mercredi 25 juillet 2012

FusilléEs pour avoir traduit des bulletins d’information de la BBC

par Alejandro Torrús. Traduit par  Fausto Giudice, Tlaxcala
Huit personnes, dont une femme de 20 ans, furent fusillées le 12 août 1942 à Almería pour avoir traduit et distribué des informations de la radio britannique sur la Seconde Guerre mondiale.
Encarna avait à peine 20 ans. Caractère Enthousiaste de caractère, ceux qui l’ont connue disent que c’était une jeune femme intelligente, joyeuse et très bien éduquée. Elle travaillait à la librairie anglaise et n’était affiliée à aucun parti ou syndicat. On ne sait pas grand-chose de sa courte vie et ce qu’on en sait ne diffère pas de celle de n'importe quel jeune de son âge. Encarna avait son travail, son petit ami et un désir inné de savoir. Mais le 12 août 1942 elle fut fusillée par le régime de Franco à Almería en compagnie de sept hommes, tous accusés de "complot contre l'Etat." Leur seul crime avait été de traduire et de distribuer de l'information de la BBC sur la Seconde Guerre Mondiale. L'histoire de ces huit personnes et des plus de cent personnes accusées dans le même procès est connue sous le nom de El parte inglés (Le bulletin anglais).
Encarnita Magaña, fusillée en en 1942

"La distribution des bulletins de guerre fut une excuse. La Phalange se débarrassa de ceux dont elle voulait se débarrasser depuis des années et trouva ce prétexte comme elle aurait pu en trouver un autre", dit à Público Miguel Molina, fils de Diego Molina, capitaine de l'armée républicaine, et l’un des fusillés dans cette affaire.
En Europe, se livrait la bataille des démocraties contre le fascisme et en Espagne le nouveau régime n’avait pas encore réussi à s’institutionnaliser dans toutes les provinces. La victoire des Alliés dans la guerre était le seul espoir pour ceux qui avaient combattu pour l’ordre démocratique et républicain, mais le silence et la manipulation de l'information dans les médias officiels faisaient qu’il était impossible d'obtenir des informations véridiques sur le conflit.
La seule source d'information fiable et le seul espoir des républicains étaient les bulletins de guerre de la BBC qui parvenaient dans la ville par le biais du consulat britannique à  Almería.
"Un groupe de personnes a établi des contacts avec le consulat britannique à Almeria, réussissant à obtenir les bulletins de guerre. Ensuite, ils les traduisaient et les remettaient aux guérilléros républicains en clandestinité et les faisaient pénétrer dans la prison par les filles  les plus jeunes des prisonniers ou dans la nourriture, dans les couches pour bébés ... », raconte Martirio Tesoro, vice-présidente de l’Association pour la mémoire historique d’Almería.
"L’oncle Paco"
Une de ces petites  filles qui entraient dans la prison pour résumer l'état d'avancement de la guerre en Europe était Ana Maria Moreno, qui a aujourd'hui 83 ans. «On me donnait une information et moi, j’allais à la prison et je le racontais à mon père du mieux que je pouvais car nous étions surveillés par la Guardia Civil. Par exemple, je me souviens que le pseudonyme de Franco était «l'oncle Paco». Ainsi, chaque fois que je devais le nommer, je parlais de mon oncle Paco ", dit Ana Maria, qui avait alors 12 ans.
Le réseau fonctionna pendant environ un an. Le 18 Avril 1941, le Phalange découvrait l'affaire et accusait plus de 100 personnes de "complot contre l'État". Alors commença un long procès qui  allait conduire huit personnes dans une fosse  contre le mur d'entrée du cimetière de San José (Almería). "Il fallait nettoyer les rouges", résume Martirio Tesoro.
La découverte de ce système d'information clandestin a été l'étincelle qui a allumé la mèche de la répression franquiste à Almería. Dans cette ville andalouse la Phalange était en compétition avec la Guardia Civil pour démontrer à la haute hiérarchie sa valeur et sa capacité à maintenir l'ordre dans la ville et peut-être obtenir la mairie. "Dans cette cause judiciaire, qui a pris quelques jours du mois de mai 1941, on a utilisé une procédure dite "inquisitoire". C'est-à-dire qu’on pouvait utiliser des moyens peu orthodoxes pour obtenir des aveux, y compris la violence ou la torture. Ainsi, nous voyons que certains des témoins réfutent les déclarations faites aux policiers de la Phalange quand ils comparaîtront devant le juge d'instruction et même quelques-uns, sont admis à l'hôpital avec des fractures et contusions de toutes sortes sur tout le corps", détaille Eusebio Rodriguez, historien qui a fait une recherche sur l'affaire.
La sentence, rendue publique quelques mois plus tard, condamnait à mort huit personnes pour appartenance à une "organisation clandestine de type marxiste révolutionnaire antifasciste d'action et d’agitation, dont l’activité était la propagande marxiste organisée dans le sens d'un changement de régime en Espagne que devrait entraîner la victoire de l'Angleterre et la Russie dans la guerre actuelle". Parmi les huit, la jeune Encarna Magaña, l’unique femme fusillée dans la province d’Almería.
 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire