par Vicente ROMANO. Traduit par Esteban G., révisé par Fausto Giudice, Tlaxcala
Original : El capitalismo no es planificable - Reseña del libro Tiempo de la ira, de Jutta Ditfurth
Jutta Ditfurth, un exemple d'honnêteté et de cohérence révolutionnaires, nous offre un nouveau cadeau avec un autre de ses excellents livres: Zeit des Zorns (Temps de la colère). Militante célèbre de la gauche allemande antidogmatique, experte extraordinaire de l'évolution ou de la régression de la gauche classique de son pays, elle nous offre un travail indispensable pour connaître les événements sociopolitiques et socioéconomiques de l'Allemagne durant ces dernières décennies.
Cette sociologue, journaliste et militante politique engagée dans les plus beaux idéaux de l'humanisme marxiste et de l'écologisme, nous présente ici un essai polémique, mais révélateur, sur la nature et les tendances du capitalisme et sa crise actuelle.
Il y a des « gens de gauche », dit-elle, qui s’imaginent que le capitalisme peut être réformé et transformé en une organisation sociale plus humaine. Erreur crasse, proclame-t-elle. Les marxistes de salon qui défendent ces positions ne font que manifester la crainte de perdre les agréments sur lesquels ils sont assis. Il n'y a pas de capitalisme sans lutte de classes, affirme-t-elle. Et tant que les opprimés ne se rebelleront pas, la lutte émancipatrice reste réduite à cela, à à des colloques réformistes, ou plutôt conformistes, de salon.
Jutta Ditfurth signe ici un courageux règlement de comptes avec les politiciens et les fonctionnaires qui ont trahi les idéaux d'une société plus humaine. Qu’en est-il du principe espérance de la gauche ? Se demande-t-elle. Qui se dresse aujourd'hui pour mettre des limites au capitalisme et combattre la pauvreté et la destruction de la nature ?
Dans la lignée d'autres femmes allemandes comme Rosa Luxemburg, Elisabeth Abendroth ou Ulrike Meinhof, chacune à sa manière, Jutta prête sa voix indignée à tous ceux qui se trouvent désemparés face à ce système arrogant dévastateur de l'humanité et de la nature. Elle expose avec un langage simple et clair la véritable nature du capitalisme, la crise actuelle et ses tendances vers l'autoritarisme et le néofascisme
Sans avoir besoin de s’appuyer sur la crise, le capitalisme est déjà, en son état normal, une catastrophe pour les êtres humains et la nature. Il ne peut pas exister sans le profit ni l’exploitation. Les deux seules sources de toute richesse sont la force de travail humaine et les ressources naturelles. Et le capitalisme s'efforce de les soumettre et de les exploiter au maximum. C’est son essence même, consubstantiel à son système de production. Le blabla que tout le mal vient de l'avarice des banquiers et des gestionnaires irresponsables n'est rien de plus que de la simple parlotte. Oui, ils sont avaricieux, mais c'est la structure elle-même de ce mode de production qui les force à être ainsi. Et celui qui n'exploite pas au maximum perd sa carrière ou son évolution de carrière.
La seule chose qui peut freiner cette ardeur destructrice se sont les luttes de classe. Aucune crise ne l’arrête, il est la crise. Le capitalisme est en crise permanente, ici ou là. Pour des millions et des millions de personnes, le capitalisme, avec crise ou sans crise, n'est autre chose qu’une catastrophe pour leurs vies : ils travaillent comme esclaves dans les grandes propriétés rurales, ils créent la richesse sociale dans une quelconque usine ou atelier, ils cousent la dernière mode en Europe de l’Est, en Chine ou au Vietnam.
La production capitaliste, le mode d'accaparement de la plus-value, comme disait Karl Marx, provoque des dommages physiques et psychiques énormes aux êtres humains : maladies nerveuses et cardiovasculaires, infections, cancer, etc. Et les progrès de la médecine se transforment en de nouvelles formes d'accumulation de richesse pour les conglomérats pharmaceutiques. Et seule une minorité infime de l'humanité a accès à ces progrès.
Oui, nous dit Jutta Ditfurth, le capitalisme est réformable, mais rarement au bénéfice de l'humanité. Parfois on perd même les bénéfices humains, les conquêtes sociales de tant d'années de luttes. Et c’est cela que l’on appelle le progrès. Tant de batailles perdues !
Dans ce parc de Berlin, entre un panneau qui avertit que « Les chiens doivent être tenus en laisse » et un autre qui interdit les grillades (en turc, en grec et en serbo-croate, à l’usage des immigrés culturellement sous-développés), une main anonyme a ajouté « les hommes ne sont pas des ordures ».
Source: Gerhard Seyfried, http://blogs.taz.de/zeichenblog/kategorie/schilderguerilla/
Beaucoup de ces réformistes n’ont rien à objecter sur son essence. Ils parlent de « déviations », d'« avarice », « de capitalisme destructeur » et autres idioties. Mais jamais ils n’admettent que c’est le capitalisme normal et courant qui présente la crise de suraccumulation comme « crise financière »
Le capitalisme produit continuellement la crise. C’est une chose que l’on ne nous enseigne pas à l'école. Et, en rapport à la crise actuelle, l'auteure se pose les questions suivantes :
Quelles conséquences la crise économique mondiale renferme-t-elle ? Catastrophiques pour les plus pauvres et pour la nature, répond-t-elle.
Le capitalisme va-t-il s’enfoncer ? Non, malheureusement. Mais les démocraties bourgeoises deviendront plus autoritaires et dictatoriales.
Sommes-nous menacés par plus de guerres ? Oui.
L'État peut-il nous sauver du capitalisme ? Non. C’est l'État du capital, et le capitalisme n'est pas planifiable.
Ce que le capital appelle la « crise » c’est la situation qui se crée lorsque ses profits baissent. Mais sa crise n'est pas la nôtre. L'immense douleur humaine qu'il comporte implicitement, le capital s’en souciera comme d’une guigne tant que des révoltes, des rébellions et des révolutions ne surgiront pas.
Personne ne peut se faire d’illusions que la crise mondiale conduira à l’écroulement du capitalisme. Elle aidera à résoudre quelques problèmes, à assainir le marché et à obtenir des profits supplémentaires. L'argent pour mettre en place ces mesures, échappant à notre contrôle, provient des fonds publics (du peuple) et remplit les poches de ceux qui provoquent ce mal social jusqu'aux limites de l’intolérable.
Que personne ne se fasse d’illusions, avertit Jutta Ditfurth. Aucun « être suprême » ne décide du sens de nos vies, ni Église, ni religion et encore moins le capital. Nous sommes les seuls à décider.
Pour tout humaniste et toute personne de gauche, l'essentiel est l'être humain. Et ce dont il s’agit, c’est d’ éradiquer toutes les relations sociales qui privent l’être humain de sa vie, de ses possibilités de développement et de son bonheur.
Jutta Ditfurth
ZEIT DES ZORNS. Streitschrift für eine gerechte Gesellschaft
[TEMPS DE LA COLÈRE. Écrits de lutte pour une société juste]Droemer Verlag, Munich 2 mai 2009. 270 pages.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire