Alliance zapatiste de libération sociale, fondée à Paris le 12 mars 1995 Liberté, justice, démocratie, partout et pour tous! التحالف الزباتي من أجل التحرر الاجتماعي تأسس بباريس في 12 مـــارس 1995. حرية، عدالة، ديمقراطية في كل مكان وللجميــــــع yekfibasta[at]gmail.com :للاتصال
mardi 31 mars 2009
La photo du jour
lundi 30 mars 2009
G20
Dans la capitale française, plusieurs centaines de personnes, 400 selon la police et 700 selon les organisateurs, ont notamment procédé au "démantèlement symbolique d'un paradis fiscal". Celui-ci avait été symboliquement installé près de la place de la Bourse, sur le trajet du cortège : mini-plage de sable, deux palmiers en pot, deux transats occupés par des hommes en tongs et chemise à fleurs.
Décidés à montrer "combien il est facile d'en finir avec un paradis fiscal", les organisateurs ont ensuite démantelé leur installation en ramassant le sable avec trois pelles. Des billets factices de 5.000 euros barrés de la mention "net d'impôt" ont aussi été répandus par terre ou lancés en l'air. Derrière une banderole proclamant "G20 : les peuples avant les banquiers. Nous ne paierons pas leur crise", le cortège a défilé pendant deux heures de la place de l'Opéra à la place des Victoires, proche de la Banque de France. Quelque 30 organisations ont appelé à manifester, dont Agir ensemble contre le chômage, Attac, la Ligue des droits de l'homme, le DAL, le Mrap, la FSU ou Solidaires (syndicats Sud), soutenues par des partis de gauche (NPA, Parti de gauche, PCF ou les Verts). "G20, sommet des injustices", "paradis fiscaux, paradis d'escrocs", "ce n'est pas aux travailleurs de payer la crise du capitalisme, c'est au patronat de payer leur crise", pouvait-on lire sur des pancartes. Deux manifestants s'abritaient de la pluie sous des parapluies portant l'inscription "Chômage année noire".
Selon Pierre Khalfa de Solidaires, "le G20 va colmater les brèches du système financier sans remettre en cause la place de l'industrie financière ni le partage des richesses". "Il ne suffira pas que le G20 fasse une petite liste noire de paradis fiscaux excluant la Suisse ou le Luxembourg, il faudra s'en prendre aux utilisateurs, qui existent aussi à Paris, comme BNP Paribas ou Lagardère", a commenté Jean Merckaert du Comité catholique contre la faim et pour le développement. La crise se traduit "dans les pays riches par de nouvelles formes de bidonvilles, d'habitations précaires que nous croyions révolues", a souligné Jean-Baptiste Eyraud de Droit au logement. Quant à Jean-Luc Mélenchon, leader du Parti de gauche, il a, lui, appelé à "tourner la page de la financiarisation" et à "ne pas s'en tenir à deux-trois sparadraps", tandis que Francis Wurtz (Front de gauche) s'est déclaré convaincu que les projets du G20 relevaient "du traitement homéopathique" et que le gros de la crise était "à venir".
Mobilisation à Londres, Berlin et Francfort
Ce même samedi, à Londres, une marche a attiré 35.000 personnes selon Scotland Yard, une mobilisation bien en deçà des espoirs des organisateurs qui tablaient sur des centaines de milliers de participants. Aucun incident n'a été signalé ni aucune arrestation opérée. Ce rassemblement britannique, baptisé "Put people first" ("Donnez la priorité aux gens"), a été préparé par une coalition de plus de 150 organisations ayant un intérêt commun : "l'emploi, la justice et le climat". Celles-ci espéraient en faire le plus important rassemblement à Londres depuis celui d'un million de personnes en 2003 contre la guerre en Irak. L'objectif n'a de toute évidence pas été atteint. Rendez-vous a été donné à partir de midi à Victoria Embankment, sur les berges de la Tamise, où des stands d'information et de distribution de tracts avaient été installés.
Alors que le soleil perçait les nuages qui avaient déversé une bruine fraîche dans la matinée sur Londres, le cortège clairsemé s'est élancé pour un défilé accompagné de chants et de fanfares jusqu'à Hyde Park, qui devait être rallié après 6,5 km de marche. Des centaines de drapeaux, banderoles et panneaux dansaient au-dessus des manifestants, faisant apparaître la diversité des causes défendues par la coalition composée de syndicats, organisations caritatives, défenseurs de l'environnement, associations religieuses, groupes d'étudiants, militants pacifistes. Petit florilège : "Nous ne paierons pas pour leur crise", "Gaza: fin du blocus", "Urgence climat" ou encore "La planète avant les bénéfices", "Planifiez en ayant la planète à l'esprit". Une délégation du syndicat français CGT, composée d'une centaine de militants, se trouvait d'ailleurs dans ce cortège. "Ce jour marque la naissance d'une voix progressiste puissante", a estimé Brendan Barber, secrétaire général de la confédération syndicale britannique Trades Union Congress (TUC). "Lorsque les dirigeants du G20 viendront à Londres, des voix pour le changement s'élèveront, des voix qui veulent une régulation mondiale de la finance et une action contre les paradis fiscaux, des voix pour un nouvel accord écologique, des voix pour une relance économique qui puisse combattre le chômage et la pauvreté", a-t-il poursuivi.
Le sommet du G20 doit réunir les chefs d'État et de gouvernement des grands pays industrialisés et des principales économies émergentes. Les manifestants ont en outre dénoncé le coût de l'évènement : entre 19 et 20 millions de livres (plus de 20 millions d'euros) pour le pays hôte. "Il s'agit d'une des opérations les plus importantes, les plus difficiles et les plus compliquées que nous ayons eu à assurer", a confié le commandant Simon O'Brien, l'un des hauts responsables de la sécurité du sommet. "C'est sans précédent à cause de la complexité et de l'envergure des opérations sur plusieurs jours." Des milliers de policiers ont en effet été acheminés de la province anglaise vers Londres pour prêter main-forte à Scotland Yard, qui craint en particulier des actions violentes dans la City, coeur de la finance britannique. Des actions de protestations tous azimuts sont déjà programmées à Londres entre lundi et jeudi.
Source : Le Point
Non-assistance
par Naoki TOMASINI, 3/3/2009. Traduit par Fausto Giudice
Original : Mancato soccorso
Les médecins israéliens ont refusé de transmettre à leurs collègues palestiniens des informations sur la manière de soigner les blessures provoquées par le phosphore blanc.
Le Dr. Abou Shaban est médecin-chef au service des brûlés l'hôpital Al Shifa à Gaza, qui a rassemblé de nombreuses preuves de l'utilisation de munitions au phosphore blanc contre la population civile dans la bande de Gaza. Racontant les difficultés rencontrées au cours de l'offensive, alors qu'ils ne savaient pas comment traiter les blessures provoquées par le phosphore, il a révélé avoir demandé de l’aide aux médecins israéliens de Médecins pour les droits de l'homme (Physicians for Human Rights), lesquels ont été incapables de l'aider. PeaceReporter a interrogé Miri Weingarten, la militante de Médecins pour les droits de l'homme, qui a traduit et diffusé le document confidentiel israélien sur lequel nous avons écrit hier.
"Le document, qui contient des instructions sur la façon de reconnaître et de guérir les blessures provoquées par le phosphore blanc a été réalisée par l'Étoile de David Rouge et des médecins militaires», a déclaré Miri. "Dès que nous avons appris son existence, nous avons appelé l’unité de guerre du gouvernement et nous en avons demandé une copie. À quoi ça va vous servir? Nous ont répondu des fonctionnaires, en expliquant qu'il s'agissait d'un document à usage interne ... Cela nous a été demandé par certains patients israéliens, avons-nous répondu.Et comme ça, ils nous l’ont envoyé. Nous l’avons alors traduit et envoyé au ministère de la Santé de la bande de Gaza, et ensuite, par le biais d'une liste de diffusion, aux principales ONG actives dans la bande de Gaza ".
Est-ce qu’ils l’auraient envoyé quand même, même en sachant que vous le traduiriez et transmettriez aux Palestiniens?
Certainement pas.
Le Docteur Abou Shaban affirme qu'il n'a jamais vu ce dossier, qui aurait permis de sauver de nombreuses vies. Est-il vrai que vous n'avez pas été en mesure de l’aider?
Oui, le docteur dit la vérité. Jusqu'à ce que nous ayons reçu le document de la Magen David Adom, nous ne savions pas comment l’aider. Nous avons essayé de demander de l'aide à un médecin de l'hôpital Shiba de Tel-Aviv, qui au cours de la guerre du Liban de 2006, avait soigné des soldats blessés par le phosphore. Mais, lorsque nous avons demandé s'il était disposé à parler avec un médecin palestinien, il a dit non. Le document, nous l’avons reçu le 15 Janvier, il a fallu trois jours pour le traduire et le diffuser, et il est probable parvenu aux médecins dans la bande de Gaza après le 18, le jour où a été instaurée la trêve.
Mais le docteur Abou Shaban affirmait le 10 Février n’avoir jamais vu le document israélien...
Immédiatement après le cessez-le-feu nous avons envoyé dans la bande de Gaza une mission de médecins qui ont parlé des cas de blessures au phosphore avec divers médecins locaux, dont Abou Shaban. Mais il faut comprendre que, durant ces jours-là, ça a été un chaos total. Il est possible qu’il n'avait pas lu les e-mails ... En tout cas, les informations qu'il nous a fournies ont toujours été précises et fiables, et nous croyons avoir fait tout notre possible à son égard.
Le fait que l’Étoile de David rouge et les médecins iraéliens qui ont reçu ce document ne l’ont pas fourni aux collègues palestiniens n’est-il pas une violation des codes éthiques ?
Bien sûr que ça l’est. C’est une violation flagrante de la Convention de Genève, qui oblige toute organisation médicale à fournir toute l'aide possible aux blessés , de quelque bord qu’ils soient. Mis à part le phosphore, la non-assistance concerne aussi 'armée, qui, dans de très nombreux cas, au cours de cette offensive, a laissé saigner et mourir des blessés sans leur porter secours. Voyez-vous, le phosphore est tiré avec l'artillerie, donc les soldats ne voient pas où il tombe, alors que dans le cas de coups de canon et d’armes de poing, ils voient qi ils ont atteint. Je le répète, les soldats et les moyens de secours de l'armée israélienne sont restés impassible face à des dizaines de cas de personnes ayant besoin de soins médicaux d'urgence. C’est cela le crime de guerre, et c’est encore plus grave que l'utilisation de phosphore dans les zones densément peuplées de civils. En ce qui concerne le phosphore, il y aussi une autre violation : le fait que l'armée, jusqu'à la fin de la guerre, a refusé d’admettre qu'elle l’avait utilisé.
