lundi 19 septembre 2011

La droite sioniste s’arme pour attaquer les Palestiniens


par Baby Siqueira Abrão Traduit par  Gabrielle Yriarte, édité par  Fausto Giudice, Tlaxcala

Original: A direita sionista se arma para atacar os palestinos
Les rapports des services secrets israéliens affirmaient, au début du mois d’août, que les manifestations prévues à Gaza et en Cisjordanie pour septembre (quand l’ONU votera la reconnaissance de l’État de Palestine) seraient pacifiques, et réalisées loin des colonies juives et des checkpoints. Un rapport parlementaire diffusé également début août, et s’appuyant sur les informations des agences de renseignement israéliennes, prévoyait une faible probabilité d’éruption de mouvements violents, ceux-ci étant considérés par les Palestiniens comme « contreproductifs » à leur cause.
Plus tard, certains officiers des Forces armées israéliennes tinrent en public un tout autre discours. Ils affirmèrent qu’une fois que l’État serait reconnu dans les frontières antérieures à juin 1967 et avec Jérusalem-Est pour capitale, des hordes de Palestiniens marcheraient sur les colonies pour récupérer les terres qui leur appartiennent. À noter que beaucoup de ces officiers sont des colons et parlent pour leur propre défense. Ils ne cachent pas qu’ils aimeraient attaquer des Palestiniens, comme on le verra plus loin.
Le 7 août, le ministre des Affaires Étrangères, Avigdor Lieberman s’est montré encore plus catégorique. À la Knesset, le Parlement israélien, entouré de reporters, il a annoncé un septembre « violent et sanglant, à une échelle encore jamais vue ». Les médias, dont le rôle est de traquer les nouvelles, se firent l’écho de déclarations telles que: « Plus l’Autorité Palestinienne dit qu’elle va œuvrer dans le champ démocratique, plus je vois, moi, de préparatifs de violence et d’effusion de sang. » Sans présenter la moindre preuve tangible de ses affirmations, Lieberman a demandé au gouvernement sioniste de couper ses relations avec l’Autorité Nationale Palestinienne (ANP).
Ce fut Tizahi Moshe, le porte-parole du ministre, qui se chargea d’expliquer que ce dernier avait tiré ces conclusions d’informations officielles et de déclarations « d’autorités palestiniennes ». Cependant, la seule déclaration sur laquelle il s’appuie est celle de Hassan Youssef, le leader du Hamas en Cisjordanie sur Canal 2, en cette même journée du 7 août. Interrogé au sujet de la probabilité pour que les manifestations de septembre dégénèrent dans la violence, il avait répondu que le peuple palestinien pourrait « exploser à tout moment », vu son haut niveau de frustration.
Cependant, cette analyse n’est pas fiable, et Lieberman le sait. Youssef n’est sorti de la prison où il a passé six ans, qu’une semaine avant d’accorder cette interview à Canal 2. Pendant sa réclusion, les protestations non-violentes ont gagné tous les villages palestiniens, et se sont affirmées comme moyen de lutte pour la justice et la liberté.
« En septembre, à l’ONU, nous allons solliciter de la communauté internationale qu’elle nous aide à mettre fin à l’occupation israélienne. Nous avons toujours agi en accord avec la loi. Ce qui est illégal c’est l’occupation, et non les tentatives d’en finir avec elle », réagit Ghassan Khatib, porte-parole de l’ANP. « Israël est en train d’alimenter l’illusion d’un faux scénario pour septembre », ajouta-t-il.


