Démêler un
écheveau comme celui de la gestion européenne de la crise est devenu
toujours plus difficile. Et l'exercice consistant à la raconter est
devenu encore plus difficile. Je m'explique.
La mise en place de la nouvelle Commission n'a rien changé à
l'approche par les sommets européenne du thème de l'austérité. Aucun des
nouveaux commissaires n'a jusqu'ici soufflé mot sur la nécessité de
revoir les protocoles rigides du pacte budgétaire en vigueur, et encore
moins d'examiner l'hypothèse - à ce jour la plus sérieuse – d'une
restructuration de la dette. En revanche, on a droit à un flot de
paroles sur la croissance, l'investissement et l'emploi, un véritable
déluge. On a l'impression d'être plongés dans un scénario orwellien, où
une forme très sophistiquée de novlangue masque systématiquement,
scientifiquement, de formules inappropriées des choix (et des non-choix)
qui vont dans la direction opposée à celle officiellement déclarée.
De Draghi à Juncker, en passant par les comparses qui peuplent la scène politique nationale dans les pays membres, on n'en finit plus de gloser sur le caractère intenable de «la rigueur comme fin en soi», sur la nécessité de «relancer l'économie», de «créer de nouveaux emplois », alors que, dans la pratique, on reste retranchés, et subordonnés, dans la défense à outrance de l'actuelle gouvernance communautaire, dont l'essence fondamentale et indécrottable réside justement dans la rigueur et la surveillance pointilleuse des budgets publics.
Ce qui a tenu la vedette ces jours-ci dans le débat politique européen est le soi-disant "Plan Juncker", le projet présenté par le président de la Commission pour relancer l'économie et l'emploi dans l'UE. Compte tenu de la gravité de la crise qui nous tenaille et les chiffres du chômage qui font froid dans le dos (20 millions rien que dans la zone euro, deux fois plus qu'il y a cinq ans), cette opération, plus qu'inadéquate, est une véritable gifle à l'intelligence des citoyens européens.
Peut-être-être l'ancien Premier ministre du Luxembourg a-t-il pris conseil auprès d'un pool d'alchimistes, les seuls qui auraient pu le convaincre que €21 milliards d'Euros peuvent être transformés par magie en 315, et qu'ils seraient suffisants pour remonter la pente et faire face à la stagnation et au chômage. Et ce n'est pas tout. Même sur l'origine des 21 milliards il y a à dire et à redire: 16 milliards devraient être mis à disposition par l'Union et le reste par la Banque européenne d'investissements. Sur ces 16 milliards, 8 seraient transférés d'autres chapitres du budget européen, en les retirant de fait de projets déjà financés dans le passé, alors que les 8 autres devraient être tirés on ne sait comment ni d' où.
L'expérience: les 21 milliards seraient versés dans un «Fonds européen pour les investissements stratégiques» (FEIS), qui servirait de garantie pour demander 63 autres milliards aux marchés, auxquels s'ajouteraient des cofinancements privés et publics jusqu'à ce qu'on atteigne les fatidiques 315 milliards. Bref, du vent. Et d'argent frais, de cash, pas même l'ombre. Avec la circonstance aggravante que les États membres devraient également y participer avec des fonds propres. Mais, on applaudit. Renzi : "C'est là une victoire, aussi italienne. Il y a quelques mois, personne n'avait le courage de parler de croissance et d'investissements". Monti: «C'est un changement culturel tardif, mais très grand. L'Europe regarde enfin vers l'avenir". Merkel est évidemment prudente, dans le classique jeu rôles: "En principe d'accord".
Mais de quoi parlent-ils donc? Dans leur désinvolture, ils ressemblent de plus en plus aux passagers du Titanic, que, entre un bal et l'autre, allaient inexorablement au-devant de la tragédie. 315 milliards, en admettant qu'ils seraient immédiatement disponibles, ne réussiraient pas à changer grand-chose vu les conditions dans lesquelles nous sommes, à plus forte raison s'il s'agit de ressources entièrement aléatoires, qui restent à vérifier. Mais de plus, l'objectif même d'un million d'emplois de plus (1,3 millions pour être précis), quel sens peut-il avoir dans une mer de chômeurs qui dans l'UE à 28, a maintenant atteint les millions ? Peut-on vraiment croire que l'on peut sortir de la crise par des annonces, c'est-à-dire avec les mêmes politiques qui jusqu'à présent en ont marqué dramatiquement la gestion?