Les obus de 155mm sont clairement marqués du numéro M825A1, une munition US au phosphore blanc
Le document affirme que le Hamas serait en train de tirer des munitions au phosphore vers Israël, sans expliquer d'où elles viennent. Mais il est évident que le phosphore à présent en possession du Hamas est celui-là même qu’Israël a tiré contre la bande de Gaza ...
Oui, aussi paradoxale que l'accusation par laquelle commence le document puisse paraître, ce n’est pas exactement un aveu. Mais les mêmes forces armées elles-mêmes ont reconnu explicitement avoir utilisé ces munitions, mais seulement après le cessez-le-feu, mais sans admettre qu'elles les avaient utilisé dans les zones densément peuplées. C'est un fait qui doit être souligné, car le refus de reconnaître cela a compliqué au début la vie des médecins à Gaza. Ils savaient qu'il étaient en présence de brûlures inhabituelles, mais ils ne pouvaient pas être sûrs que ce c’était du phosphore et non d'autres substances mystérieuses. En outre, une circonstance atténuante pour le médecin israélien qui a refusé de parler avec les collègues palestiniens, est qu’il n’était pas disposé à donner des conseils parce qu'il n’était pas en mesure de vérifier personnellement que le type d'arme utilisée était vraiment du phosphore blanc, plutôt qu’une quelconque autre fantomatique arme expérimentale.
Le Lobby perd de son assurance
par John J. MEARSHEIMER, 26/3/2009. Traduit par Marcel Charbonnier, révisé par Fausto Giudice, Tlaxcala
Original : The Lobby Falters
Sur l’auteur
Beaucoup de gens, à Washington, ont été surpris de voir l’administration Obama nommer Charles Freeman à la tête du Conseil national du renseignement (National Intelligence Council), l’organisme qui supervise la production des Estimation nationales de renseignement* (National Intelligence Estimates) : M. Freeman avait derrière lui une remarquable carrière de trente ans comme diplomate et fonctionnaire du département de la Défense, mais il a critiqué publiquement la politique israélienne et la relation spéciale que les USA entretiennent avec ce pays, disant, par exemple, au cours d’un discours prononcé en 2005, qu’ « aussi longtemps que les USA continueraient à lui fournir de manière inconditionnelle les financements et la protection politique qui rendent l’occupation israélienne et la politique violente et autodestructrice (pour Israël) que cette occupation génère, il y aura très peu de raisons, voire strictement aucune, d’espérer que quoi que ce soit qui pût ressembler au défunt processus de paix puisse être ressuscité ». De tels mots sont rarement prononcés à Washington, et quiconque les utilise est quasi certain de ne pas accéder à une responsabilité gouvernementale de haut niveau. Mais l’amiral Dennis Blair, le nouveau Directeur du renseignement national, admire beaucoup Freeman, qu’il estimait être exactement le genre de personne capable de revitaliser les milieux du renseignement, qui avaient été extrêmement politisés, durant les années Bush.
Alarmé, comme c’était prévisible, le lobby israélien a lancé une campagne de diffamation à l’encontre de Freeman, dans l’espoir que, soit il démissionnerait de lui-même, soit il se ferait virer par Obama. Le Lobby tira sa première salve sous la forme d’un texte sur un blog, posté par Steven Rosen, un ancien responsable de l’AIPAC, l’American Israel Public Affairs Committee, aujourd’hui mis en examen pour avoir livré des secrets à Israël. « L’opinion de Freeman sur le Moyen-Orient », écrivait-il, « est celle que vous attendriez du ministre des Affaires étrangères saoudien, auquel il est, du reste, très lié ». Des journalistes pro-israéliens de grand renom, comme Jonathan Chait et Martin Peretz, du quotidien New Republic, et Jeffrey Goldberg du quotidien The Atlantic, ont vite rejoint la meute, et Freeman a été pilonné par des publications qui défendent invariablement Israël comme The National Review, The Wall Street Journal et le Weekly Standard.
Mais le véritable paquet a été mis par le Congrès, où l’AIPAC (qui se qualifie lui-même de « Lobby pro-israélien de l’Amérique ») détient un pouvoir écrasant. Tous les membres républicains de la Commission sénatoriale du Renseignement sont tombés à bras raccourcis sur Freeman, comme l’ont fait des sénateurs démocrates tels que Joseph Lieberman et Charles Schumer. « J’ai exhorté je ne sais combien de fois la Maison Blanche à le virer », a dit Schumer, « et je suis heureux qu’ils aient fini par faire la seule chose qu’il y avait à faire… » Même histoire à la Chambre , où la charge a été menée par le Républicain Mark Kirk et le Démocrate Steve Israel, qui a poussé Blair [Dennis, pas Tony, NdR] à déclencher une enquête impitoyable au sujet des finances de Freeman. Finalement, la Présidente de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, a déclaré que la nomination de Freeman était « inadmissible ». Freeman aurait pu survivre à cette curée si la Maison Blanche l’avait soutenu. Mais la lèche qu’avait faite Barack Obama au lobby israélien durant la campagne électorale et son silence assourdissant durant la guerre contre Gaza montrent que le Lobby est, pour lui, un opposant qu’il n’est pas prêt à affronter. Donc, sans surprise, il a gardé le silence et Freeman n’a eu d’autre choix que de se démettre.
Depuis lors, le lobby a déployé d’énormes efforts pour dénier son rôle dans la démission de Freeman. Le porte-parole de l’AIPAC Josh Block a dit que son organisation « n’avait pas pris position sur cette question et qu’elle n’avait exercé aucune action de lobbying auprès de la Colline [du Capitole] à son sujet ». Le Washington Post, dont la page éditoriale est dirigée par Fred Hiatt, un homme totalement voué à la pérennisation de la « relation spéciale » [entre les USA et Israël, NdR], a publié un éditorial affirmant que le fait de mettre en cause le lobby dans la démission de Freeman relevait des « seuls rêves de M. Freeman et de théoriciens du complot du même acabit ».
En réalité, les preuves de la profonde implication de l’AIPAC et d’autres supporters purs et durs d’Israël dans la campagne visant Freeman abondent. Block a reconnu avoir parlé de Freeman à des journalistes et à des blogueurs, et leur avoir donné des informations, toujours après avoir convenu avec eux afin que ses commentaires ne seraient jamais attribués ni à lui ni à l’AIPAC. Jonathan Chait, qui a nié qu’Israël ait été à l’origine de la controverse, avant le limogeage de Freeman, a écrit, après coup : « Bien sûr, je reconnais que le lobby israélien est puissant et qu’il a été un élément clé dans la curée contre Freeman, et que ce lobby n’est pas toujours une puissance bénéfique ». Daniel Pipes, qui dirige le Middle East Forum, où Steven Rosen travaille aujourd’hui, a envoyé prestement une newsletter électronique, se vantant du rôle joué par Rosen dans la révocation de Freeman.
Le 12 mars, le jour même où le Washington Post publiait son éditorial s’insurgeant quiconque aurait pu suggérer que le lobby israélien avait contribué à faire virer Freeman, le journal a publié un article en première page, décrivant le rôle central que le lobby a joué dans cette affaire. Il y avait aussi un commentaire d’un journaliste vétéran, David Broder, qui commençait ainsi : « L’administration Obama vient de subir une défaite embarrassante de la part de ces mêmes lobbyistes que le Président a juré de remettre à leur place. »
"Ils vont essayer de vous réduire au silence et de vous discréditer. Car vous n'avez pas le droit de critiquer Israël". Carlos Latuff, 2006
Les détracteurs de Freeman maintiennent que son opinion sur Israël ne concerne pas que lui seul. Ils disent de lui qu’il a des relations particulièrement étroites, voire peut-être même inappropriées avec l’Arabie saoudite, où il a été, par le passé, ambassadeur des USA. Cette accusation n’a pas porté, toutefois, car il n’existe aucune preuve pour l’étayer. Les fans d’Israël ont dit, aussi, qu’il avait fait des remarques dépourvues de toute compassion à propos du sort qu’avaient connu les manifestants chinois sur la Place Tiananmen de Pékin (en juin 1989), mais cette accusation, que les défenseurs de Freeman contestent, a été tirée du sac uniquement parce que les détracteurs pro-israéliens de Freeman étaient en quête de n’importe quel argument leur permettant de salir sa réputation.
Pourquoi le lobby se préoccupe-t-il à ce point d’une nomination à un poste, certes important, mais certainement pas suprême ? Voici une raison, parmi d’autres : Freeman aurait été responsable de la publication des Estimation nationales de renseignement. Israël et ses partisans usaméricains ont été fous de rage après que le National Intelligence Council eut conclu, en novembre 2007, que l’Iran ne construisait absolument pas la bombe nucléaire, et ils avaient travaillé d’arrache-pied afin de saper ce rapport, ce qu’ils continuent à faire jusqu’à ce jour. Le lobby veut s’assurer que la prochaine estimation sur les capacités nucléaires de l’Iran parvienne à la conclusion diamétralement opposée, et cela avait bien moins de chances d’arriver, avec Freeman aux manettes. Mieux vaut avoir quelqu’un qui soit dûment estampillé AIPAC pour mener la danse…
Une raison – encore plus importante -, pour le lobby, de faire virer Freeman de son job, c’est la faiblesse de l’argumentation susceptible de justifier la politique actuelle de l’Usamérique vis-à-vis d’Israël, qui rend impératif d’intimer le silence ou de marginaliser quiconque oserait critiquer la « relation spéciale ». Si Freeman n’avait pas été puni, d’autres auraient vu qu’on pouvait critiquer ouvertement Israël et néanmoins faire carrière brillamment à Washington. Et dès l’instant où on obtiendrait qu’un débat ouvert et libre s’instaure autour d’Israël, la relation spéciale sera sérieusement compromise.
Un des aspects les plus remarquables de l’affaire Freeman a été que les médias dominants lui ont accordé très peu d’attention. Ainsi, par exemple, le New York Times n’a pas publié le moindre article au sujet de Freeman jusqu’au lendemain de sa démission, alors qu’une bataille féroce autour de sa nomination avait commencé à faire rage dans la blogosphère. Les opposants à Freeman ont utilisé Internet à leur avantage ; c’est là que Rosen a lancé sa campagne. Mais quelque chose s’est produit dans le cyberespace qui ne se serait jamais produit dans les médias dominants : le lobby a été confronté à une réelle opposition. De fait, tout un éventail de blogueurs énergiques, bien informés et hautement respectés, a défendu Freeman, dans toutes les péripéties, et ils auraient vraisemblablement emporté le morceau si le Congrès n’avait pas pesé de tout son poids contre eux. Bref : Internet a permis un débat sérieux aux USA, sur une question impliquant Israël : ce fut une première absolue. Le lobby n’a jamais eu grand-mal à faire observer la ligne juste par le New York Times et le Washington Post, mais il a peu de moyens de faire taire les critiques s’exprimant sur Internet.
Lorsque les forces pro-israéliennes étaient entrées en conflit avec une personnalité politique majeure, par le passé, cette personnalité, généralement, avait reculé. Jimmy Carter, roulé dans la boue après qu’il eut publié son livre Palestine : la Paix , pas l’apartheid, a été le premier Usaméricain éminent à tenir bon et à répliquer. Le lobby n’a pas pu le faire taire, et ça n’est pas faute, pour lui, d’avoir essayé. Freeman marche dans les brisées de Carter, mais avec davantage de pugnacité. Après s’être démis, il a publié une dénonciation au vitriol de « gens dénués de scrupules entièrement dévoués à défendre les vues d’une faction politique d’un pays étranger dont le but est d’empêcher par tous les moyens que des opinions un tant soi peu différentes des siennes ne puissent être diffusées ». « Il y a », avait-il poursuivi, « une ironie particulière dans le fait de se voir accusé d’appréciation inappropriée au sujet des positions de gouvernements et de sociétés étrangers, par un clan si manifestement voué à imposer l’adhésion à la politique d’un gouvernement étranger ».
La remarquable déclaration de Freeman est parvenue au monde entier, elle a été lue par un nombre incalculable de personnes. Cela n’est pas bon, pour le lobby, qui aurait préféré briser dans l’œuf la nomination de Freeman sans laisser d’empreintes digitales. Mais Freeman continuera à s’exprimer au sujet d’Israël et du lobby pro-israélien, et peut-être que (sait-on jamais) certains de ses alliés naturels, à l’intérieur du Beltway**, finiront par le rejoindre.
Lentement mais sûrement, un espace commence à s’ouvrir, aux USA, où il sera possible de parler honnêtement d’Israël.
Notes
* Les National Intelligence Estimates (NIE) sont des documents d'estimation émis par le gouvernement US, décrivant les informations en possession des services de renseignement sur d'éventuels événements futurs. Il s'agit d'évaluations officielles du Directeur du renseignement national (DNI) sur des thématiques de renseignement liées à un sujet particulier relevant de la sécurité nationale. Les NIE sont produits par le National Intelligence Council et reflètent les avis de la communauté du renseignement US (Intelligence Community) regroupant seize services de renseignement. Le NIE est considéré comme une information classifiée destinée aux dirigeants du pays.
La publication régulière des NIE permet non seulement de résoudre d'éventuels divergences de points de vue entre les services de renseignement, mais également d'assigner un Intervalle de confiance aux avis principaux et d'évaluer les sources de chacun d'eux. Chaque NIE est revu et approuvé pour diffusion par le National Intelligence Board qui comprend le DNI et d'autres hauts dirigeants de la Communauté du Renseignement. (source : wikpedia)
** Beltway : boulevard périphérique, aussi appelé Capital Beltway, autoroute inter-États n° 495 qui entoure Washington et les États voisins de Maryland et de Virginie, desservant des zones où travaillent et habitent les fonctionnaires fédéraux et les employés de sous-traitants de l’administration fédérale. (NdR)
samedi 28 mars 2009
Même impériale, la porcelaine reste très fragile - Un accident du travail post-moderne
Даже императорский, фарфор продолжает быть очень хрупким
Das Porzellan bleibt weiterhin sehr zerbrechlich, auch wenn es imperial ist - Ein postmoderner Arbeitsunfall
La Manufacture impériale de porcelaine de Saint-Pétersbourg, fondée par l’impératrice Elizabeth II, fille de Pierre le Grand, en 1744, est un objet de fierté nationale russe. Elle a retrouvé ce nom prestigieux après s’être appelé, de 1925 à 1993, Fabrique de porcelaine d’État Mikhaïl Lomonossov (du nom du fondateur de l’Académie russe des sciences). Sa privatisation a été au centre d’une tempête politico-judiciaire.
Flash-back : en 1992 le trio au pouvoir Eltsine-Choubais-Gaidar, brade 70 000 entreprises d’État à des privés, généralement les directeurs anciennement « rouges » des entreprises, pour des bouchées de pain. Cette privatisation sauvage qui verra l’émergence de ceux qu’on appelle les oligarques, suscite des réactions violentes des nationalistes, patriotes et communistes, qui disent : « Eltsine a vendu la nation à des bandits ». Un nouveau mot apparaît dans le vocabulaire russe : deprivatizatsia, déprivatisation.
La manufacture de porcelaine Lomonossov intéresse des investisseurs US, qui voudraient bien récupérer le musée de la porcelaine adjacent à l’usine. En 1998, le U.S.-Russia Investment Fund et Kohlberg Kravis Roberts, un corsaire de Wall Street, prennent le contrôle de la manufacture à 54% pour la modique somme de 4,5 millions de $. Mais en octobre 1999, la Cour d’arbitrage de Saint-Pétersbourg décrète que cette privatisation a été illégale. La presse proclame une grande victoire de la nation russe.
Le Musée de porcelaine passe sous le contrôle du Musée de l’Ermitage et l’usine elle-même sous celui d’un oligarque, vétéran de la guerre d’Afghanistan, l’ex-lieutenant-colonel d’aviation Nikolai Tsvetkov, né en 1959, et de son groupe financier Nikoil Financial. Avec une fortune estimée à 8,4 milliards de $ en 2007, Tsvetkov est en 83ème position dans la liste des hommes les plus riches du monde établie chaque année par le magazine Forbes. Une fois rachetée la Maufacture impériale, il crée le groupe au nom pompeux de Imperial porcelain holding. Il se lance dès lors à la conquête des marchés émergents (Asie, en particulier Chine) et prend le contrôle d’une série d’entreprises en Italie, Allemagne, Espagne, Angleterre, Autriche et…France.
En 2002, Tsvetkov "vole au secours" de l’usine Deshoulières de Chauvigny (Vienne), à 30 km de Poitiers, puis, en 2007, de celle de Foëcy, dans le Cher, l’emportant sur un concurrent US, Haviland. Deshoulières est une entreprise familiale créée en 1826, qui possède 4 usines sur 3 sites de production employant en tout 470 salariés : Chauvigny, Foëcy, Porcelaines de Sologne à Lamotte-Beuvron, Porcelaine de Limoges (PDL) et Dorelaine au Doras, en Haute-Vienne. C’est le groupe de fabricants de porcelaine le plus important de France. Mais à partir de 2004, le groupe se porte mal et accumule les déficits (30 millions d’€ en 3 ans).
En octobre 2008, les Russes débarquent le directeur Yann Deshoulières, qu’ils remplacent par le tandem Cyrille Roze et Gérard Zinck, et annoncent un de ces fameux « plans sociaux », en fait la suppression de 82 emplois, soit presque la moitié des effectifs, à Chauvigny. La lutte commence.
Philippe Widdershoven est à la tête de cette lutte. Cet homme de 56 ans, directeur de l’informatique de l’usine, est le délégué CGT de l’usine. Il est en première ligne de toutes les actions des salariés pour tenter de sauver leurs emplois. C’est donc lui que les nouveaux patrons de combat de l’usine prennent pour tête de turc. En novembre 2008, ils émettent un communiqué l’accusant d’être, lui, responsable des difficultés de l’entreprise.
Le mardi 24 mars 2009, le corps de Philippe Widdershoven a été retrouvé dans l’étang de Morthemer, son lieu de résidence. Au local syndical, son prédécesseur comme délégué syndical, a trouvé la photocopie d’une lettre de Philippe, qui écrit : « Ils m’ont tué ». Demandant pardon à sa famille (il laisse une femme et une fille d’une vingtaine d’années), il explique son geste par une trop forte pression professionnelle et demande que son suicide soit considéré comme un accident du travail. Ses camarades syndicalistes ont aussitôt engagé des démarches pour faire reconnaître son suicide comme accident du travail, ce qui créerait une jurisprudence bien à l’image de l’époque insensée que nous vivons.
Philippe Widdershoven en action
L’émotion suscitée par la disparition tragique de Philippe Widdershoven, a été très forte.
Ségolène Royal, présidente de la Région Poitou-Charentes, lui a rendu hommage. Une sénatrice communiste a fait observer une minute de silence au Sénat.
Philippe Widdershoven, homme de porcelaine piétiné par l’éléphant russe, rejoint la cohorte toujours plus longue des martyrs de la mondialisation capitaliste.
N. Danko. Marin avec drapeau, 1919. Production de la Fabrique de porcelaine d'État de l'époque révolutionnaire, quand Saint-Petersbourg ne s'appelait pas encore Leingrad mais Petrograd
vendredi 27 mars 2009
Eduardo Galeano : « Il est temps que l’Amérique Latine récupère son indépendance ...
par Blanche PETRICH, La Jornada, 24/3/2009. Traduit par Esteban G., révisé par Fausto Giudice, Tlaxcala
Original : Es hora de que AL recupere su independencia - Ambiente propicio ante la pérdida de poder y autoridad de EU, dice Eduardo Galeano
Du journalisme, des peuples d’Amérique latine « qui en ont eu assez de danser la salsa au rythme du Titanic », de l'histoire du monde, du racisme et du machisme. De sa formation académique dans les cafés de Montevideo. De son style littéraire, qui aspire à dire le plus avec peu, de chair et d’os sans graisse, la parole à nu. De sa dernière aventure, Espejos (Miroirs), un livre de contre-histoire qui embrasse l’ineembrassable et qui raconte une série de petites histoires venant de ceux qui ne sont pas dans les livres, les exclus, les méprisés. Eduardo Galeano se laisse facilement entraîner pour parler de tout ceci et encore plus avec La Jornada, le quotidien qui – assure t-il - est aussi sa maison.
