par Vicenç Navarro, 28/9/2009
Original : La doble moral de los liberales: los casos de Honduras y Colombia
La pensée libérale a toujours recouru à un discours qui met l’accent, en théorie, sur la défense des droits individuels comme raison de sa propre existence. Dans sa version économique, cette philosophie politique utilise ce cadre idéologique pour promouvoir la suprématie du marché, dans lequel l’individu consommateur est supposé définir les priorités de la société à travers sa consommation. De là découle –selon le credo libéral - la suprématie du marché sur l’Etat. Il n’est donc pas surprenant que ce soit le monde patronal qui ait fait la promotion la plus intense du libéralisme, présenté lui-même comme le grand défenseur des libertés individuelles.
La pensée libérale a toujours recouru à un discours qui met l’accent, en théorie, sur la défense des droits individuels comme raison de sa propre existence. Dans sa version économique, cette philosophie politique utilise ce cadre idéologique pour promouvoir la suprématie du marché, dans lequel l’individu consommateur est supposé définir les priorités de la société à travers sa consommation. De là découle –selon le credo libéral - la suprématie du marché sur l’Etat. Il n’est donc pas surprenant que ce soit le monde patronal qui ait fait la promotion la plus intense du libéralisme, présenté lui-même comme le grand défenseur des libertés individuelles.
L’expérience historique, néanmoins, montre que cette tradition libérale a rarement respecté ses postulats idéologiques de respect et de défense des libertés individuelles. Il est bien connu qu’une des principales sources de référence du libéralisme, l’économiste Milton Friedman, appuya la dictature du général Pinochet(voir Navarro, “La prensa liberal y Milton Friedman”, danswww.vnavarro.org, section économie politique). En Espagne nous connaissons bien cette incohérence libérale. Ce fut précisément un porte-parole très visible du libéralisme espagnol, le banquier Juan March qui, quand il vit que ses intérêts patronaux étaient affectés par les politiques publiques du gouvernement républicain démocratiquement élu, appuya le coup militaire de 1936 qui instaura une des dictatures les plus cruelles et sanglantes qu’a connu l’Europe au XXe siècle. Selon le professeur Edward Malefakis de l’Université Columbia à New York, pour chaque assassinat politique commis par Mussolini, le dictateur Franco en commit 30.000. En réalité, la Banque (qui était le pouvoir de fait promoteur du libéralisme en Espagne, fait qui continue aujourd’hui), fut le groupe de fait, dirigé par la Banque March, qui finança ledit coup d’Etat militaire. Il en alla de même en Catalogne avec un grand patron libéral de l’industrie catalane, Francesc Cambó, lequel appuya aussi fortement le coup militaire quand il vit que ses intérêts de classe étaient affectés par les politiques publiques du gouvernement républicain démocratiquement élu.
Une situation similaire est à l’origine du récent coup d’État militaire au Honduras qui a renversé un gouvernement démocratiquement élu. Les médias libéraux espagnols ont expliqué le putsch militaire en utilisant le même argument que celui des putschistes au Honduras pour le justifier, à savoir la nécessité d’empêcher que le président Zelaya modifie la Constitution pour se maintenir au pouvoir. Une voix proéminente de ce chœur libéral a été celle de Mario Vargas Llosa qui comme prévu, dans un article dans El Pais (El golpe de la burlas, 12.07.09), tout en étant critique quant aux formes, a défendu la destitution du président Zelaya, avec les mêmes arguments. Selon lui, il n’était pas permis que Zelaya se perpétue au pouvoir. Mario Vargas Llosa, tout comme la majorité des médias libéraux, ajouta que la destitution du mandataire était aussi une conséquence logique du manque d’appui au président Zelaya et de son impopularité élevée, citant des enquêtes dont j’ai montré dans un autre article qu’elles étaient clairement manipulées (Las falsedades sobre Honduras, Publico, 23.07.09).
Le putsch militaire au Honduras a entraîné une énorme répression contre les forces politiques qui appuyaient le président Zelaya, répression qui a impliqué la diminution substantielle des droits politiques et civils de la population hondurienne, avec la fermeture des médias opposés au nouveau gouvernement putschiste et la persécution de journalistes critiques du nouveau régime. Parmi les autres mesures répressives citons l’interruption de la fourniture d’électricité à des médias non favorables au nouveau gouvernement putschiste, la violente suppression de manifestations en faveur du président Zelaya, des assassinats et arrestations de leaders hostiles au gouvernement putschiste, des restrictions de mouvements de la population et de nombreuses autres mesures répressives qui sont à peine évoquées dans ces médias libéraux. Aucun d’ eux (je répète, pas un seul) n’a dénoncé cette répression. Et Mario Vargas Llosa, qui se présente comme un grand défenseur des droits individuels, s’est cantonné dans un silence assourdissant.
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