Interview de Ximena Soruco par Roberto AGUIRRE
Cette crise a des racines historiques. Ximena SORUCO nous a expliqués comment s’est formée cette élite orientale, l’origine des revendications autonomistes et le racisme sévissant dans les départements tenus par l’opposition.
La crise interne que vit actuellement la Bolivie est loin de constituer un problème conjoncturel. La bataille entre le gouvernement d’Evo MORALES et les préfets autonomistes séditieux est en fin de compte la traduction concrète d’un rapport de forces historique entre l’élite traditionnelle de l’Est riche et les peuples aborigènes qui, pour la première fois depuis deux siècles, assument le contrôle de l’État.
La chercheuse en sciences sociales bolivienne nous précise quelles sont à ses yeux les origines de cet affrontement, d’où vient la revendication autonomiste et quel est le quotidien vécu par les "collas" [peuple très ancien des Andes, soumis par l’Empire Inca puis réduit à l’esclavage par les conqusitadores espagnols et devenu nomade; utilisé comme terme raciste dans l’Est bolivien pour désigner les Indiens, NdR] dans les régions contrôlées par l’opposition.
Parmi ses nombreux travaux réalisés sur la Bolivie, nous signalons l’ouvrage récent qu’elle a co-signé, Les barons de l’Orient. Élites et pouvoir à Santa Cruz, qui dévoile l’origine de cette classe sociale qui constitue l’opposition aujourd’hui et se bat pour préserver ses intérêts.
- Vue de l’extérieur, la crise en Bolivie peut apparaître comme un affrontement entre l’opposition et le gouvernement de MORALES. Quelles sont les causes profondes du conflit en Bolivie ?
- Je considère qu’aujourd’hui en Bolivie, ce ne sont pas seulement des partis ou représentations politiques, ni même des projets politiques distincts qui sont en dispute (l’un de reconstruction d’un État capable d’avoir la maîtrise de ses richesses afin de les redistribuer à la population et l’autre visant le statu quo en matière de politique économique).
Le conflit actuel met en lumière le fondement de l’État en Bolivie : son colonialisme. Une élite traditionnelle créole, concentrée aujourd’hui dans l’Est, qui considère le territoire national comme son domaine privé, avec une main-d’œuvre indigène qui lui doit obéissance et l’État comme son patrimoine privé, tout cela légitimé par l’héritage.
- Comment s’est constituée cette élite dans l’Est bolivien, que vous décrivez dans l’ouvrage Les barons de l’Orient?
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