D'un point de vue rationnel, tout cela apparaît incompréhensible. Cherchons le secours de George Orwell: «La guerre, c'est est la paix, la liberté, c'est l'esclavage, l'ignorance, c'est la force ... l'austérité, c'est est expansion, la récession, c'est la croissance...". Et le but ? À part celui de démanteler ce qui reste du «modèle social européen», de réorganiser notre société en fonction de l'intérêt de l'entreprise et du capital financier, je n'en vois pas d'autres. Autrement, ce serait de la folie à l'état pur.
De Draghi à Juncker, en passant par les comparses qui peuplent la scène politique nationale dans les pays membres, on n'en finit plus de gloser sur le caractère intenable de «la rigueur comme fin en soi», sur la nécessité de «relancer l'économie», de «créer de nouveaux emplois », alors que, dans la pratique, on reste retranchés, et subordonnés, dans la défense à outrance de l'actuelle gouvernance communautaire, dont l'essence fondamentale et indécrottable réside justement dans la rigueur et la surveillance pointilleuse des budgets publics.
Ce qui a tenu la vedette ces jours-ci dans le débat politique européen est le soi-disant "Plan Juncker", le projet présenté par le président de la Commission pour relancer l'économie et l'emploi dans l'UE. Compte tenu de la gravité de la crise qui nous tenaille et les chiffres du chômage qui font froid dans le dos (20 millions rien que dans la zone euro, deux fois plus qu'il y a cinq ans), cette opération, plus qu'inadéquate, est une véritable gifle à l'intelligence des citoyens européens.
Peut-être-être l'ancien Premier ministre du Luxembourg a-t-il pris conseil auprès d'un pool d'alchimistes, les seuls qui auraient pu le convaincre que €21 milliards d'Euros peuvent être transformés par magie en 315, et qu'ils seraient suffisants pour remonter la pente et faire face à la stagnation et au chômage. Et ce n'est pas tout. Même sur l'origine des 21 milliards il y a à dire et à redire: 16 milliards devraient être mis à disposition par l'Union et le reste par la Banque européenne d'investissements. Sur ces 16 milliards, 8 seraient transférés d'autres chapitres du budget européen, en les retirant de fait de projets déjà financés dans le passé, alors que les 8 autres devraient être tirés on ne sait comment ni d' où.
L'expérience: les 21 milliards seraient versés dans un «Fonds européen pour les investissements stratégiques» (FEIS), qui servirait de garantie pour demander 63 autres milliards aux marchés, auxquels s'ajouteraient des cofinancements privés et publics jusqu'à ce qu'on atteigne les fatidiques 315 milliards. Bref, du vent. Et d'argent frais, de cash, pas même l'ombre. Avec la circonstance aggravante que les États membres devraient également y participer avec des fonds propres. Mais, on applaudit. Renzi : "C'est là une victoire, aussi italienne. Il y a quelques mois, personne n'avait le courage de parler de croissance et d'investissements". Monti: «C'est un changement culturel tardif, mais très grand. L'Europe regarde enfin vers l'avenir". Merkel est évidemment prudente, dans le classique jeu rôles: "En principe d'accord".
Mais de quoi parlent-ils donc? Dans leur désinvolture, ils ressemblent de plus en plus aux passagers du Titanic, que, entre un bal et l'autre, allaient inexorablement au-devant de la tragédie. 315 milliards, en admettant qu'ils seraient immédiatement disponibles, ne réussiraient pas à changer grand-chose vu les conditions dans lesquelles nous sommes, à plus forte raison s'il s'agit de ressources entièrement aléatoires, qui restent à vérifier. Mais de plus, l'objectif même d'un million d'emplois de plus (1,3 millions pour être précis), quel sens peut-il avoir dans une mer de chômeurs qui dans l'UE à 28, a maintenant atteint les millions ? Peut-on vraiment croire que l'on peut sortir de la crise par des annonces, c'est-à-dire avec les mêmes politiques qui jusqu'à présent en ont marqué dramatiquement la gestion?
D'un point de vue rationnel, tout cela apparaît incompréhensible. Cherchons le secours de George Orwell: «La guerre, c'est est la paix, la liberté, c'est l'esclavage, l'ignorance, c'est la force ... l'austérité, c'est est expansion, la récession, c'est la croissance...". Et le but ? À part celui de démanteler ce qui reste du «modèle social européen», de réorganiser notre société en fonction de l'intérêt de l'entreprise et du capital financier, je n'en vois pas d'autres. Autrement, ce serait de la folie à l'état pur.
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