L'Uruguayen Galeano tapote des doigts sur l’image d'une tête africaine sculptée qui illustre la couverture de Espejos, son œuvre la plus récente. « Ici – dit-il - je me promène dans l'histoire universelle de manière très irresponsable ». Il rit de lui-même : Depuis l’âge des cavernes jusqu’à aujourd’hui, rien ne m'échappe. Bien sûr, ce dont je me souviens le plus est ce qui s’est passé durant le XXème siècle, qui est le mien. Aujourd’hui, le XXIè siècle doit apprendre de ce qui s’est passé au XXème. Ce qui est arrivé est le double échec : d’un côté les sociétés qui ont sacrifié la liberté au nom de la justice, et de l’autre, celles qui ont sacrifié la justice au nom de la liberté. Le défi des temps qui viennent est que les deux doivent s’unir à nouveau. La justice et la liberté sont nées siamoises, mais elles ont été séparées par les chirurgiens du pouvoir ; maintenant elles veulent être de nouveau épaule contre épaule.
De la même manière, convaincu de ce qu'a dit Rosa Luxembourg, qu’il n’y a rien de plus révolutionnaire que de dire ce que l'on pense, il se permet d'exprimer ses divergences avec Cuba et le Venezuela.
Photo Sergio Hernández Vega, La Jornada
Amérique Latine, le royaume de la diversité
J'ai été le porte-parole des observateurs internationaux indépendants lorsqu’en 2004 il [Hugo Chávez] a appelé au référendum révocatoire. J’ai participé avec Jimmy Carter et César Gaviria. Nous avons passé toute la nuit ensemble, à analyser les données. Et au final, les faits étaient évidents : ce fut une élection propre. La première fois dans l'histoire universelle dans laquelle un président élu mettait son mandat entre les mains des gens en disant : si vous voulez, je reste ; si non, je m’en vais. Il n'y a pas eu de piège. Quelque temps plus tard Evo Morales fit la même chose, et dans une proportion un peu plus grande que pour Chávez, son peuple lui a demandé de rester. Cela a été deux leçons de démocratie que le monde n'a pas écouté. Et il ne les a pas écoutées parce que les médias les ont tues.
-Le sujet de la réélection dans le cas de la Bolivie et du Venezuela apparaît presque omme un gros mot, alors qu’il est normal dans beaucoup de systèmes politiques en Europe, et même aux USA.
- Il y a une nette contradiction entre ce que prêchent les pays puissants et ce qu’ils pratiquent. Personnellement je ne suis pas convaincu par la possibilité de réélection indéfinie. Le pouvoir est dangereux et induit à la longue à écouter davantage l'écho que les voix. La concentration du pouvoir dans une seule personne n'est pas bonne pour la démocratie que nous voulons participative. C’est mon opinion, mais cela ne me fait pas tomber dans le piège de croire que Chávez veut se maintenir à perpétuité au pouvoir. Je ne suis pas non plus convaincu par le système de pouvoir à Cuba, qui peut-être a été le seul que Cuba ait pu avoir, victime de l’asphyxie immédiate de la part des puissances impériales. Peut-être que ce n’est pas cela qu’ils voulaient, c'était ce qu’ils pouvaient.
L'État tout-puissant n'est pas la meilleure réponse au marché tout-puissant. J'ai des opinions divergentes avec Cuba, et je crois, comme dit Rosa Luxembourg, qu'il n'y a pas d’acte plus révolutionnaire que de dire ce que l’on pense. Souvent, ce dont souffrent les expériences de changement et toutes les tentatives de justice sociale c’est d’être soumises au harcèlement d’un blocus féroce. Il en résulte parfois que l'on condamne, et très injustement, les opinions qui contredisent la volonté du pouvoir. Et cela n'est pas bon.
- En parlant d'un monde en déroute, l'Amérique Latine est riche en contradictions. Les changements qui gagnent chaque fois plus de terrain, depuis le Brésil de Lula da Silva jusqu'au Salvador de Mauricio Funes, en passant par un sandinisme au Nicaragua qui se retourne contre ses frères, sont contradictoires. Je ne sais pas si nous comprenons bien ces changements.
Ce qu'il faut souligner par dessus tout c’est que l'Amérique Latine est le royaume de la diversité. C’est ce que nous avons de meilleur et cela ne doit effrayer personne, au contraire. Toute généralisation a priori est condamnée à l’erreur. Mais d’un autre côté, il est inévitable de généraliser lorsqu’on essaye d’englober un champ qui va au-delà des frontières de chaque petit morceau. Ce qu’il ya a, c’est une volonté de changement chez les peuples, une conscience naissante et croissante que les chemins parcourus durant les 30, 40 dernières années conduisaient à la catastrophe. La chute de Wall Street – et ce n’est pas pour rien qu’elle s’appelle la rue du MUR -, la chute de ce mur, renferme une grande leçon. Pendant des années et des années ils nous ont invités à danser la salsa au rythme du Titanic, et aujourd’hui on voit les conséquences.
Au fond, ce qu'il y a, c’est une perte notoire de pouvoir et d’autorité du patron de la propriété. Les USA vivent ce qui est, peut-être, la pire crise de leur histoire. C'est le meilleur moment pour récupérer l'indépendance perdue.
mercredi 25 mars 2009
Colombie : Le Statut Rural est déclaré inconstitutionnel
par ACIN, l'Association des Conseils Municipaux Indigènes du Nord du Cauca, Cxab Wala Kiwe
La Cour constitutionelle a déclaré que les peuples indigènes n'ont pas été consultés en amont
La monstruosité inventée par « Uribito » ignorait la Convention 169 de l'OIT et les droits constitutionnels indigènes
L’absence de consultation est aggravée par l’assassinat de 1.200 indigènes
Le principal instrument pour légaliser la spoliation des terres des déplacés est inconstitutionnel Lire l'article ici
Original : Declaran inconstitucional el Estatuto Rural
Les American Corners, consulats illégaux des USA au Venezuela, des centres de conspiration et de propagande
par Eva GOLINGER, 18/3/2009. Traduit par Esteban G., révisé par Fausto Giudice , Tlaxcala
Original : Los consulados ilegales de EEUU en Venezuela
Conférence d'Eva Golinger le mercredi 25 mars, 19h, à Montpellier, Salle Pétrarque, Esplanade : "Vers de nouvelles relations Amérique Latine-USA ?"(Dans le cadre de la Qunzaine latino-américaine du 23 mars au 4 avril : programme ici)
Jeudi 26 mars, 20h, Cinéma Comoedia, Sète : Projection-débat "Bruxelles-Caracas"
C’est vers la fin 2005 que l'ambassade des USA au Venezuela, alors dirigée par William Brownfield (aujourd’hui ambassadeur de Washington en Colombie), avait inauguré le premier de ce qui serait les quatre sièges de « consulats virtuels » US au Venezuela, qu’ils appellent « American Corners » (« Coins américains »). Ce ne sont pas des sièges diplomatiques typiques, puisque dans les pays où ils sont situés ils ne disposent d’aucune autorisation de la part du Ministère des Affaires Étrangères, et n’offrent pas de services aux citoyens usaméricains résidant dans ce pays. Des documents du Département d'État récemment déclassés suite à mes recherches, soulignent explicitement que ces « coins américains » ont pour intention de faciliter le dialogue et la relation « sans filtre » entre l'ambassade des USA et le peuple vénézuélien. En violation claire et flagrante de la loi internationale et particulièrement de la Convention de Vienne sur les relations consulaires, Washington essaye d’outrepasser l'autorité du gouvernement vénézuélien pour pouvoir établir des relations bilatérales directes avec des secteurs de la société vénézuélienne.
Depuis l'arrivée au pouvoir en 1998 du Président Chávez et de la Révolution Bolivarienne, Washington a essayé de miner la démocratie vénézuélienne à travers différentes actions déstabilisatrices, y compris avec le coup d’État d'avril 2002, le sabotage économique et pétrolier de 2002-2003, des guarimbas [troubles de rue à visée déstabilisatrice, NdR], des interventions électorales, une guerre médiatique et un flux constant de dollars aux groupes violents et antidémocratiques de l'opposition. Donc, lorsque l'ambassade des USA cherche à établir une relation « sans filtre » avec le peuple vénézuélien, on ne peut voir derrière cela que les mêmes intentions de toujours ; son objectif est de renverser le Président Chávez et de détruire la Révolution Bolivarienne.
Officiellement, les American Corners sont des programmes d'association entre l'ambassade des USA et certaines institutions locales qui créent de petits espaces, ou des « coins », avec accès à l’information sur les USA à travers Internet, des livres et des documentaires produits par le Département d'État (DOS). Le but est de créer une sorte de « consulat virtuel » qui ne soit pas formellement parrainé par le gouvernement des USA mais par une organisation, une association, une école, une bibliothèque ou une institution locales. En réalité, les American Corners constituent un autre instrument de propagande de Washington qui non seulement fonctionne comme rampe de lancement pour la guerre psychologique, mais également pour subvertir et violer les règlementations diplomatiques en établissant des sites d'accès « consulaire » dans un pays, sans l'autorisation du gouvernement hôte.
Les Corners sont supervisés de près par le Département d'État, celui-ci tient un registre sur leur efficacité. Le concept des American Corners a été créé au cours des années 90 et inauguré en Russie. L'idée était de préserver les avancées obtenues et le travail effectué pendant la Guerre Froide et de parvenir à ce que la présence de Washington passe inaperçue en Russie, dans le but de garantir que la propagande usaméricaine puisse continuer à influencer l'opinion publique.
En 2002, le Bureau de la Diplomatie et des Affaires Publiques du Département d'État a étendu le programme des American Corners, et il en existe aujourd'hui plus de deux cents dans le monde. La majorité ont été placés dans des ppays de l'Europe de l’Est, comme la Bulgarie et la Pologne ; en Asie comme l'Ouzbékistan, Kirghizstan, la Turquie, le Pakistan, l'Afghanistan, l'Indonésie et le Bangladesh ; ainsi qu’au Moyen-Orient, y compris Oman, entre autres. Le Venezuela est le premier pays de l'Amérique latine qui ait « bénéficié » fait de ce programme. Le 9 décembre 2005, William Brownfield, l’ambassadeur d’alors, avait inauguré le premier American Corner dans la ville de Barquisimeto, dans l’État du Lara, le siège étant dans le Collège d'Avocats de la région. Durant les six mois suivants, trois autres de ces consulats illégaux on été inaugurés dans les villes de Margarita, Maturín et Lecherías (État. Anzoátegui), presque tous situés dans les Collèges d'Avocats régionaux, sauf à Lecherías, où un espace avait été prêté dans les locaux de la mairie.
Logo des American Corners au Chili, où il y en a quatre. Actuellement, il y a 395 American Corners dans le monde, dont 18 en Amérique latine.