Colons armés en action en Cisjordanie
Bien que les paroles de Lieberman, leader et fondateur du parti d’extrême droite Israel Beytenouv(Israël est notre maison) aient paru hors de propos à l’époque, elles commencent à avoir du sens aujourd’hui. Les actes de violence des colons contre les Palestiniens ont beaucoup augmenté depuis août. La destruction des ressources des agriculteurs (comme la dévastation par le feu des plantations et des oliviers, et les attaques de bergers et de troupeaux) sont devenus courantes. L’invasion de terres palestiniennes, la persécution d’habitants et de militants internationaux, les incendies de mosquées, la lapidation d’enfants, les tirs de mitraillettes dans les campagnes sont des pratiques d’intimidation constantes. Sans parler du récent bombardement de Gaza, crime encore plus grave car il implique des armes chimiques, pour lesquelles les habitants de Gaza servent de cobayes.
Selon un rapport de l’International Solidarity Foundation for Human Rights [Fondation Internationale de Solidarité pour les Droits de l’Homme], au cours du mois d’août 30 personnes sont mortes et 400 ont été faites prisonnières pendant les opérations israéliennes en Palestine. Parmi les prisonniers, 44 enfants, trois journalistes et trois parlementaires. Outre Gaza, les régions qui ont le plus souffert sont Hébron, Bethléem, Silwan (district de Jérusalem), Tulkarem, Salfit, Ramallah et Al Bireh.
Un autre rapport, diffusé le 12 septembre par l’organisation israélienne de droits humains B’Tselem, montre que l’armée israélienne ne respecte pas le « droit fondamental » à la protestation des Palestiniens. Les réactions aux manifestations pacifiques présentent toujours, selon ce document, une « utilisation excessive d’armes de contrôle des foules », comme les grenades lacrymogènes jetées directement sur les manifestants. La soussignée, habituée à couvrir les marches du vendredi peut témoigner que le rapport est fidèle aux faits.
De plus, il y a quelques semaines on a appris que depuis sept mois l’armée israélienne entrainait et armait les colons avec des grenades assourdissantes et à gaz, des grenades lacrymogènes et des balles de métal recouvertes de caoutchouc. Cet équipement s’ajoute aux mitraillettes, que les colons portent sur eux, et aux chiens de garde entrainés à l’attaque, mis à disposition par le gouvernement sioniste.
Mercredi 7 septembre, une réunion à laquelle participaient des membres de l’extrême droite israélienne, des leaders des colons, et des parlementaires a commencé à se préparer à de « possibles confrontations », au cas où l’État palestinien serait reconnu par l’ONU dans les frontières d’avant 1967. Les colons savent que tôt ou tard ils devront rendre les terres qu’ils occupent à leurs propriétaires légitimes, les Palestiniens, mais promettent de résister.
Les critiques acerbes à l’égard de la direction de l’armée n’ont pas manqué. Celle-ci est accusée par le parlementaire Zeev Elkin, du Likoud, de s’être transformée en « plus grand champion de l’ANP, adoptant le concept des deux États ». La critique de la solution à deux États est courante dans la droite israélienne, qui ne prend pas en compte le partage décidé par l’ONU en 1947, et qui établit la création de deux États : la Palestine et Israël. Pour les membres de ce courant politique, la Palestine entière, ainsi que des parties du Liban, de la Syrie, de la Jordanie et de l’Irak appartiennent à Israël, selon un « droit historique » qui n’existe que dans le discours sioniste et dans celui de ses alliés, comme le montre Keith W. Whitelam, professeur et directeur du département d’études religieuses de l’université de Stirling, dans le livre The Invention of Ancient Israel ; the Silencing of Palestinian History [L’Invention de l’ancien Israël : comment l’histoire palestinienne fut passée sous silence].
La critique d’Elkin est liée au fait que l’armée israélienne a « préféré » céder aux forces de sécurité de l’ANP la responsabilité de s’occuper des incidents impliquant des Palestiniens. Encore une fois, le parlementaire se montre mal informé. Cette responsabilité fut négociée aux accords d’Oslo, selon lesquels l’ANP doit s’occuper de la sécurité des zones A, qui correspondent aux villes – là où auront lieu les manifestations. Les secteurs B, situés entre les villes et les villages, sont confiés aux Palestiniens et aux Israéliens en commun ; les zones C, proches du mur de l’apartheid, sont surveillées par les Israéliens. L’armée ne fait donc que respecter les accords.
Pour résoudre le problème, Yaakov Katz, de l’Union Nationale, alliance des partis nationalistes d’Israël, a proposé que les colons organisent des marches dans des points stratégiques de la Palestine, pour aller à la rencontre des marches pacifiques que les Palestiniens feraient en direction des colonies (ce qu’imagine la droite sioniste). Selon Katz, ceci obligera l’armée à agir afin d’empêcher les colons d’entrer dans les villes.
Yoni Youssef, porte-parole des colons de Sheik Jarrah à Jérusalem-Est, va plus loin : il invoque la Loi Dromi, qui permet à des propriétaires de tuer ceux qui entrent dans leurs maisons. Pour lui, il serait ainsi possible de tirer sur les Palestiniens qui tenteraient d’approcher les résidences juives. Le problème, c’est qu’à Sheik Jarrah, les colonies israéliennes et les habitations palestiniennes sont très proches les unes des autres, parfois face à face. Des colons peuvent assassiner des Palestiniens qui étaient seulement sortis dans la rue, et alléguer ensuite qu’ils se dirigeaient vers leurs maisons.
Dans cette tâche, ils seront aidés par les volontaires mobilisés par La Ligue de Défense Juive (LDJ) dont le siège est en France : ceux-ci, du 19 au 25 septembre, promettent de défendre leurs « frères » de Cisjordanie – c’est-à-dire, les colons – face aux « agressions des occupants palestiniens et, donc, de renforcer les dispositifs de sécurité des village juifs de Judée et Samarie ». Remarquez que les « occupants » sont les Palestiniens, et non les colons, et que la Cisjordanie est appelée « Judée et Samarie », deux noms bibliques de pays où les Juifs sont censés avoir vécu. Le voyage est réservé « aux militants ayant une expérience militaire ».
Ce que les représentants de l’extrême droite ne savent pas, c’est que ce n’est pas l’armée qui va s’occuper de la sécurité durant les manifestations, mais la police. Dans une interview à Brasil de Fato, la porte-parole des forces armées, Avital Leibovitch, a affirmé que l’armée se contenterait « d’observer » les manifestations pacifiques. « Si les manifestations sont vraiment pacifiques, l’IDF n’a pas de raison d’intervenir », a-t-elle dit.
Si les colons entrent dans les villages pour les attaquer, ou s’ils décident de marcher contre les villes, ce sera la police israélienne qui les arrêtera. Et, d’après Avital Leibovitch, elle aura carte blanche pour agir en vue d’éviter les excès. De plus, des escadrons d’alerte composés de réservistes seront dans les zones les plus sensibles et « chercheront à éviter les heurts ». L’IDF n’entrera en scène que si nous perdons le contrôle de la situation, a déclaré la porte-parole. « Nous ne voulons pas d’effusion de sang. Nous avons appris avec la Nabka. Nous n’utiliserons que des armes non létales, comme les camions à eau “skunk“ (mouffette) et les gaz lacrymogènes » dit-elle. Et elle garantit que l’eau fétide lancée sur les manifestants par les “skunk“ ne contient pas de produits chimiques : « Ce sont des substances organiques ».


