fait de nouveau appel, mais cette fois-ci, les « Maïdown » (partisans du Maïdan) s’en sont mêlés. Le 27 mai ils ont intercepté le procureur et l’ont menacé de « lustration par la benne à ordures », si la Cour annulait l’arrestation. Celle-ci a donc laissé Didenko derrière les barreaux.
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