D’après les documents récemment déclassés, qui comprennent une série de contrats entre l'ambassade des USA au Venezuela et les hôtes, ainsi que d’autres rapports sur le fonctionnement de ces QG diplomatiques non autorisés, les American Corners au Venezuela reçoivent leur financement de la division des Affaires de l'Hémisphère Occidental du Département d'État et de l'ambassade. De fait, les entités hôtes, comme les collèges d’avocats ou les mairies, ont signé des contrats avec l'ambassade et reçoivent de l'argent du Département d'État. Ce fait les transforme en agents de Washington, financés et supervisés par un gouvernement étranger qui a gardé une position agressive contre le gouvernement vénézuélien pendant la dernière décennie. Les contrats entre l'ambassade et les hôtes vénézuéliens sont d’une durée de dix ans renouvelables et obligent l'hôte à fournir l’espace « pour la parfaite satisfaction» de l'ambassade « afin de donner toute capacité au Corner, y compris pour ses collections de matériels imprimés et électroniques, son accès public à Internet, et autres programmes et activités en liaison… »
Ensuite, le contrat souligne que l'ambassade fournira « … au Corner une collection de base sur les USA imprimée et en CD-ROM … À la discrétion du PAS [la section des affaires publiques de l'Ambassade] et avec l’assistance de la Bibliothèque, le PAS choisira et achètera de nouvelles publications imprimées et électroniques pour les incorporer à la collection du Corner, sur des thèmes en rapport avec : l’économie, la gestion, le commerce, les études américaines, l’enseignement de la langue anglaise, les sciences politiques, le droit et les sociétés démocratiques. Le PAS décide de fournir au Corner de multiples copies des publications produites par le Département d'État conçues pour la distribution publique… » Parmi d’autres choses, le siège « réalisera des programmes avec des conférenciers des USA… [et]… fournira l'information et les matériels sur les programmes, les dons et les opportunités éducatives qu'offre le gouvernement des USA. »
Autrement dit, ces American Corners sont des centres de propagande et des lieux de réunions du gouvernement des USA, établis sans autorisation. Ils sont illégaux. Ils servent d’espaces pour que Washington continue à promouvoir son agenda de déstabilisation du Venezuela sur le dos du gouvernement vénézuélien. Si le Venezuela ouvrait des sièges semblables aux USA sans l'autorisation de ce gouvernement, ils seraient fermés immédiatement et leurs employés usaméricains emprisonnés comme « des agents non autorisés d'un gouvernement étranger ». Alors pourquoi le gouvernement vénézuélien a-t-il laissé opérer ces acteurs et accepté ces lieux illégaux et nuisibles pendant plus de trois ans ? Il n'y a pas de raison pour qu’au Venezuela la porte à la conspiration soit ouverte. Le peuple mérite une meilleure protection contre ces actes qui attentent à sa volonté et minent le dur travail que nous faisons tous pour obtenir la justice sociale.
Bangalore, Inde, 1995. Photo David H. Wells/CORBIS
Guerre contre la terreur intérieure : la fin de l'Histoire juive
Original : War On Terror Within: The End of Jewish History
La question que je vais aborder aujourd’hui est probablement la chose la plus importante que j’aie jamais eu à dire au sujet de la brutalité israélienne et de l’identité juive contemporaine. Je suppose que j’aurais pu organiser mes idées en un ouvrage exhaustif ou sous la forme d’une analyse universitaire. Mais finalement, je vais faire tout à fait le contraire : je vais être aussi succinct et simple que possible…
Au cours des semaines écoulées, nous avons été les témoins d’une campagne génocidaire israélienne à l’encontre de la population civile palestinienne, dans la bande de Gaza. Nous avions déjà été les témoins de l’écrasement, par une des armées les plus puissantes au monde, de femmes, de vieillards et d’enfants. Nous avons vu, cette fois-ci, un ouragan d’armes non-conventionnelles éclatant au-dessus d’écoles, d’hôpitaux et de camps de réfugiés. Nous avions déjà vu et entendu parler de crimes de guerre. Mais, cette fois-ci, la transgression israélienne a été catégoriquement différente : elle a bénéficié du soutien de la quasi-totalité de la population juive d’Israël.
La campagne militaire de « Tsahal » à Gaza a bénéficié, en effet, du soutien de 94 % de la population israélienne. 94 % des Israéliens, apparemment, ont approuvé les raids aériens contre des civils. La population israélienne a suivi le carnage sur ses écrans de télévision ; elle a entendu les cris, elle a vu les hôpitaux et les camps de réfugiés en flammes et, pourtant, elle n’a pas été véritablement secouée par tout ce qu’elle a vu. Les Israéliens n’ont pas fait grand-chose pour arrêter leurs dirigeants impitoyables « démocratiquement élus ». En lieu et place, certains d’entre eux ont attrapé leur chaise longue, et ils sont allés s’installer sur les collines dominant la bande de Gaza, afin de suivre, de leurs propres yeux leur armée en train de transformer Gaza en un colisée hébraïque des temps modernes, débordant de sang. Et aujourd’hui même, alors que la campagne militaire semble terminée et que l’étendue du carnage perpétré à Gaza a été révélée, les Israéliens ne font montre d’aucun signe de remords. Comme si cela ne suffisait encore pas, tout au long de la guerre, les juifs du monde entier ont manifesté leur soutien à leur « État réservé aux seuls juifs ».
Un tel soutien populaire à des crimes de guerre caractérisés est absolument sans précédent. Les États terroristes tuent, certes, mais ils en conçoivent un minimum de honte. L’URSS de Staline l’a fait, dans quelques goulags au fin fond de la Sibérie, l’Allemagne nazie a exécuté ses victimes dans des forêts profondes et derrière des barrières de fil de fer barbelé. Dans l’État juif, les Israéliens massacrent des femmes sans défense, des enfants et des vieux en plein jour, en utilisant des armes non-conventionnelles ciblant des écoles, des hôpitaux et des camps de réfugiés…
Le niveau atteint par cette barbarie collective hurle son attente d’explication. La tâche qui nous attend peut être définie, sans hésitation, comme la quête d’une prise de conscience de la brutalité collective israélienne. Comment a-t-il pu se faire qu’une société (la société israélienne, en l’occurrence) ait pu ainsi s’arranger pour perdre prise sur tout sentiment de compassion et de pitié ?
La Terreur intérieure
Plus que par quoi que ce soit d’autre, les Israéliens et les communautés juives qui les soutiennent, sont terrorisés par la brutalité qu’ils trouvent au fond d’eux-mêmes. Plus les Israéliens sont brutaux, plus ils ont peur d’eux-mêmes. Cela s’explique, c’est simple : plus vous infligez de souffrance à autrui, plus vous êtes angoissés par la capacité mortifère potentielle que vous générez autour de vous. En gros, l’Israélien projette sur les Palestiniens, les Arabes, les musulmans et les Iraniens l’agressivité qu’il trouve en lui-même. Étant donné qu’il a été démontré, de la manière qu’on sait, que la brutalité israélienne n’a strictement aucune limite et que rien ne peut lui être comparé, en matière de brutalité, l’angoisse des Israéliens n’a d’égale que leur brutalité.
Apparemment, les Israéliens ont peur de constater que les malfrats, c’est eux. Ils sont engagés dans une bataille à mort contre la terreur qui les habite. Mais l’Israélien n’est pas le seul dans ce cas. Le juif de la diaspora qui manifeste son soutien à un pays qui balance du phosphore blanc sur des civils se retrouve coincé exactement dans le même piège destructeur. Étant le partisan exalté d’un crime gigantesque, il est horrifié par l’idée que la cruauté qu’il constate en lui-même puisse, éventuellement, se manifester un jour chez d’autres. Le juif diasporique qui soutient Israël est dévasté par la possibilité imaginaire qu’une intention brutale, similaire à la sienne propre, puisse un jour s’en prendre à lui. Toute la peur juive de l’antisémitisme se résume à cette préoccupation-là. Fondamentalement, la hantise juive de l’antisémitisme est la projection de la brutalité collective tribale sionocentrique sur l’Autre.
Il n’y a pas de conflit israélo-palestinien
Nous assistons, là, à la formation évidente d’un cercle vicieux, dans lequel l’Israélien et ses séides sont en train de se muter en une boule de feu insulaire vindicative, qu’alimente une certaine forme d’agressivité interne de nature explosive. Tout cela est fort révélateur. Les Palestiniens étant dans l’incapacité de répliquer militairement à l’agression et à la capacité destructrice israéliennes, nous sommes fondés à arguer du fait qu’il n’y a pas de conflit israélo-palestinien. Tout ce qu’il y a, c’est une psychose israélienne, dans laquelle l’Israélien est fracassé par l’anxiété que lève en lui le reflet de sa propre brutalité. Étant considérés comme les nazis des temps modernes, les Israéliens sont, du même coup, condamnés à voir un nazi en n’importe qui. De même, il n’y a strictement aucune montée d’antisémitisme. Le juif sioniste diasporique, simplement, est dévasté par la possibilité que quelqu’un, quelque part, soit aussi corrompu éthiquement et aussi impitoyable que lui-même a démontré qu’il l’est. En bref, la politique israélienne et le lobbying sioniste doivent être vus comme rien moins qu’une paranoïa collective sionocentrique, à la veille de virer à la psychose totale.
Existe-t-il un moyen de racheter le sioniste de son équipée sanglante ? Est-il possible de modifier le cours de l’histoire, de sauver les Israéliens et leurs partisans de la dépravation totale ? La meilleure façon, probablement, de poser cette question, c’est de demander s’il y a une façon de sauver les Israéliens et les sionistes d’eux-mêmes. Comme vous l’aurez sans doute deviné, je ne suis pas particulièrement intéressé par le sauvetage des Israéliens ou des sionistes. Toutefois, je comprends bien que le fait de sauver les sionistes de leur transgression serait susceptible d’apporter une perspective de paix à la Palestine, à l’Irak et, probablement, à nous tous. Ceux qui ne comprennent pas pourquoi doivent savoir qu’Israël n’est que la pointe émergée de l’iceberg. A la fin des fins, l’Usamérique, la Grande-Bretagne et l’Occident sont actuellement en proie à des formes similaires de "politique de la peur", qui est la conséquence directe de l’idéologie et des pratiques mortellement interventionnistes des néoconservateurs.
Le psy de Nazareth
Il y a, de cela, bien des années, nous dit-on, il y avait un Israélite qui vivait au milieu de ses frères, dans le pays de Canaan. Comme les Israéliens d’aujourd’hui, il était cerné par la haine, la vengeance et la peur. A un certain moment, il avait décidé de faire quelque chose, d’amener du changement à cette situation ; il avait pris conscience du fait qu’il n’y avait pas d’autre manière de combattre la brutalité que de rechercher la grâce. «Tends l’autre joue… », telle fut sa suggestion, fort simple. Ayant réussi à identifier la psychose de l’Israélite comme « une guerre de l’Israélite contre sa terreur intérieure », Jésus comprit que la seule façon de contrer la violence, c’est de se regarder dans un miroir, afin de rechercher la Bonté que nous avons en nous.