Un camion skunk
Et qu’en est-il des « lignes rouges » qui indiquent jusqu’où les Palestiniens peuvent aller sans se faire tirer dessus par les colons ? « Ah, ils savent très bien où sont les lignes », répond Avital Leibovitch. « Nous sommes en communication régulière avec eux », ajoute-t-elle. En vérifiant l’information auprès de leaders populaires, Brasil de Fato a découvert qu’ils n’ont jamais entendu parler de ces lignes. Il est probable que seules les autorités palestiniennes les connaissent. Pourquoi ne préviennent-elles pas tout le monde, si elles ne veulent pas déclencher de tragédies ? Mahmoud Abbas, président de l’ANP a demandé au cours d’une réunion avec les coordinateurs de la campagne Palestine : 194ème État (déjà en cours dans tout le pays) à ce que personne ne s’approche des colonies ni n’affronte leurs habitants. Il semblerait donc que cette autorité se réserve le « sale travail ».
L’extrême droite israélienne n’hésite pas non plus à recourir aux « travaux internes », c’est-à-dire à faire commettre à des personnes des actes de provocation pour déclencher des réactions violentes de la part d’Israël. Le ministre Avigdor Lieberman a déjà prévenu qu’il allait envoyer de l’argent et des armes au PKK, le Parti des Travailleurs du Kurdistan, qui depuis des années lutte contre la Turquie, et qui récemment a essuyé d’importantes attaques de l’armée turque. Il s’agit là de représailles contre le gouvernement du premier ministre R.T. Erdogan, qui a coupé les relations diplomatiques avec Israël et promis une série d’actions en Méditerranée (« pour qu’Israël n’y navigue plus à son gré»), après la diffusion du Rapport Palmer. Parrainé par le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-Moon, ce rapport affirme que le blocus maritime de Gaza n’est pas illégal et qu’Israël a le droit d’empêcher des navires étrangers d’accoster sur le littoral palestinien. Cela a exempté le pays de sanctions pour l’assassinat, le 31 mai 2010, de neuf pacifistes turcs, et pour l’attaque du Mavi Marmara, navire battant pavillon turc qui participait à la première Flottille de la Liberté.
Si Lieberman peut agir ainsi contre la Turquie, pour quelle raison agirait-il autrement à l’égard de la Palestine ? Les mercenaires ne manquent pas sur le marché. Il suffit de les recruter pour avoir un mois de septembre « violent et sanglant, à une échelle encore jamais vue ». Exactement comme le souhaite Lieberman.

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