Il est tout à fait évident que c’est cette leçon administrée par Jésus qui a pavé la voie à la formation de l’éthique universelle occidentale. Les idéologies politiques modernes ont tiré les leçons de la vision chrétienne. La recherche normative, par Marx, de l’égalité, peut être vue comme une réécriture laïque de la notion christique de fraternité. Et pourtant, aucune idéologie politique n’est parvenue à intégrer la notion extrêmement profonde que Jésus avait de la grâce. Rechercher la paix, c’est, avant toute chose, rechercher quelqu’un, en soi-même. Alors que les Israéliens et leurs clones néocons aspireront toujours à réaliser la paix au moyen de la dissuasion, la véritable paix ne peut être atteinte qu’au moyen de la recherche de l’harmonie en soi-même.
Comme le suggérerait un psychanalyste lacanien, aimer ton voisin, c’est, en réalité, t’aimer toi-même en aimant ton voisin. L’Israélien est dans la posture diamétralement opposée. Étant donné que les Israéliens s’arrangent toujours pour démontrer, une fois après l’autre, guerre après guerre, qu’en réalité, ils s’aiment eux-mêmes en haïssant leurs voisins, bref : qu’ils ne s’aiment eux-mêmes qu’en haïssant, de manière générale. Ils haïssent pratiquement tout : le voisin, les Arabes, Chávez, les Allemands, l’Islam, les goyim, le cochon, le Pape, le Palestinien, l’Église, Jésus, le Hamas, les calamars et l’Iran. Dites un truc, ils le haïssent ! Force est bien d’admettre que le fait de haïr à ce point doit être quelque chose d’épuisant, à moins que cela ne leur procure du plaisir ? Et, de fait, le « principe de plaisir » israélien pourrait être articulé comme suit : ce principe conduit en permanence l’Israélien à rechercher son plaisir dans la haine qu’il ressent envers un autrui qu’il est en train de faire souffrir.
À ce stade, il convient de mentionner que la « Guerre contre la Terreur intérieure » n’est pas réellement une invention juive. Quiconque, pays, peuple ou individu, peut en devenir la proie. Les conséquences du massacre nucléaire barbare uqaméricain à Hiroshima et à Nagasaki ont fait du peuple usaméricain une collectivité terrorisée. Cette anxiété collective est connue sous le nom de « guerre froide ». L’Amérique n’est pas encore sortie de la peur qu’il puisse y avoir quelqu’un, quelque part, qui puisse être aussi impitoyable qu’elle a prouvé qu’elle peut être. Dans une certaine mesure, l’opération « Choc et effroi » (« Shock and Awe ») a eu un effet très semblable en Grande-Bretagne et aux USA. Cela a conduit à la création de masses horrifiées, aisément manipulables par une élite hautement motivée. C’est ce type de politique, exactement, que l’on appelle la « politique de la peur ».
Et pourtant, au sein du discours occidental, un mécanisme correctif existe. Contrairement à l’État juif, qui est en train d’être radicalisé par sa paranoïa auto-entretenue, en Occident, le mal est, peu ou prou, contré, et parfois contenu. Le crime est dénoncé et l’espoir de paix est, d’une certaine manière, réinstauré, jusqu’à plus ample informé. Non que je retienne mon souffle, dans l’attente d’un quelconque changement qu’apporterait le président Obama, car une chose est tout à fait évidente : si Obama a été élu, ça n’est certainement pas pour qu’il apporte un changement quelconque. Obama est un symbole de notre tentative sincère de donner un coup d’arrêt au mal. Dans l’État juif, non seulement cela ne se produit pas : cela ne pourra jamais arriver. La différence entre Israël et l’Occident saute aux yeux. En Occident, l’héritage chrétien nous donne la possibilité de formuler un espoir, fondé dans une croyance en une bonté universelle.
Toutefois, nous sommes menacés en permanence d’être exposés au mal ; mais nous avons tendance à croire que la bonté, en fin de compte, s’imposera. En face, dans le discours hébraïque, la Bonté est la propriété exclusive des élus. Les Israéliens ne voient nulle bonté, ni nulle gentillesse en leurs voisins ; ils ne voient en eux que des sauvages et une entité menaçante pour leur vie même. Pour les Israéliens, la gentillesse est leur propriété, c’est à eux, et, incidemment, ils sont, aussi, innocents, et des victimes. Dans le discours universel occidental, la bonté n’appartient à aucun peuple ni à aucune nation en particulier : elle appartient à tous et à personne, en même temps. Dans l’héritage universel occidental, la Bonté se trouve en chacun d’entre nous. Elle n’appartient ni à un parti politique, ni à une idéologie. La notion transcendante de grâce et d’un Bon Dieu est là, en chacun de nous – elle est, en permanence, à portée de notre main.
Quelle sorte de Père est-ce là ?
« Alors, le Seigneur, ton Dieu, te conduira sur la terre dont il avait promis à tes ancêtres Abraham, Isaac et Jacob qu’il te la donnerait - une terre avec des grandes villes magnifiques que tu n’as pas construites, des maisons emplies de joyaux que tu n’as pas accumulés, des citernes que tu n’as pas creusées, des vignes et des oliveraies que tu n’as pas plantées – et tu mangeras à satiété ». [Deutéronome 6:10-11]
« Quand le Seigneur, ton Dieu, te conduira sur la terre où tu entreras afin de la posséder en chassant devant toi des peuples innombrables… alors, tu devras les détruire jusqu’au dernier. Ne conclus aucun pacte avec eux, et ne fais preuve d’aucune pitié envers eux. » [Deutéronome 7:1-2]
Ici, nous devons nous efforcer de comprendre la cause première de l’absence grave de compassion dans le discours israélien et au sein des lobbies qui le soutiennent. Je pense qu’une élaboration sur la relation troublée entre les juifs et leurs différents dieux peut apporter un peu de lumière à cette problématique. Il est parfaitement évident que la liste s’allongeant sans cesse des « Dieux », des « Idoles » et des « figures paternelles » juifs est quelque peu problématique, tout au moins, dès lors qu’il est question de morale et de gentillesse. C’est la relation même entre « le fils » et le « père a-moral » qui doit être explorée.
La philosophe Ariella Atzmon (qui se trouve être ma mère) qualifie la complexité du commencement vicié de « syndrome de Fagin ». Le personnage Fagin, imaginé par Charles Dickens, est un « kidsman », un exploiteur d’enfants - un adulte qui recrute des enfants et leur apprend à devenir des pickpockets et des voleurs, et qui procure le logis et la nourriture à ces enfants, en échange du butin de leurs larcins. Bien que ces enfants ne puissent être que reconnaissants envers leur maître, ils ne peuvent aussi que le mépriser pour avoir fait d’eux des voleurs et des pickpockets. Les gamins prennent conscience du fait que les biens que possède Fagin ont tous été volés, et que sa gentillesse est loin d’être sincèrement honnête ou pure. Tôt ou tard, les gamins se retourneront contre leur maître, Fagin, dans une tentative de se libérer du piège immoral où il les a fait tomber.
Vu sous l’angle de la relation filiale, le dieu biblique juif, Jehova, ne diffère en rien de ce que nous pouvons observer dans le cadre du syndrome de Fagin. Le père d’Israël, en effet, conduit son peuple à travers le désert vers la Terre promise, afin que celui-ci puisse en voler et piller les autochtones. Mais ce n’est pas exactement, là ce qu’on attendrait d’un père moral, ou d’un «Dieu bon ». Par conséquent, autant les fils d’Israël aiment Jehova, autant ils ne peuvent qu’être légèrement soupçonneux à son endroit, au chapitre de la tendresse. Aussi ne devons-nous pas être surpris par le constat que, tout au long de l’histoire juive, les juifs qui se sont retournés contre leur père céleste sont légion.
Toutefois, si l’on a à l’esprit la perception laïque fort répandue selon laquelle les Dieux, de fait, sont inventés par les hommes, on peut se demander ce qui conduit à l’invention d’un « Dieu a-moral » tel que celui-là ? Qu’est-ce qui peut bien faire que des gens respectent les règles édictées par un Dieu de cet acabit ? Il serait intéressant aussi de découvrir quelle sorte de Dieux alternatifs les juifs avaient adoptés, ou carrément inventés, durant les périodes où ils avaient mis Jehova de côté.
Depuis leur émancipation, nombreux ont été les juifs à se dissocier de la structure tribale traditionnelle, ainsi que du judaïsme rabbinique. Beaucoup se sont fondus dans les réalités ambiantes, laissant tomber leur statut autoproclamé d’élus et devenant des êtres humains ordinaires. Beaucoup d’autres juifs mirent un point d’honneur à laisser tomber Dieu, mais tout en continuant à entretenir leur affiliation, marquée au coin de l’appartenance raciale. Ceux-ci décidèrent de fonder leur appartenance tribale sur des terrains ethnique, racial, politique, culturel et idéologique, et non plus sur le précepte judaïque. Bien qu’ils eussent laissé tomber Jehova avec perte et fracas, ils s’attachèrent à adopter une vision séculariste, qui ne tarda pas à se muer en un précepte monolithique ne différant en rien d’une religion. Tout au long du XXème siècle, les deux idéologies politiques ayant le statut d’une religion à avoir eu le plus de succès auprès des masses juives furent le marxisme et le sionisme.
Le marxisme peut être défini come une idéologie laïque, universelle et éthique. Toutefois, durant le processus de sa transformation en précepte tribal juif, le marxisme a réussi le tour de force de perdre jusqu’à la dernière trace de son humanisme ou de son universalisme. Comme on le sait, l’idéologie et la pratique sionistes furent, à leurs débuts, largement dominées par des juifs de gauche, qui se considéraient comme les authentiques successeurs et adeptes de Marx. Ils croyaient sincèrement que le fait de célébrer leur renaissance nationale juive aux dépens des Palestiniens était une mission socialiste légitime.
Et très significativement, leurs ennemis, les partisans antisionistes du Bund, le mouvement ouvrier juif est-européen, ne croyaient pas vraiment au pillage institutionnalisé des Palestiniens. Non, eux, ils étaient convaincus que le fait d’exproprier les riches Européens était une grande mitzvah universelle, sur le chemin de la justice sociale…
Voici, ci-après, quelques lignes de leur hymne :
"Nous jurons que notre haine sera éternelle
Contre ceux qui volent et assassinent les pauvres :
Le Tsar, les maîtres, les capitalos.
Notre vengeance sera expéditive et impitoyable !
Faisons-en le serment, tous, ensemble : « A la vie, à la mort ! "…
Sans nous égarer dans des considérations afférentes à la morale ou à l’affiliation politique, il est parfaitement évident que l’hymne marxiste juif est saturé, du début jusqu’à la fin, de « haine » et de « vengeance ». Autant les juifs furent des exaltés de Marx, du marxisme, du bolchevisme et de l’égalité, autant la fin de l’histoire est connue. Les juifs ont laissé tomber Marx, en masse, depuis fort longtemps. Ils ont, en quelque sorte, laissé la révolution à quelques Goyim éclairés, tels qu’Hugo Chávez et Evo Morales, ces leaders qui ont authentiquement intégré la véritable signification de l’équité et de la morale universelles.
Même si, à la fin du XIXème et au début du XXème siècle, le marxisme avait trouvé nombre d’adeptes chez les juifs européens, après l’Holocauste, c’est le sionisme qui est devenu, progressivement, l’expression de la juiverie mondiale. A l’instar de Fagin, les idoles et les dieux sionistes – Herzl, Ben Gourion, Nordau, Weizmann – promirent à leurs adeptes un nouveau départ a-moral. Le vol des Palestiniens fut leur moyen de s’acheminer vers une justice historique qui leur était due depuis longtemps. De l’Ancien Testament, le sionisme fit un registre cadastral. Mais, là encore, comme dans le cas de Jehova, le Dieu Sio transforma le juif en voleur, en lui promettant les biens d’autrui. C’est cela qui explique, en soi, le ressentiment des Israéliens envers le sionisme et l’idéologie sioniste. Les Israéliens préfèrent se voir comme les résidents naturels du territoire (dit israélien, NdT), plutôt que comme des pionniers d’un projet colonial antimoral propre à la diaspora juive. Le juif israélien entretient sa prise de position politique au moyen d’une forme grave d’abandon moral. Cela explique sans doute le fait qu’autant les Israéliens adorent leurs guerres, autant le fait de les faire les révulse. Ils ne sont pas prêts à mourir pour une grande idéologie abstraite, telle que la « nation juive » ou le « sionisme ». À une écrasante majorité, ils préfèrent nettement déverser du phosphore blanc et des bombes à fragmentation sur des civils, en restant à bonne distance.
Toutefois, tout au long de l’histoire relativement brève du nationalisme juif contemporain, le Dieu Sio est devenu ami avec quelques autres Dieux et idoles cachères. Dès 1917, Lord Balfour promettait aux juifs qu’ils créeraient leur foyer national en Palestine. Vous l’aurez deviné : comme dans le cas de Jehova, Lord Balfour a fait des juifs des pillards et des voleurs, en leur faisant cette promesse outrageusement amorale. Il promit aux juifs la terre de quelqu’un d’autre : pouvait-il, fondamentalement, y avoir pire début ? Bien entendu, il n’a pas fallu bien longtemps pour que les juifs se retournent contre l’Empire britannique. En 1947, rebelote : les Nations Unies firent exactement la même erreur insensée, qui donna naissance à l’ « État réservé aux seuls juifs », de nouveau sur le dos des Palestiniens. Elles légitimèrent le vol de la Palestine, « au nom des nations » (!). Comme dans le cas de Jehova, qui avait fini par être mis sur la touche, il ne fallu pas longtemps aux juifs pour se retourner contre lesdites Nations Unies.
« Peu importe ce que les Goyim disent, seul compte ce que font les juifs ! » avait dit le Premier ministre israélien David Ben Gourion.
Récemment, les Israéliens ont trouvé le moyen de mettre sur la touche jusqu’à leurs amis les plus complaisants, à la Maison-Blanche. À la veille de la dernière élection présidentielle usaméricaine, des généraux israéliens avaient été filmés en train de dénoncer le Président Bush, qui aurait « porté atteinte aux intérêts israéliens en étant favorable à Israël de manière outrancière » (dixit le général de brigade à la retraite Shlomo Brom). Les généraux israéliens blâmaient Bush, essentiellement, pour n’avoir pas empêché Israël de détruire ses voisins. La morale de cette histoire est parfaitement claire : les sionistes et les Israéliens finissent, inexorablement, par se retourner contre leurs Dieux, leurs idoles, leurs pères et tous ceux qui tentent de les aider. Tel est le sens du syndrome de Fagin, dans le contexte politique israélien : ils finiront toujours, tôt ou tard, par se rebeller contre leurs « pères ».
A mes yeux, de tous les systèmes juifs de croyance, le plus intéressant est la Religion Holocaustique, que le philosophe israélien Yeshayahu Leibowitz a qualifiée, à juste titre, de « nouvelle religion juive ». Son aspect le plus intéressant, c’est son Dieu, qui n’est autre que « le Juif ». L’adepte juif ce de précepte dogmatique récemment formé croit au « Juif », l’homme qui s’est sauvé lui-même. Celui qui a « survécu » à l’événement du « génocide suprême ». Les adeptes de cette religion croient en « le Juif », cette victime souffrante et « innocente », qui est retournée dans sa « terre promise » et célèbre désormais son narratif à succès de résurrection. Jusqu’à un certain point, à l’intérieur du discours religieux holocaustique, le juif croit en « le Juif », exprimé en tant que son pouvoir et ses qualités éternelles. Dans ce cadre religieux tout récent, la Mecque est Tel-Aviv et le Saint Sépulcre est le Musée de l’Holocauste Yad Vashem.
Cette nouvelle religion a de nombreux sanctuaires (des Musées), répartis dans le monde entier. Elle a aussi de nombreux prêtres, qui répandent le message partout et punissent les éléments récalcitrants. D’un point de vue juif, la religion holocaustique est l’expression totalement transparente du narcissisme. C’est là où le passé et l’avenir se fondent, dans un présent faisant sens, c’est le moment où l’histoire est traduite en praxis. Que ce soit consciemment ou non, quiconque s’identifie politiquement et idéologiquement (plutôt que religieusement) en tant que juif est, sur le plan pratique, en train de succomber à la religion holocaustique et devient, de facto, un adepte de sa figure tutélaire paternelle : « le Juif ». Et pourtant, on pourrait se demander : « Et la tendresse, bordel ? » Y a-t-il une once de bonté, dans cette « figure paternelle » flambante neuve ? Y a-t-il une quelconque grâce, dans ce narratif de victimitude innocente célébrée quotidiennement sur le dos du peuple palestinien ?
S’il est une fin, dans l’histoire, c’est bien la fin ultime de l’Histoire juive qu’incarne la religion de l’Holocauste. A la lumière de la religion holocaustique, le « Père » et le « Fils » sont enfin réunis. Dans le cas d’Israël et du sionisme, en tout cas, ils fusionnent dans un amalgame d’idéologie et de réalité génocidaires.
A la lumière de la religion holocaustique et de son éthos de survivance épique, l’État juif se considère légitimé à déverser du phosphore blanc enflammé sur des femmes et sur des enfants qu’ils ont mis en cage dans une prison à ciel ouvert d’où nul ne saurait s’évader. Très regrettablement, les crimes commis par l’État juif le sont au nom du peuple juif et au nom de leur histoire trouble, jalonnée de persécutions ; la religion holocaustique donne vie à ce qui semble être l’ultime forme possible de brutale incarnation insulaire.
Tout au long de leur histoire, les juifs ont rejeté nombre de Dieux : ils ont laissé tomber Jehova, ils ont jeté Marx aux orties, certains d’entre eux n’ont jamais mordu à l’hameçon du sionisme. Mais, à la lumière de la religion holocaustique, tout en ayant à l’esprit les scènes d’horreur de Gaza, de Jénine et du Liban, le juif devra peut-être maintenir la tradition et laisser tomber [son nouveau Dieu, j’ai nommé] « le Juif ». Il devra accepter le fait que le nouvel idéal paternel du moment a été formé à sa propre image. Plus préoccupant est le fait, accablant, que le nouveau père, c’est désormais prouvé, est en soi une invitation au meurtre. Apparemment, le nouveau père est le Dieu maléfique suprême de toute la série.
Je me demande combien il y aura de juifs assez courageux pour jeter aux orties leur figure paternelle ésotérique toute neuve ? Seront-ils assez courageux pour rejoindre le reste de l’humanité, en adoptant un discours éthique universel ?
Quant à la question de savoir si le juif laissera tomber « Le Juif », seul le temps le dira.
Je précise simplement (pour dissiper de derniers doutes) qu’en ce qui me concerne, je me suis débarrassé de mon « Juif intérieur » depuis belle lurette, et que je m’en porte, ma foi, fort bien…
La vie de Miguel Enríquez et le MIR
Miguel Enríquez aurait eu 65 ans le 27 mars 2009. Mais il est mort, âgé d’à peine 30 ans, le 5 octobre 1974, à Santiago du Chili, assassiné par les sbires de la dictature militaire qui s’était abattue sur le Chili le 11 septembre 1973.
Miguel Enríquez était l’un des fondateurs et le dirigeant du MIR, le Mouvement de la gauche révolutionnaire. Il avait consacré les dix dernières années de sa courte vie à la lutte révolutionnaire.
Pedro Naranjo Sandoval, qui fut un militant du MIR, dont il s’est fait l’historien, nous raconte la vie de Miguel Enríquez.
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Source : La vida de Miguel Enríquez y el MIR
Article original publié en 2004
Sur l’auteur
lundi 23 mars 2009
MÉMORANDUM SUR LE CONTENTIEUX FRANCO-COMORIEN À PROPOS DE L’ÎLE COMORIENNE DE MAYOTTE
> Savez-vous que depuis plus de 33 ans la France ne respecte pas le droit international, en occupant illégalement l’île comorienne de Mayotte, refusant, à ce sujet, de se conformer à la Charte de l’ONU et à la vingtaine de résolutions votées contre elle ?
> Savez-vous que la France est en train de départementaliser une partie du territoire d'un État souverain membre de l'ONU rendant, ainsi, l'Europe, complice d'une forfaiture grave pour la paix du monde et qui fera certainement date ?
> Savez-vous, que contrairement à la propagande distillée, il s'agit d'une politique délibérée de l'État français visant à entretenir la "France des trois océans" par les colonies ultramarines, au prix des droits humains piétinés et de la vie de milliers de Comoriens sacrifiés ? > C'est donc votre affaire, à vous aussi. Nous vous appelons à vous informer, à prendre position et à agir avec nous pour que la force du droit triomphe sur le droit de la force !
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Avec Israël, jamais il n’y aura de paix- Interview avec Khaled Meshaal, leader du Hamas en exil
EXCLUSIF: Le leader du Hamas en exil s’exprime. Il annonce un conflit imminent, et cela parce que Tel Aviv, dit-il, n’est pas intéressé à écouter les raisons des Palestiniens. Et des USA, ne sont venus que des mots. Entretien avec Khaled Meshaal à Damas publié dans l’hebdomadaire italien L’Expresso.
Au nom de Dieu, clément et miséricordieux, j’aimerai poser la première question. Est-il possible qu’après la guerre de Gaza et notre résistance héroïque, Israël puisse continuer à ne pas comprendre que le processus de paix ne peut se passer du Hamas… ? Khaled Meshaal, leader du Hamas, exilé depuis plus de 40 ans, lance cette question avec un air de défi. En dépit des pertes importantes (la mort de 1400 Palestiniens), il revendique la victoire pour avoir amené les Israéliens à décider de retirer leurs troupes. Mais à court terme il ne se fait pas d’illusions. Avec Benjamin Netanyahou aux portes du nouveau gouvernement, in ne s’attend qu’à plus d’hostilités de la part d’Israël. Et ne nourrissant aucune expectative quant aux premiers pas de Barack Obama, il annonce la volonté de poursuivre sur le chemin de la force, « le seul langage que craint Israël et qui peut donner des résultats ».
Cette interview exclusive de l’Expresso, obtenue après des négociations compliquées entre Beyrouth et la capitale syrienne, est la première que Meshaal concède à la presse écrite après la guerre. Nous nous sommes réunis avec lui dans un endroit archi-blindé de la banlieue de Damas, ou on nous a conduit dans une voiture aux vitres teintées. Devant le portail, des militants armés avec des kalashnikov. Des mesures de sécurité imposées par le nombre important de dirigeants du mouvement éliminés par Israël (45). Le chef, en costume gris et sans cravate, se montre très cordial et relax. Il conserve tout le temps le flegme, dans une conversation qu’il entame en parlant de Netanyahou, qui a été chargé de former le nouveau gouvernement, le même chef de gouvernement qui avait envoyé des gens du Mossad à Amman en 1997 pour l’empoisonner. "C’est Netanyahou qui avait commandité mon assassinat manqué, mais il est surtout responsable, comme le reste des chefs de gouvernement israéliens, d’avoir attenté à la vie de tout le peuple palestinien. Entre les positions du Likoud, de Kadima et des tracaillistes, il n’y a que des nuances, pas de différences de fond. Depuis 60 ans il n’y a pas eu un seul gouvernement israélien qui n’ait pas commis de crime contre nous. Il est préférable d’affronter un leadership conservateur, qui poursuit clairement son but, que l’hypocrisie des travaillistes, qui feignent de s’engager dans le processus de paix mais qui sont ceux qui, lorsqu’ils gouvernaient, ont construit la majorité des colonies en Cisjordanie."
Mais si le Hamas n’ouvre pas le dialogue avec Netanyahou, n’allons-nous pas vers une autre guerre?
Nous ne sommes pas préoccupés par une nouvelle guerre. Jamais notre peuple ne sera vaincu et jamais il ne se rendra. Le défi nous donne des forces, car eux ont peur de mourir, pas nous. La paix ne sera possible que lorsqu’il y aura une volonté internationale qui fera pression en faveur de nos droits. L’objectif reste toujours la création d’un État palestinien avec Jérusalem-Est comme capitale, le retour des Israéliens aux frontières antérieures à la guerre de 67 et le droit au retour des réfugiés. Nous ne pouvons pas accepter moins que cela. Est-ce qu’il y a eu un seul gouvernement d’Israël qui ait considéré comme juste de prendre en considération nos aspirations ? Ils disent toujours non à tout et font semblant d’être intéressés à une solution. Alors, que reste-il à négocier ?
L’État hébreu se confronte avec ANP et le Fatah. Comment le Hamas peut-il espérer qu’il y ait de la compréhension s’il continue à lancer des roquettes sur Israël ?
C’est une bonne question qui me donne l’opportunité d’éclaircir pour quelle raison la trêve de six mois n’a pas été prolongée après être arrivée à échéance en décembre. Israël s’était engagé à mettre fin au siège et à ouvrir les passages aux frontières. Il n’a respecté aucun de ces engagements. Ils veulent nous asphyxier, nous reléguer dans un « bantoustan ». Comment peut-on parler de trêve lorsque l’on se trouve en état de siège ? Pour garantir sa sécurité, Israël s’obstine dans l’erreur de parier sur la défaite militaire de notre peuple. J’ai étudié la physique et je suis convaincu que la Loi de Newton peut être appliquée également aux relations politiques : à chaque action correspond une réaction égale et contraire. Lorsque l’agression s’arrêtera, notre résistance s’arrêtera aussi. Mais si portes restent toujours fermées, la seule issue, et j’insiste, c’est la lutte.
Ce qui vous laisse isolés.
Le monde devra bien finir un jour par ouvrir les yeux. La communauté internationale ne voit toujours que nos roquettes en ignorant leurs F-16 et leurs bombes au phosphore. Israël profite de l’appui a priori des Usaméricains, du peu de crédibilité accordé à l’ONU, fragilisée par les pressions de Washington, et de la nébulosité totale de l’Europe, qui e montre inerte ou timide. Comment est-il possible qu’autant de leaders européens restent impassibles alors que las valeurs de bases de la démocratie - liberté, droits humains- sont piétinées? Comment est-il possible qu’ils ne se rendent pas compte qu’avec une force populaire comme le Hamas on ne peut pas ne pas négocier ?
Mais avec Obama le tableau est en train de changer.
Nous l’espérons tous. Mais il faut un changement substantiel. Obama parle avec un langage nouveau, mais je ne sais pas si cela suffira. C’est une politique nouvelle qui est nécessaire.
Si vous pouviez rencontrer Obama, que lui diriez-vous?
Le rencontrer ? Mais il ne m’a même pas rayé de la liste des terroristes ! Mais il est certain que s’il ne traite pas avec le Hamas, Obama n’ira pas loin non plus. De toute façon, je l’inviterais à considérer la possibilité d’une volte-face. On ne peut pas s’aligner sur Israël en ignorant les droits des autres peuples. Ce changement d’approche ne serait pas seulement bénéfique pour la Palestine, mais pour tout le Moyen-Orient et même pour les USA, qui sont parties prenante au conflit et, si la perspective de paix s’évanouit, ils seront les premiers à y perdre. Malheureusement, les premiers signes ne sont pas très encourageants. Le sénateur John Kerry, en visite à Gaza, a été choqué par la destruction, mais il a insisté sur le droit d’Israël à se défendre.
Comment le nier? Israël paye depuis de très nombreuses années un énorme tribut de sang innocent. D’abord avec les attentats suicides, maintenant avec le tir des roquettes, même si au cours de la dernière guerre il y a eu une énorme disproportion entre vos pertes et les leurs.
Nous ne sommes pas les sanguinaires qu’ils dépeignent. Nous ne voulons pas de victimes innocentes, ni des leurs ni des nôtres. Mais la question palestinienne s’est transformée en une grave pathologie. Et celui qui tente de diagnostiquer les causes avec honnêteté, n’aura d’autre solution que de reconnaître que l’occupation est le premier facteur. Nous, la seule chose que nous pouvons faire, c’est réagir.
La communauté internationale prêterait plus d’attention à vos revendications si vous reconnaissiez Israël.
Après la barbarie de la récente guerre, croyez-vous que ce soit le bon moment ? Israël jouit de trop de reconnaissances. Celui qui doit être reconnu est le peuple palestinien.
Il y en a qui disent qu’après la guerre de Gaza, une partie des gens tournent le dos au Hamas.
Je peux vous assurer que notre popularité à significativement augmenté à Gaza, en Cisjordanie et dans tout le monde arabe. Nous ne nous sentons pas isolés. Et nous ne sommes pas non plus enfermés dans un ghetto. Les USA nous ont étiquetés créatures de l’Iran ou de la Syrie. Nous connaissons bien ces instruments pour nous dénigrer. Mais nous considérons que les USA ne sont pas un juge impartial. Nous laissons les portes grandes ouvertes à celui qui veut nous aider. Et nous demandons à nos opposants qu’ils nous disent avec qui ils ont l’intention de négocier la paix, puisqu’ils ne veulent pas légitimer le Hamas, qui est parvenu au pouvoir grâce à des élections démocratiques.
Dans les territoires, il y en a qui vous reprochent d’avoir perdu le contact avec la Palestine. Le groupe qui dirige le Hamas serait depuis trop longtemps en exil.
Oui, il y en a qui l’insinuent. Mais ce n’est rien d’autre qu’une spéculation. Nous sommes tous les fils de la Palestine. Moi, je ne peux retourner à cause de l’occupation. Et à mon image, tous les dirigeants de l’OLP ont du vivre beaucoup d’années en exil, pas par choix, mais parce qu’ils y étaient contraints e forcés.
À Gaza il y a toujours l’incertitude. Olmert subordonne la trêve à la libération du soldat Shalit.
La requête avait déjà irrité les médiateurs égyptiens et elle a été catégoriquement rejetée. Olmert est un hypocrite. C’est seulement maintenant qu’il se souvient de son soldat. Nous n’acceptons pas de chantages. Nous sommes en faveur de la libération, mais seulement en échange avec des prisonniers palestiniens, qui sont au nombre de 12.000, y compris des enfants, des vieux et des malades.
Si Marwan Barghouti était libéré, l’objectif de la réconciliation serait-il plus facile à atteindre ?
Nous espérons qu’ils le libèrent. Mais personne ne peut résumer à soi tout seul toute une cause.
Aussi à l’intérieur de la galaxie palestinienne il y a besoin de détente. Est-il possible que le Hamas et le Fatah plus modéré puissent de nouveau s’entendre ?
Les divergences peuvent être dépassées, à condition que quelques règles soient respectées. Il est nécessaire que les frères du Fatah respectent les résultats des urnes. Et puis consolider les bases de la démocratie à l’intérieur de l’Autorité Palestinienne. Le principe indéfectible à suivre est que tous nous défendions en premier lieu les intérêts des Palestiniens. Il faut établir que nos forces de l’ordre soient au service de la sécurité de la Palestine et non – comme c’est le cas sous la houlette du général usaméricain Keith Dayton – de celle d’Israël.